Comment Canal Plus domine le marché du cinéma

Le groupe de télévision payante jouit d'une position très privilégiée sur le marché du film français, rappelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Il a pré-acheté plus de la moitié des films en 2011. Ce qui lui confère un vrai pouvoir auprès des producteurs, et un avantage concurrentiel certain sur le marché de la télévision.
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Canal Plus est le meilleur ami du cinéma. Le Conseil supérieur de l?audiovisuel (CSA), qui vient de rendre public ses deux avis consultatifs sur la reprise de Direct Star et Direct 8, et sur la fusion avec TPS, vient de rappeler la position privilégiée de Canal Plus dans le cinéma. Position qui lui donne un avantage de taille sur le marché de la télévision. Ces avis ont alimenté le dossier de l?Autorité de la concurrence, qui a rendu la semaine dernière ses propres avis sur TPS et les engagements de Canal Plus dans la télévision gratuite.

Principal constat du CSA : la fusion avec le bouquet TPS en 2006 a octroyé à Canal Plus des « positions très importantes » sur le marché de l?acquisition des droits, que ce soit dans la télévision payante ou les services de paiement à la séance. Même dans la vente de films sur catalogue, malgré la présence de plusieurs distributeurs, Canal Plus domine le marché, via sa filiale StudioCanal.

Canal Plus a acquis plus de la moitié des films français et européens

Ainsi, Canal Plus a pré-acheté 55% des 272 films français et européens produits en 2011. En terme d?investissements, le groupe de télévision payante a déboursé à lui seul 56% (214 millions d?euros) des sommes injectées par l?ensemble des chaînes de télévision. Le pourcentage monte même à 59% si l?on ne s?en tient qu?aux films français et atteint 91% si l?on ne se réfère qu?au marché des chaînes de télévision payante, excluant les chaînes gratuites comme TF1 ou M6. C?est un fait : Orange, arrivé en 2008 dans l?édition de chaînes, est resté un acteur mineur du secteur. Si Canal Plus a conservé sa suprématie, c?est qu?il propose aux producteurs à la fois des fenêtres « d?exclusivité » de sa chaîne éponyme, et des fenêtres complémentaires offertes ses autres chaînes cinéma Ciné+. Ainsi, le groupe a ainsi développé une stratégie « complémentaire », lui permettant d?être très attractif auprès des producteurs, qui « maximisent » leurs revenus, note le CSA.

Une position privilégiée dans les films américains

A cela s?ajoute la position du groupe de télévision dans le cinéma américain : quand Orange faisait encore partie des acteurs qui comptent, Canal Plus avait conclu des « output deal » (contrat cadre octroyant un premier choix sur les films) avec les grands studios américains (Sony, Fox, Universal, Paramount, Disney) laissant à Orange seulement deux studios (Warner et MGM). En outre, Canal avait aussi conclu avec les « mini majors (LionsGate, New Regency, Spyglass, Weinstein, Marvel et Dreamwork). Pas étonnant qu?Orange n?ait jamais pu « rivaliser » avec Canal Plus.

Autre domaine de domination, la vente de films sur catalogue, via StudioCanal. La filiale de Canal Plus est numéro un sur le marché, avec 5.000 films en catalogue, loin devant le numéro deux Gaumont (800 films). C?est StudioCanal qui alimente la plateforme de vidéo à la demande CanalPlay. En revanche, dans la fiction, le CSA remarque que Canal Plus investit moins « que les chaînes historiques de la TNT ». Et que même si le groupe développe depuis un programme de créations « originales », sa position n?est pas « significative » sur le marché.

Outre l?achat de droits, Canal Plus jouit également d?une bonne position dans l?édition de chaînes cinéma, dont il réservait la plupart à CanalSat. En revanche, sur le marché des droits sportifs, le CSA, qui indique que le sport reste la première raison d?abonnement à Canal Plus, a largement tenu compte de l?arrivée de BeInSport sur le marché. Du coup, le Conseil a considéré que Canal Plus pouvait conserver Sport + en exclusivité, et que sa position sur le marché des droits n?était plus si avantageuse.

TF1 et M6 attendent le CSA au tournant

Du coup, selon le CSA, le rachat des chaînes gratuites Direct 8 et Direct Star ne fera que renforcer cette situation. L?Autorité de la concurrence a déjà pris en compte une partie des constats du CSA, puisqu?elle a demandé à Canal Plus de mettre à la disposition des autres fournisseurs d?accès Internet ses chaînes cinéma Ciné+. Elle a aussi limité l?achat de films pour ses chaînes à la fois payantes et gratuites. Mais TF1 et M6 attendent plus du CSA, qui doit rendre son propre feu vert à l?opération à la rentrée. Ainsi, le PDG de TF1 Nonce Paolini a par exemple souhaité que les obligations d?achat et de diffusion en matière de cinéma de Direct 8 soient renforcées.

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