Guillaume Faury (Airbus) : « Nous allons atteindre la neutralité carbone en 2050 »

PARIS AIR FORUM- Décarbonation de l’aviation, carburants durables, lancement du successeur de l’A320 NEO, avion à hydrogène, concurrence avec Boeing, évolution du transport aérien, crise de la supply chain, souveraineté, SCAF, impact de la loi de programmation militaire sur les activités de défense et spatiales, Ariane 6, Newspace…, dans une longue interview accordée à La Tribune à l’occasion du Paris Air Forum qui s’est tenu ce vendredi, Guillaume Faury, le président exécutif d’Airbus a détaillé sa vision sans esquiver aucun de ces sujets stratégiques.
Guillaume Faury
Guillaume Faury (Crédits : DR)

LA TRIBUNE - L'an dernier, vous nous avez parlé de nombreuses compétitions en cours sur le domaine du long-courrier, mais jusqu'ici, c'est plutôt le Boeing 787 qui a tiré son épingle du jeu. Nous sommes à quelques heures du grand retour du salon du Bourget. Est-ce que nous pouvons nous attendre à une revanche de l'A350 ? Ou faudra-t-il patienter encore un peu avec l'arrivée des marchés de remplacement du 777-300ER ?

GUILLAUME FAURY- Le marché repart et tout le monde veut se placer. C'est le jeu de la concurrence. Il ne faut pas regarder sur des périodes courtes sous peine d'être tiré par une campagne ou l'autre. L'an dernier, de mémoire, il y a eu treize campagnes de vente de long-courriers, nous en avons gagné huit, mais pas celles où il y avait les plus gros volumes. Le début d'année n'est pas forcément représentatif. La campagne en Arabie Saoudite a fait basculer les choses. Cela a été très, très serré, mais il y a une dimension très politique qui est probablement venue brouiller un peu le jeu. Sur l'Inde, où il y avait une compétition très ouverte et très intéressante avec Air India, nous avons remporté le plus gros morceau. Le jeu est très serré et cela se joue une campagne après l'autre.

Le marché va continuer à être très compétitif avec de grandes campagnes en cours, mais il faudra juger sur douze mois pour voir ce qui s'est vraiment passé. Et l'A350 s'est établi comme l'avion de référence. Il démontre sa performance au quotidien et les compagnies aériennes nous en disent beaucoup de bien. Mais nos amis de Boeing ont un bon avion aussi.

Il ne sert donc à rien d'attendre frénétiquement des annonces d'Airbus sur le salon ?

Cela fait quatre ans que nous n'avons pas eu de salon du Bourget. Tout le monde va regarder les grandes commandes. Mais l'habitude de tout concentrer au moment des salons a été un peu perdue. Donc je ne suis pas sûr que nous ayons exactement la même dynamique qu'avant le Covid. Nous voyons quand même qu'il y a des grandes commandes qui se préparent et que les négociations s'accélèrent, se tendent dans les semaines et les jours qui précèdent le début du salon. Nous avons à nouveau cette adrénaline des commandes pour le salon.

Un mot sur l'A330 NEO qui semble un peu plus en difficulté ?

Au contraire, nous avons remonté les cadences pour l'A330 NEO et nous en livrons beaucoup cette année. L'avion marche bien sur le bas du segment avec l'A350 au-dessus, qui prend la part du lion en ce qui nous concerne. C'est un avion très important, qui fonctionne très bien, avec un dérivé militaire. C'est un produit de sortie de crise.

Vous avez mentionné les cadences, qui sont un enjeu majeur pour Airbus. Nous voyons que l'ensemble de la filière peine encore à accélérer la cadence. Nous sommes à la moitié de l'année : commence-t-on à entrevoir des améliorations ?

La grosse différence par rapport à l'année dernière, c'est que nous exécutons désormais le programme de production exactement comme nous l'avions prévu en début d'année. Je croise les doigts et je touche du bois pour que cela continue. En 2022, nous sommes allés de mauvaises surprises en mauvaises surprises, avec un exercice très dégradé par rapport aux hypothèses de début d'année. Airbus a livré 661 avions là où nous avions communiqué au marché le chiffre de 720. C'est 60 appareils de moins, et nous avions prévu d'aller un peu au-delà de cet objectif. C'est considérable. Désormais, nous sommes exactement sur notre trajectoire et je pense que cela va continuer au moins pour les mois qui viennent. La supply chain a arrêté de se dégrader et nous avons beaucoup moins de très mauvaises surprises qui arrivent du jour au lendemain. Nous avons énormément travaillé dans la profondeur de la supply chain, et nous sommes au chevet des fournisseurs qui sont le plus en difficulté. Globalement, la supply chain repart un petit peu, mais elle reste limitée, freinée par les quelques fournisseurs qui sont sur des plans de rattrapage très tendu que nous leur avons imposé pour ne pas ralentir tout le monde. Et ils n'arrivent pas à faire beaucoup mieux.

