Climat : les pistes de la Bourgogne-Franche-Comté pour atteindre la neutralité carbone en 2050

Les assises de la bioéconomie en Bourgogne-Franche-Comté, qui se sont déroulées à Beaune, sont venues conclure près de deux années de travaux prospectifs. A l’origine de cette initiative, l’agence de l'environnement (Ademe), a dévoilé six chantiers prioritaires pour le territoire afin de répondre aux différents besoins de la population.
Une expérimentation agroécologique en agriphotovoltaïsme menée par le groupe Alliance BFC, à Verdonnet, en Côte-d'Or.
Une expérimentation agroécologique en agriphotovoltaïsme menée par le groupe Alliance BFC, à Verdonnet, en Côte-d'Or. (Crédits : Amandine Ibled)

Dans quelles conditions les territoires peuvent-ils atteindre l'objectif de neutralité carbone 2050 fixé par l'Accord de Paris en 2015 ? C'est sur cette question que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie Bourgogne-Franche-Comté (Ademe BFC) s'est penché durant 18 mois avec la participation de près de 300 acteurs socio-économiques du territoire. En s'appuyant sur les quatre scénarios nationaux publiés en 2021, l'antenne régionale de l'Ademe a décliné six chantiers prospectifs susceptibles de permettre à la Bourgogne-Franche-Comté « de participer à l'effort de guerre nationale », selon les mots de Lionel Combet, chargé de mission bioéconomie et référent prospective à l'Ademe Bourgogne-Franche-Comté, animateur de ces travaux uniques en France.

« Nous avons élaboré des scénarios équivalents qui peuvent impacter la vie des territoires, les économies de ces territoires, et le quotidien des acteurs locaux », explique ce dernier. L'idée de ces travaux étaient de redéfinir des scénarios à l'échelle de la région en focalisant sur un sujet spécifique : la bioéconomie. Un terme qui regroupe l'utilisation des ressources végétales issues de l'agriculture, de la forêt et du bocage. « Nous avons travaillé sur ces ressources, à la fois pour évaluer leur disponibilité, la façon dont on peut les valoriser pour répondre aux différents besoins de la population : besoins alimentaires, besoins en matériaux, besoins en énergies », précise Lionel Combet. « Puis, nous nous sommes également intéressés à la question de risque de conflits dans l'utilisation de ces ressources puisque ce sont des ressources qui peuvent être utilisées pour différents besoins », poursuit-il.

Forêt, bocage et matériaux biosourcés

Le premier chantier porte sur le renouvellement forestier, car la forêt est aujourd'hui en difficulté face au changement climatique, notamment sa fonction de puit de carbone. La région a pour ambition de multiplier par deux la capacité d'absorbation carbone en maintenant une activité économique assise sur la production de bois d'œuvre. Le deuxième chantier vise la réhabilitation du bocage : « 70% du bocage français a disparu sur les 100 dernières années », indique Lionel Combet. L'objectif est de recréer des haies dans les champs, et inventer de nouveaux usages sur les 400.000 ha de prairies libérées par le recul tendanciel de l'élevage bovin. Le troisième chantier est la volonté de développer l'utilisation des matériaux biosourcés dans la construction (bois paille fibre végétale...), source de décarbonation et débouché́ pour la forêt locale. « Ces trois premiers chantiers sont des sujets sur lesquels je souhaiterais regrouper des acteurs concernés pour réfléchir à la meilleure façon de travailler collectivement, afin de changer d'échelle, et de se donner une ambition réelle à la hauteur des enjeux », souligne Lionel Combet.

Innovation agroécologique, agrivoltaïsme, filières végétales

Le quatrième chantier se focalise sur l'innovation agroécologique afin de mettre en œuvre à grande échelle de nouvelles pratiques protectrices des sols et sobres en intrants. Le secteur agricole est particulièrement vulnérable par sa dépendance à un système alimentaire mondialisé, aux pressions géopolitiques, aux difficultés d'approvisionnement, et aux crises successives. La crise COVID en a, notamment, démontré les limites. « Aujourd'hui producteurs, transformateurs, distributeurs et consommateurs sont mis à mal », constate Lionel Combet. « Il faut réorganiser cette chaîne en s'attachant à développer une agriculture de proximité moins dépendante des intrants, que ce soit les produits phytosanitaires ou les engrais azotés », poursuit-il. Le cinquième chantier porte sur l'expérimentation agrivoltaïque avec la double ambition de contribuer au développement de la production locale d'électricité́ et d'apporter un complément de revenus aux agriculteurs. Des opérateurs proposent aujourd'hui de développer sur les terres agricoles, l'installation de solutions techniques de production d'électricité. Toutefois, la question de la complémentarité ou de la concurrence entre production énergétique et production alimentaire sur les terres agricoles, se pose.

« L'idée est de se donner un cadre transparent pour évaluer la pertinence des solutions proposées avant de se lancer à grande échelle dans ce type de développement », confie Lionel Combet. Enfin, le dernier chantier vise à développer de nouvelles filières végétales, comme les fruits et légumes, les plantes aromatiques, les protéines végétales, en intégrant une approche aval pour assurer à la fois les débouchés et la transformation locale. L'idée est de rééquilibrer les flux en améliorant le niveau d'auto-suffisance des territoires afin éviter d'être dépendant d'un système alimentaire mondialisé d'importation qui pourrait être critique en cas de crise. Par exemple, lorsque la guerre en Ukraine a éclaté, l'agriculture a été privé de certains intrants pour produire. « Si on veut aller vers un modèle d'agriculture un peu différent et guider les territoires à gagner en résilience alimentaire, cela suppose que les territoires se réapproprient tout ou partie de leurs moyens de transformation », explique Lionel Combet. Par exemple, rouvrir des moulins pour fabriquer de la farine à partir du blé produit dans la région. « C'est une question fondamentale ! Si on veut permettre aux acteurs de ne plus être dépendants de l'importation financière, elles-mêmes soumises aux spéculations financières, aux pressions géopolitiques, et aux crises répétition, il faut que les acteurs soient plus ancrés dans les dynamiques de territoire et se réapproprient des outils qui leurs ont échappé », souligne-t-il.

Ces sujets sont aussi sources de questionnements dans d'autres régions que la Bourgogne-Franche-Comté. Pour autant, tous les territoires n'ont pas le même patrimoine naturel. Reste à trouver les équilibres possibles entre les régions pour répondre aux ambitions nationales de neutralité carbone d'ici 2050.

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Commentaire 1
à écrit le 31/10/2023 à 9:33
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La jolie photo n'incline pas à penser qu'on va dans le bon sens!

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