
Une législation européenne qui fera date dans l'histoire énergétique du Vieux Continent et qui s'inscrit dans son objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Ce lundi 9 octobre, les 27 Etats membres de l'Union européenne ont entériné un texte de loi qui double quasiment la part des renouvelables dans la consommation énergétique de l'UE d'ici 2030. Satisfaction de la France : une exemption sur l'hydrogène produit à partir du nucléaire a été introduite dans le texte.
Cette législation avait déjà été adoptée par les eurodéputés mi-septembre, et le feu vert du Conseil de l'UE (qui représente les Etats) ouvre la voie à son entrée en vigueur. Il intervient deux semaines avant l'annonce attendue d'un nouveau paquet réglementaire proposé par Bruxelles pour soutenir le secteur de l'éolien.
Objectif contraignant
Fruit d'un accord conclu fin mars entre le Parlement européen et les Etats membres, le texte adopté fixe l'objectif contraignant d'au moins 42,5% d'énergies renouvelables dans la consommation européenne d'ici 2030, contre un niveau actuel d'environ 22%.
Cette nouvelle loi comporte aussi une cible « indicative » de 45% que les Vingt-Sept s'efforceront d'atteindre. Elle accélère notamment les procédures d'autorisation, avec l'établissement de « zones dédiées » où les autorités nationales seront tenues d'approuver sous 12 mois maximum les nouvelles installations d'énergies renouvelables (délai limité à 24 mois en dehors, 3 ans pour les éoliennes offshore). En l'absence de réponse pour les projets dans les zones dédiées, l'accord sera considéré acquis.
Ces dispositions pourraient être encore davantage assouplies pour les éoliennes dans les propositions législatives préparées par la Commission. Dans les transports, les Etats devront par ailleurs d'ici 2030 soit réduire de 14,5% l'intensité des gaz à effet de serre grâce aux renouvelables, soit atteindre 29% de renouvelables dans la consommation finale d'énergie du secteur. De façon indicative, l'UE prévoit aussi 49% de renouvelables dans la consommation énergétique des bâtiments.
La France obtient l'hydrogène à partir du nucléaire
Enfin, en 2030, dans chaque pays, l'hydrogène utilisé par l'industrie devra à hauteur, d'au moins 42%, avoir été fabriqué à partir d'énergies renouvelables. L'accord prévoit une flexibilité pour les pays disposant d'un parc nucléaire pouvant produire de l'hydrogène décarboné, leur permettant d'abaisser de moitié cette cible d'hydrogène « vert » à condition que la part d'hydrogène produit à partir d'énergies fossiles ne dépasse pas 23% de leur consommation.
Pour autant, la France avait jugé ce seuil inapplicable en raison de son importante production d'ammoniac (matière première des engrais azotés), à partir d'hydrogène fabriqué par reformage à la vapeur du gaz naturel. À la suite d'âpres discussions avec plusieurs pays rétifs à l'atome, Allemagne en tête, Paris avait obtenu que les usines d'ammoniac concernées soient, sous certaines conditions, exclues du calcul, si elles ont fait l'objet d'investissements pour réduire leurs émissions de CO2.
Par ailleurs, le texte renforce les critères de « durabilité » exigés pour la biomasse (bois brûlé pour l'énergie), tout en lui maintenant son statut de « renouvelable », au grand dam des ONG environnementales hostiles à la pratique.
Les renouvelables, indispensables dans la course climatique
Au-delà de l'Union européenne, pour rester sous 1,5°C de réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle, le monde devra encore ajouter en moyenne 1.000 GW d'énergie renouvelable par an jusqu'en 2030, soit plus de trois fois plus que les niveaux de 2022. Début mai, l'émirati Sultan Ahmed al-Jaber, président de la COP 28, qui se tiendra en novembre à Dubaï, a invité les pays membres à « accélérer le développement des énergies renouvelables, qui doivent tripler leur capacité d'ici à 2030 et la doubler à nouveau d'ici à 2040 », sans toutefois mentionner l'arrêt de l'usage des énergies fossiles, parlant plutôt d'une « élimination progressive ». Une position plusieurs fois dénoncée par de nombreuses ONG environnementales, qui elles, appellent à fortement réduire, voir à totalement arrêter le développement des énergies carbonées.
Selon un rapport publié par l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena) quelque 86% (187 gigawatts) de la capacité renouvelable mise en service en 2022 avait un coût inférieur à celui de l'électricité produite à partir de combustibles fossiles (charbon, gaz). L'an dernier, le secteur mondial de l'électricité a directement économisé, grâce aux énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectricité...), 520 milliards de dollars sur le coût des combustibles grâce aux sites de production installés dans le monde depuis 2000. Sans ce déploiement réalisé au cours des deux dernières décennies, les répercussions économiques de la hausse du prix des combustibles fossiles en 2022 auraient été bien plus graves, « dépassant même la capacité de nombreux gouvernements à les atténuer », souligne le rapport.Les énergies renouvelables de plus en plus compétitives
(Avec AFP)
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