Cette crise de la chaîne des fournisseurs impacte le secteur depuis plus de deux ans maintenant et, même si la situation s'améliore, elle reste tendue. Alors que la demande de voyage explose, est-ce que cette difficulté à livrer des avions peut constituer une limite à la croissance du transport aérien dans les prochaines années ?

C'est la situation de la supply chain qui limite aujourd'hui le nombre d'avions que nous sommes capables de livrer. Nous essayons de régler notre ambition de montée en cadences en fonction de ce que la supply chain est capable de faire : nous regardons les goulots d'étranglement les plus difficiles pour comprendre jusqu'où nous pouvons tirer l'élastique sans qu'il casse. L'an prochain comme en 2025, le nombre d'avions que nous allons livrer sera conditionné par la supply chain. Entre-temps les compagnies aériennes ont besoin de beaucoup plus d'avions que ce que nous sommes capables de leur livrer. L'écart entre les besoins et l'offre va rester important, probablement pendant un nombre d'années significatif.

Concernant les carburants aériens durables, vous avez alerté l'Europe sur le fait qu'il fallait aller vite face à des Etats-Unis qui avancent à coup d'incitations. Quand on voit les difficultés pour adopter le règlement RefuelEU Aviation sur fond de dispute entre Allemagne et France sur le nucléaire, avez-vous le sentiment d'avoir été entendu ?

Entendu oui, et écouté aussi. Aujourd'hui, il n'y a plus beaucoup de doute en Europe sur le fait, et nous l'avons vu avec les annonces du Président Emmanuel Macron, qu'il y a deux axes principaux pour décarboner l'aviation d'ici à 2050 : la technologie et donc les avions, avec des annonces importantes sur le financement de la recherche à travers le CORAC (Conseil pour la recherche aéronautique civile) pour quatre ans, et le développement des SAF, les carburants durables pour l'aviation. Si nous le faisons correctement en termes de séquence de développement, d'entrée en service de nouveaux avions et de montée en puissance sur les SAF, nous allons atteindre la neutralité carbone en 2050.

Je pense que l'accélération des SAF est le paramètre le plus critique. J'accueille avec beaucoup d'enthousiasme ce que j'entends à Bruxelles, pas seulement les annonces publiques mais aussi les discussions avec les pétroliers, dont TotalEnergies. Cela donne une trajectoire cohérente pour atteindre 10 % de SAF en 2030, qui sera un point de passage important pour atteindre nos objectifs à 2050. C'est en train de se mettre en place et tout le monde comprend que c'est ça qu'il faut faire. Après cela va plus ou moins vite selon que nous soyons seuls, les Etats-Unis, ou s'il faut se mettre d'accord à 27. En Europe, certains peuvent avoir des raisons de se disputer pour des raisons d'énergie ou d'autres sujets, et c'est dommage que cela mette autant de temps. Mais la feuille de route va dans la bonne direction et avec le bon niveau d'ambition.

Les annonces faites ce vendredi par Emmanuel Macron ont été saluées unanimement, mais certains parlent déjà d'un trou dans la raquette en l'absence d'incitations à l'achat. Comment percevez-vous cette situation ?

Dès qu'on fait quelque chose de bien, la critique vient rapidement. D'abord, il faut reconnaître que cela va dans la bonne direction avec les technologies et les SAF, avec des partenariats public-privé. Les SAF, c'est aussi une façon de produire en France, là où nous achetons aujourd'hui du pétrole à l'étranger. Il y a un aspect souveraineté, de compétitivité du pays et de gestion de la balance commerciale.

Après, est-ce que c'est assez ? Oui, parce que ce point de passage à 10% semble se dessiner. Nous avons vu l'Europe annoncer dans le cadre de la taxonomie, un point de passage à 15% en 2030 alors que RefuelEU Aviation est à 6 %. Nous tournons donc autour de cette marque à 10%. C'est aussi ce que nous voyons aux États-Unis et au Moyen-Orient. Il y a deux mois, Airbus a signé un accord en Chine avec la société d'État qui distribue le carburant à tous les aéroports chinois, avec l'objectif d'aller aussi vers 10% en 2030. Ce marqueur est en train de prendre et il faut un level playing field (des conditions équitables, NDLR) dans ce domaine-là.

Si nous n'avons pas de compréhension commune de ce que nous voulons atteindre, les écarts de compétitivité liés à l'incorporation de SAF peuvent être un ralentisseur. Les conditions se mettent en place, un peu plus vite que ce je craignais il y a quelques mois, et j'accueille cela positivement. Mais on n'est pas encore arrivé au bout. Il reste encore beaucoup de choses à faire.

Vos annonces sur l'hydrogène ont accéléré le développement de cette filière dans l'aéronautique, vous avez clairement précisé que l'impact véritable se ferait après 2050, gardez-vous l'ambition d'un premier programme pour 2035 ?

Oui, bien sûr. Si nous prenons du recul, avec le kérosène on prend le carbone sous la surface de la terre, on le brûle dans une turbine et on rejette le carbone dans l'atmosphère. C'est ce que nous voulons éviter, car les émissions de l'aviation représentent 2,5 % des émissions de carbone mondiale. Avec les SAF, nous prenons le carbone dans l'atmosphère, de façon naturelle ou artificielle, avec les biocarburants ou les e-fuels dans le futur, mais cela demande beaucoup d'énergie pour à nouveau finir par rejeter le carbone dans l'air.

Ce schéma va un moment, mais avec l'augmentation rapide du carbone dans l'atmosphère et le réchauffement climatique, la pression va monter de plus en plus pour trouver des solutions sans émissions de carbone dans l'air. C'est une évolution naturelle.

D'autant plus que lorsque nous serons à l'heure des e-fuel - les biocarburants ne suffisant pas - nous aurons besoin d'une filière hydrogène vert pour les synthétiser. Et quand nous aurons cette filière, pourquoi ne pas consommer directement cet hydrogène vert. Nous n'avons aucun doute dans notre motivation à le faire. Et nous sommes convaincus que les technologies pour y arriver existent et nous sommes en train de les développer avec énormément de partenaires. Nous ne changeons pas notre objectif de mettre en service notre premier avion hydrogène en 2035.

Lors du Airbus Summit en fin d'année dernière, vous avez notamment présenté un projet de turbopropulseur alimenté par une pile à hydrogène. Est-ce que cela pourrait être la piste la plus probable qui se dégage pour 2035 ?

Il y a deux voies qui sont en concurrence et qui ont des avantages et des inconvénients très différents. La première, c'est de brûler de l'hydrogène dans une turbine, comme du kérosène. Ce sont des architectures pour le système de propulsion qui sont assez proches de ce que nous avons aujourd'hui. La seconde, c'est d'avoir un avion électrique avec une pile à combustible. Là, nous embarquons à bord une pile à combustible qui utilise de l'hydrogène pour produire de l'électricité. De toute façon, il faut le stocker de l'hydrogène liquide à bord dans les deux cas, avec toute la dimension cryogénique.

Airbus regarde ses deux solutions avec différents partenaires. Une turbine semble plus accessible à court terme, avec un certain nombre de facilités. L'autre a l'avantage de ne pas émettre de carbone, pas de Nox, pas d'imbrûlés et c'est la solution la plus optimale du point de vue de la propreté. Mais le rapport de puissance sur masse est beaucoup moins favorable que d'utiliser une turbine. Les solutions sont en cours d'évaluation. Nous n'avons pas prévu de prendre de décision cette année, ni même en 2024. Ce sera plutôt en 2025, mais à cette date il faudra que nous ayons pris des décisions pour valider une des deux technologies et être capable d'appuyer sur le bouton en 2027 ou 2028 pour lancer un programme.

Concernant le développement d'une nouvelle génération d'avions pour remplacer la famille A320, avez-vous des pistes technologiques qui s'affirment ?

Dans la feuille de route pour être décarboné en 2050, il faut remplacer les avions d'ancienne génération. Sur les 24.000 appareils qui volent, il y en a seulement 20 à 25 % d'avions modernes, qui consomment 20% de moins et qui sont certifiés pour incorporer jusqu'à 50% de SAF aujourd'hui. Comme ils consomment moins, on peut payer le carburant un peu plus cher. Pour aller plus loin, il faut faire entrer en service entre 2035 et 2040 une génération d'avions qui consommera entre 20 et 30% de moins que les avions les plus modernes actuels et sera capable d'utiliser 100% de SAF. Et après, nous aurons l'avion à hydrogène. Cette génération d'avions est très importante. C'est la génération clef, qui sera très largement en service en 2050, avec près de 100% de SAF, et qui fera cette décarbonation du trafic aérien.

Ces technologies sont en préparation en ce moment, sur les systèmes, sur l'allègement, sur les matériaux, sur l'aérodynamique... Nous travaillons sur des choses assez sophistiquées et excitantes sur la forme des ailes, leur déformation en vol, leur adaptabilité. Mais il y a aussi des travaux dans le domaine de la propulsion avec le RISE de CFM, un programme d'open rotor, lui aussi prévu pour 2035, qui viendra contribuer très largement à la réduction des émissions de carbone. Nous sommes en partenariat avec CFM pour tester ces solutions.

Toutes les briques sont en train de se mettre en place et le financement de la recherche en France à travers le CORAC est très important. Il vient structurer ces projets et aider les grands groupes à s'organiser, mais surtout assurer toute l'architecture de l'ensemble des sociétés qui participent ses grands projets, y compris les PME et ETI qui ont beaucoup de mal à financer leur recherche et à s'aligner sur les trajectoires des maîtres d'œuvre. Nous avons en France et en Europe les moyens pour garder le leadership sur la génération d'après.

Nous avons l'ambition en 2035-2040, quand nous ferons entrer en service cette nouvelle génération que nos amis américains préparent aussi, d'être bien placés et compétitifs. Nous voulons garder un coup d'avance car nous remettrons notre couronne en jeu à ce moment-là.

Dans l'activité défense, il se passe toujours quelque chose sur le SCAF (Système de combat aérien du futur). Les Belges veulent entrer dans ce programme européen tandis que le PDG de Dassault Aviation s'y oppose. Quelle est votre position ? Faut-il faire entrer de nouveaux pays, et donc de nouveaux industriels ?

Premièrement, c'est une très bonne nouvelle qu'il y ait des pays qui ont envie de rentrer dans le programme SCAF. Cela démontre l'attractivité de ce programme. Des pays - il n'y a pas que la Belgique - estiment vraiment que le SCAF est le système de combat aérien du futur et rejoindre notre équipe est important pour eux. Deuxièmement, il faut regarder d'où on vient. Nous sommes partis en franco-allemand, puis la France et l'Allemagne ont décidé d'associer l'Espagne au projet. On a alors vu que l'entrée des Espagnols dans le programme avait compliqué la redistribution de la charge de travail et nous avons eu des difficultés tout au long de l'année 2022 pour trouver un nouvel accord. Les trois partenaires ont fini par se mettre d'accord pour lancer la phase 1B. Il faut aujourd'hui exécuter cette phase telle qu'elle est aujourd'hui.  Il ne faut pas y toucher.

Et après ?

Quand on lancera véritablement le programme, il sera temps de voir le niveau d'ambitions qu'on se donne et les besoins de financement qu'il y aura. C'est aux pays partenaires du SCAF de déterminer s'ils sont capables de financer complètement ou partiellement le programme et s'ils souhaitent associer d'autres pays. Nous avons un bon exemple avec le F-35. Il faut reconnaître que ce programme a rencontré un grand succès commercial. En Europe, il y a plus de pays qui ont acheté le F-35 que la somme des pays qui ont acheté l'Eurofighter et le Rafale. C'est un échec européen de ce point de vue. Les Américains ont huit partenaires, il y a huit partenaires dans le F-35, sous un leadership américain très, très fort. Le SCAF - si c'est un succès et je pense que ça va être un succès - aura à un moment donné d'autres partenaires. Mais je pense qu'il faut faire chaque chose en son temps et aujourd'hui nous sommes dans la phase 1B.

Airbus n'a jamais commenté ou très peu l'accord que vous avez signé avec Dassault Aviation sur le fameux pilier 1 du SCAF. Beaucoup de choses ont été dites et écrites. Est-ce que cela reflétait vraiment la réalité de cet accord, selon vous ?

Je ne me suis pas beaucoup exprimé parce que je pense que c'était une position normale pendant cette période difficile. Nous avons souffert pour construire un programme de très grande envergure. Chacun a essayé de défendre ses positions, ses convictions, son rôle dans le programme. Nous sommes arrivés à un accord et maintenant nous le mettons en œuvre. Je trouve que notre attitude a été très logique et très normale même s'il y a eu beaucoup de choses qui ont été visibles de l'extérieur dans les négociations, notamment la nature transactionnelle de la définition du travail. Aujourd'hui, nous sommes au travail et le travail entre les ingénieurs se passe très, très bien.

Estimez-vous que la relation franco-allemande soit suffisamment solide pour lancer ce programme et qu'il soit une réussite ?

Je suis un franco-allemand convaincu. Il y a longtemps que je travaille chez Airbus. Je vois la puissance de feu que nous avons quand nous travaillons intelligemment ensemble et quand nous arrivons à prendre une dimension européenne sur des projets où l'effet d'échelle compte. Dans l'aviation commerciale, cela compte absolument. C'est identique pour le SCAF, qui est un système très complexe avec beaucoup de dimensions. Sur le SCAF, n'y a pas d'alternative européenne sérieuse et crédible sauf à se déclasser complètement et définitivement dans le domaine de l'aviation de combat. Donc force de nécessité fait loi. Ce programme va résister aux tensions franco-allemandes qui sont réelles. Il faut simplement reconnaître aujourd'hui que l'Allemagne traverse un certain nombre de chocs difficiles à encaisser depuis le 24 février 2022 et le conflit russo-ukrainien a entraîné beaucoup de conséquences stratégiques pour Berlin. C'est pour cela que cette situation rend difficile la relation de l'Allemagne avec ses partenaires, et en particulier avec la France sur des projets aussi importants que le SCAF. La relation franco-allemande est mise à l'épreuve. Mais il y aura des moments meilleurs dans cette relation, qui s'est construite sur des hauts et des bas. Je reste confiant. Et puis il y a des sujets qui fonctionnent à l'image notamment d'Airbus commercial, qui permet de se retrouver autour d'un bébé commun qui grandit correctement des deux côtés du Rhin. Cela vaut le coup de continuer à travailler ensemble.

Dans le domaine de la défense, Airbus a été un peu bousculé par la loi de programmation militaire (LPM) qui a remis en cause certains programmes européens emblématiques comme le Tigre Mark 3 ou encore l'A400M. Etes-vous déçu ? Avez-vous terminé les négociations sur la cible des A400M français avec le ministère des Armées ?

Il n'y a pas d'annulation de commande mais effectivement il y a une redéfinition des besoins. Il y a également la confirmation des grands programmes, y compris des programmes qui ont été lancés récemment comme le SCAF ou l'Eurodrone. Il y a quand même la confirmation de l'A400M même si effectivement la cible d'au moins 35 appareils (au lieu d'une cible de 50, ndlr) a été annoncée dans le cadre de la LPM. Nous devons ouvrir un certain nombre de négociations pour se mettre d'accord sur les plans de production. Nous sommes très aidés. Il y a également une volonté de beaucoup nous aider à l'export pour aller chercher une dimension de l'A400M à l'international. Et puis il y a la confirmation du programme Tigre. Les programmes européens importants sont maintenus et ceux du futur sont ancrés dans la LPM. C'est une LPM qui permet de se projeter sur un plus grand nombre de théâtres de conflictualités et d'investir sur le plan capacitaire dans un plus grand nombre de domaines.

Les budgets de défense augmentent partout dans le monde à une vitesse vertigineuse en dépit des contraintes budgétaires comme en France notamment. Est-ce qu'Airbus a un objectif de consolidation dans le secteur de la défense qui est un marché en pleine croissance ?

La défense est absolument stratégique et essentielle pour Airbus. Pour un très grand nombre de raisons, et en particulier parce qu'il s'y développe beaucoup de technologies qui après sont diffusées dans le domaine commercial. C'est bien de se rappeler que l'A320, qui est le plus grand succès de l'aviation commerciale de tous les temps, a dû son succès aussi, et en particulier parce qu'il a été le premier avion à avoir des commandes de volets électriques qui venaient du domaine militaire. On a des exemples comme l'A320 en grand nombre mais celui-ci est très symbolique. La défense doit avoir une dimension européenne et Airbus a déjà cette dimension européenne. C'est pour cela qu'un groupe comme Airbus qui a une responsabilité dans les grands programmes européens, souhaite y intervenir et contribuer à leur réussite. Si nous voulons être complètement européens, nous devrions continuer à nous regrouper. Cette consolidation peut prendre de nombreuses formes : des coopérations, des entreprises communes ou des sociétés de type MBDA, qui est un champion compétitif au niveau mondial. Il y a d'autres domaines où il faudrait arriver à avoir le même parcours.

Le SCAF peut-il être un déclencheur de la consolidation ?

Le SCAF, d'une certaine façon, se construit comme une coopération entre industriels. On verra la forme que cela prendra au moment où le programme avancera. Mais on n'a pas besoin de se marier, de faire de la fusion acquisition pour trouver des solutions pour fonctionner ensemble. Parfois d'autres modèles fonctionnent à l'image du programme NH90 par exemple qui regroupe au sein de la société NHIndustries (NHI) Airbus Helicopters et Leonardo. NHI marche très bien. Le NH90 est un énorme succès avec plus de 500 appareils vendus. On est absolument attaché à ce que les grands programmes où l'effet d'échelle joue un rôle, puissent se faire au niveau européen, c'est-à-dire avec plusieurs pays européens qui coopèrent entre eux. Et il y a de très nombreuses formes d'organisations. Il y aura sûrement dans les années qui viennent des rapprochements capitalistiques, mais on peut aussi faire beaucoup de choses par des programmes, des coopérations et des entreprises communes.

A propos de consolidation, n'avez-vous pas de regret sur l'opération Evidian avec Atos ?
Au-delà de cette opération, la question que nous nous posons est : où est-ce qu'on veut aller. Si Airbus a été un succès il y a 20 ou 30 ans, c'est en développant des plateformes, des ailes et des fuselages très performants. Aujourd'hui, nous concevons et fabriquons des systèmes. Nous sommes vraiment des systémiers. Et dans le futur, pour continuer à avoir de la réussite, il faudra aussi être dans le monde des données, des données sécurisées, des communications, de la gestion des données ainsi que de l'intelligence artificielle et du calcul intensif. Nous constatons qu'il y a des métiers qui aujourd'hui ne sont pas les nôtres et qui vont devenir essentiels. Pour rester compétitif dans ce nouveau monde, nous devons soit nouer des partenariats, soit les détenir. Il y a une société française qui s'appelle Atos, qui se sépare en deux parties. La partie Evidian a énormément d'atouts dans le domaine du digital et donc nous sommes en discussion avec eux pour des partenariats. Nous travaillons déjà beaucoup avec eux. Au-delà, il y avait une opportunité d'entrer dans le capital d'Evidian mais nous n'avons pas souhaité donner suite. Nous continuons à avoir la même stratégie dans le domaine des données, du digital, du cyber et du cloud. D'autant que nous avons également des capacités en interne pour le faire, notamment dans Airbus Protect que nous avons créé il y a un an en regroupant des activités internes Airbus pour se structurer et avoir une taille critique. Nous allons poursuivre dans cette direction.

Vous avez dit que vous étiez un Européen convaincu. Mais comment analysez-vous que la plupart des pays européens, au moment de la guerre en Ukraine, achètent des matériels militaires qui ne sont pas fabriqués par des groupes européens ?

La guerre en Ukraine exacerbe cette dimension. Nous sommes malheureusement extrêmement morcelés en Europe et les États n'ont pas les moyens de s'acheter toutes les capacités ou à les développer. C'est un constat qu'on fait régulièrement. Et puis les Européens aiment bien acheter aux Etats-Unis, qui sont eux autosuffisants. Donc nous sommes beaucoup plus faibles industriellement et technologiquement. Au moment où il y a eu cette crise en Ukraine, les Européens n'avaient pas forcément les matériels pour un tel conflit. Donc c'est assez logique que les pays européens aillent les chercher à l'extérieur de l'Europe. C'est à la fois très frustrant mais en même temps pas très surprenant à l'image des hélicoptères lourds pour lequel il n'y a pas d'équivalent en Europe. Nous n'avions pas de solution à proposer. La guerre en Ukraine nous fait, nous Européens, nous reposer beaucoup de questions sur qui on veut être, quel est le degré d'autonomie et de souveraineté qu'on veut avoir. Si à court terme, on constate un repli national pour savoir ce qui nous manque et où est-ce qu'on va le chercher. J'espère que sur les grandes décisions, les grands investissements et les grands programmes, les Européens se rappelleront au moment où il faudra décider de ce qui s'est passé avec l'Ukraine et seront beaucoup plus engagés sur le fait de faire ensemble et de faire en Europe. Et on saura leur rappeler...

Passons au spatial. Le domaine des lanceurs est un domaine où rien n'est jamais vraiment acquis. Cela été le cas avec le report de plusieurs semaines du dernier vol d'Ariane 5. Sur Ariane 6, avez-vous plus de certitudes sur la date du vol inaugural ?

Effectivement, le dernier vol d'Ariane 5 qui devait avoir lieu dans la nuit de vendredi à samedi a été reporté. Ce report montre une nouvelle fois que la technologie des lanceurs reste pointue et compliquée. En anglais, on dit : « It's not rocket science ». C'est vrai que l'Europe est confrontée aujourd'hui, entre le dernier lancement d'Ariane 5 et le premier vol d'Ariane 6, à une rupture d'offre. Initialement, elle devait être comblée par les lanceurs Soyuz et par Vega. Mais d'autres événements les concernant ont montré la vulnérabilité de l'Europe en matière d'accès à l'espace. Donc toute la pression est maintenant reportée sur Ariane 6. On constate également que la mise au point d'autres lanceurs concurrents est compliquée. Donc le premier vol d'Ariane 6 est important mais il faut qu'il se fasse dans de bonnes conditions. Il est prévu en fin d'année mais il y a encore des essais à effectuer cet été. Les résultats de ces essais seront décisifs pour déterminer la date du vol inaugural d'Ariane 6. L'échec dans ce métier, je le répète, peut survenir.

Vous avez demandé en début d'année un changement de gouvernance dans le domaine des lanceurs. Six mois plus tard, avez-vous la conviction d'avoir été entendu par l'Agence spatiale européenne (ESA) sur cette problématique ?

La gouvernance européenne des lanceurs est organisée autour de l'ESA, qui a mis en place le principe du retour géographique. Ce dispositif impose un certain nombre de contraintes. Et c'est vrai qu'il met beaucoup de contraintes sur des développements, qui sont déjà eux-mêmes très contraints. Cela se traduit par un manque de degré de liberté et de capacité d'entreprendre que d'autres compétiteurs ont. Et au final nous ne sommes pas aussi compétitifs que nous pourrions l'être. Il y a donc des réflexions sur la gouvernance. En matière de gouvernance, tout n'a pas été encore fait par rapport à ce qu'il faut qu'on arrive à faire. Cette situation de crise dans les lanceurs en Europe et cette rupture de l'offre posent beaucoup de questions. Nous allons essayer de ne pas gâcher cette crise et faire les bonnes remises en cause nécessaires pour la suite. Toutefois, pour Ariane 6, il faut continuer et finir avec le dispositif actuel.

Quelles sont les pistes de réflexion que vous souhaiteriez que l'ESA lance ?

C'est l'Europe et les pays européens qui doivent aller, dans la façon dont ils collaborent entre eux, vers un modèle de maîtrise d'ouvrage et de financements de la puissance publique et des Etats. Ils doivent également vers un modèle d'exécution plus entrepreneurial, avec des maîtres d'œuvre qui ont toute la liberté de manœuvre pour choisir leurs fournisseurs, c'est-à-dire choisir ceux qui sont compétitifs. Or, je le répète, il y a trop de contraintes dans le spatial : il y a aujourd'hui très, très peu de liberté pour les maîtres d'œuvre mais aussi des rentes de situation pour d'autres entreprises. Au final, tout cela génère un manque de flexibilité par rapport aux enjeux de vitesse et de compétitivité constatés aujourd'hui. Il faut remettre en cause ce modèle.

Dans le domaine de l'exploration spatiale, l'Europe est une puissance de second plan par rapport aux Etats-Unis et à la Chine. Comment un groupe puissant comme Airbus peut-il convaincre les Etats européens de se lancer dans une aventure cruciale pour la souveraineté de l'Europe sur le long terme ?

C'est sûr que la conquête spatiale habitée est une nouvelle frontière. C'est également la découverte d'un espace relativement vierge aujourd'hui et où on constate que les Etats-Unis et pas seulement les Etats-Unis, investissent très, très fortement. Il ne faut pas que l'Europe soit, à nouveau, en suiveur dans ce domaine. C'est pourtant ce qui se dessine pour le moment. Il faudra qu'à un moment donné il y ait une volonté en Europe d'investir dans cette aventure, peut être titillée par les premières réussites américaines. On partira probablement après les autres. Pour le moment, Airbus accompagne l'aventure spatiale américaine. Nous avons à bord des véhicules habités américains un certain nombre de systèmes et d'équipements. Nous avons les technologies, et, dans de nombreux cas, nous sommes même meilleurs en technologie. Mais il n'y a pas ce regroupement européen qui donnerait l'échelle pour le lancer. Et surtout il n'y pas la volonté pour le faire. Il faut qu'il y ait un appétit et je pense que cela peut venir. Nous devrons avant tout reprendre confiance en Europe sur le spatial, avec notamment Ariane 6 qui vole. On est dans une période où on doute de nous parce que SpaceX a beaucoup de succès. Une fois qu'Ariane 6 sera en vol commercial, il y aura des éléments solides pour refédérer et repartir de l'avant.

Mais avez-vous l'impression qu'il y ait une vraie volonté politique européenne en termes de souveraineté dans le domaine de l'exploration spatiale ?

Dans l'exploration spatiale, non. Il n'y a pas de volonté aujourd'hui, il va falloir attendre qu'elle arrive. Il faut retrouver cette confiance en nous dans le spatial qu'Ariane 6 va nous redonner. Même si l'exploration spatiale représente des investissements financiers importants, il faut une vraie vision en Europe. C'est important pour l'Europe de faire partie de cette formidable aventure.

Dans le domaine de l'observation de la Terre où Airbus est très présent, l'échec de Vega C qui a occasionné la perte de deux de vos satellites Pléiades Neo que vous aviez autofinancés, a été un coup très rude. Quelle est aujourd'hui votre stratégie, votre feuille de route ?

En dépit de la perte de ces deux satellites, nous avons actuellement deux autres satellites d'observation Pléiades Neo, qui tournent autour de la Terre. Des satellites d'observation qui sont vraiment le mieux de ce qui se fait aujourd'hui et qui nous permettent de vendre des images et des services. Les deux satellites perdus en décembre dernier devaient venir compléter cette constellation étaient très importants. Ils nous manquent énormément. L'échec de Vega C est vraiment très dommageable pour Airbus. Aujourd'hui nous sommes en train de nous reconfigurer : nous avons d'ores et déjà une utilisation très importante des deux satellites en orbite et nous avons plusieurs options à l'étude pour compléter cette constellation. Nous avons des projets en cours de définition avec certains clients, mais je ne peux pas en parler plus ouvertement. En revanche, je peux vous confirmer que nous allons continuer ce projet auquel nous sommes très, très attachés.

A quelle échéance allez-vous décider ?

La stratégie est claire : nous allons continuer à rajouter d'autres satellites pour cette constellation. Nous voulons pouvoir continuer à offrir ses services de très haute qualité, avec un taux de revisite important et une très grande précision dans l'observation.

Quelle est votre analyse de la loi de programmation militaire (LPM) dans le domaine spatial avec la perte pour Airbus du satellite Syracuse 4C ? Est-ce que la France manque d'ambition dans le spatial même si la LPM va investir 6 milliards d'euros sur une période de sept ans ?

Non, la France ne manque pas d'ambition dans le spatial militaire. Elle a des domaines d'expertise très forts. Nous avons été satisfaits des annonces faites par le ministre après la LPM sur la constellation européenne Iris². Il faut reconnaître que la LPM est un gros effort à un moment où la France sort de la crise du Covid-19 où beaucoup d'argent public a été dépensé pour traverser sans trop de dommage cette pandémie. En outre, les besoins capacitaires militaires sont de plus en plus nombreux : il faut apporter des solutions dans le domaine cyber, dans le spatial militaire, préparer le renouvellement de la dissuasion. L'Etat met de l'argent pour être capable d'avoir des programmes, des équipements, des capacités dans l'ensemble de ces domaines. La LPM est un exercice d'équilibre assez complexe qui me paraît raisonnablement réussi, si ce n'est très réussi compte tenu du contexte actuel.

La constellation européenne Iris² va-t-elle une plus-value à l'Europe ?

Cette constellation est essentielle. Elle est essentielle pour des raisons de souveraineté, de sûreté, de sécurité, de capacité et aussi de résilience pour l'Europe. C'est un projet majeur, dont on voit complètement l'utilité, qui est en train de se lancer avec des budgets et une vision. Airbus participe légitimement au consortium mis en place par les industriels. Un consortium important qui vient apporter des solutions les plus compétitives pour faire réussir cette constellation. C'est un des plus grands projets spatiaux européens à l'image de celui de Galileo, qui est fondamental pour nos capacités européennes de souveraineté. Là aussi, c'est une capacité souveraine dans un domaine qui est absolument essentiel pour la résilience, la sûreté et la sécurité de l'Europe.

Quel est votre regard sur le NewSpace et comment faut-il intégrer les startups dans l'écosystème spatial européen ?

Le NewSpace est une réalité sur les startups, les technologies, les business model qui se créent. Mais il ne faut pas croire que le NewSpace ne concerne que les startups. Il y a aussi beaucoup d'innovations y compris dans les grands groupes, en matière de disruption, de miniaturisation et d'accès à l'espace qui sera beaucoup moins cher. Comment on les intègre ? Par des projets. Une startup qui a une bonne idée n'a pas pour autant l'accès au capital, ni la surface d'ingénieurs pour ambitionner des projets très importants. Il faut trouver les projets que seuls des grands groupes peuvent porter dans le domaine spatial pour fédérer ces acteurs. Des projets comme Iris² sont des opportunités pour aller chercher des solutions dans les startups. Les grands groupes et les startups y trouvent leur compte. Il y a énormément de rencontres, d'échanges. L'intégration des startups dans l'écosystème est en train de se réaliser en ce moment.

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Commentaires 9
à écrit le 19/06/2023 à 19:53
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Ce Monsieur est atteint du principe de Peter pour prononcer une telle ânerie.

à écrit le 19/06/2023 à 18:10
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La stratégie de l'industrie aéronautique qui consiste à reporter son impact sur le climat sur l'industrie naissante de l'hydrogène est bien rodée, et n'est possible que parce que la plupart des journaux ne sont pas renseignés sur le coût écologique d...

à écrit le 19/06/2023 à 9:59
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et si on mettait fin progressivement aux exemptions de taxe sur le kerosene ? cette convention date de l apres guerre et avait pour but de developper le transport aerien. cette subvention est totalement anachronique. l aero se demene pour faire cro...

à écrit le 18/06/2023 à 19:42
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Et rebelote, pour éclairer cette foutaise du pseudo réchauffemernt climatique anthropique après fake covide destiné à planter les économies et accessoirement mesurer le degré de soumission des populations occidentales à la pensée ...

le 18/06/2023 à 22:42
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Vous devez étre un parigo enfermé dans son bureau climatisé toute la journée …et qui va à la plage en Normandie ou Bretagne le wk pour ne pas voir le changement des essences des insectes des animaux…parce que le changement climatique est bien là : en...

le 19/06/2023 à 9:18
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@Gedeon. Toute la pensée d'Asselineau. !!!

le 19/06/2023 à 20:58
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@@les deux Gédéon Les voitures balais, mercenaires du point Godwin ont encore sévi!..

à écrit le 18/06/2023 à 18:34
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Mais non, il ne va rien atteindre du tout

le 19/06/2023 à 3:20
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Un micronniste pur beurre, plein de certitudes. Ailleurs on continue a bruler du chsrbon comme avant, les frontieres ne protegent en rien, les vents vous apportent la pollution du au lignite made in germany. A votre sante.

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