Réforme du marché de l'électricité : les régulateurs appellent à une concurrence « équitable » entre EDF et les autres fournisseurs

Le nouveau modèle de régulation du marché de l'électricité sera instauré au 1er janvier 2026, mais il se prépare déjà. Et pour préserver « des conditions de concurrence équitables entre EDF et ses concurrents » dans sa mise en œuvre, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et l'Autorité de la concurrence (ADLC) demandent au gouvernement des « garde-fous ».
Le nouveau modèle de régulation des prix de l'électricité nucléaire vise à mieux protéger les Français des effets de volatilité des prix de l'électricité, selon le gouvernement.
Le nouveau modèle de régulation des prix de l'électricité nucléaire vise à mieux protéger les Français des effets de volatilité des prix de l'électricité, selon le gouvernement. (Crédits : Reuters)

L'accord sur les prix de l'électricité trouvé en novembre entre l'État et EDF - après des mois de négociations tendues - a soulevé quelques interrogations au sein de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et de l'Autorité de la concurrence (ADLC). Pour rappel, il pose les bases de la prochaine régulation de l'électricité nucléaire d'EDF, qui prendra le relais du modèle actuel de l'Arenh (pour « accès régulé à l'électricité nucléaire historique ») à compter du 1er janvier 2026.

Concrètement, cette réforme, qui doit encore être actée au Parlement dans le projet de loi « Souveraineté énergétique », vise à mieux protéger les Français des effets de volatilité des prix de l'électricité, selon le gouvernement. Contrairement à l'ancien système qui leur garantissait un accès à l'électricité du parc nucléaire d'EDF à prix cassé, la réforme consacre la dérégulation des ventes d'électricité issue du nucléaire. En parallèle, le gouvernement prévoit un mécanisme de redistribution au bénéfice du consommateur : EDF lui reversera a posteriori des revenus excédentaires issus de son parc nucléaire, en cas de prix élevés sur les marchés de gros.

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Dans ce contexte, les deux autorités indépendantes ont adressé un courrier à l'État le 20 décembre dernier, qu'elles ont rendu public ce mardi 16 janvier. Objectif de cette missive : « S'assurer que les modalités de la réforme du marché de l'électricité créent d'emblée des conditions de concurrence équitables entre EDF et ses concurrents afin d'optimiser les conséquences pour les consommateurs », selon leur communiqué.

Le poids d'EDF pose question

Les deux organismes posent notamment la question du poids d'EDF dans ce nouveau modèle. Dans leur courrier au gouvernement, la CRE et l'ADLC soulignent en effet des risques quant au respect des règles concurrentielles entre EDF, à la fois unique exploitant nucléaire et fournisseur historique d'électricité, et ses concurrents, les fournisseurs alternatifs.

« L'existence d'un marché français de la production et de la vente en gros (d'électricité) sans régulation » en amont, « couplée à la présence d'un acteur intégré (EDF), en position forte et durable (...) nécessite, selon nos deux autorités, la mise en place de garde-fous », soulignent les gendarmes de l'énergie et de la concurrence dans leur lettre au gouvernement.

Engie, le 2e fournisseur d'électricité en France, avait réclamé lors de la consultation menée sur cette réforme, que les activités de production et de vente d'EDF soient « strictement séparées » afin que soit garanti « un fonctionnement transparent et équitable » de ce marché.

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Série de propositions

La CRE et l'ADLC ont dès lors ponctué leur courrier de propositions « pour garantir le bon fonctionnement du marché de l'électricité au bénéfice des entreprises et des ménages ». Par exemple, pour les deux autorités, la CRE « devrait aussi être en mesure de définir la temporalité de la publication par EDF de ses estimations de production de son parc nucléaire ». Objectif : « s'assurer que les entités internes d'EDF en charge de la commercialisation ne disposent pas d'informations non publiques sur les estimations de production et de revenus du parc nucléaire ».

Autre proposition mise en avant : que la CRE puisse « mettre en place des mesures ex ante favorisant la liquidité du marché de gros de l'électricité, de façon proportionnée et après consultation des acteurs ». Et ce dans le but de s'assurer du développement d'un véritable segment de long terme sur ce marché et ainsi encourager les offres de fourniture d'une durée supérieure à deux ans.

Autant de mesures qui figurent dans le projet de loi « en cours de consultation ».

Pas plus de 10% d'augmentation des prix au 1er février

Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a laissé entendre ce lundi qu'il n'y aurait pas de gel du tarif réglementé de l'électricité (TRVE) comme demandé notamment par l'association de consommateurs UFC Que Choisir. Autrement dit, il devrait continuer d'augmenter et peser davantage sur le portefeuille des ménages. Le tarif réglementé de l'électricité, dont bénéficient la majorité des foyers, est revu deux fois par an, le 1er février et le 1er août. Il a déjà été rehaussé de 4% en février 2022, puis de 15% et 10% en février et août 2023.

Une augmentation est d'ores et déjà prévue pour le prochain 1er février. Mais l'inconnue reste sur son niveau. Le ministre de l'Économie a néanmoins réaffirmé qu'elle ne dépasserait pas 10% par rapport au niveau d'août de l'année dernière. « Nous allons discuter avec le Premier ministre et le président de la République du chiffre définitif qui sera retenu, mais je répète ce que j'ai toujours dit, c'est que je tiens parole : il n'y aura pas d'augmentation du prix de l'électricité de plus de 10% dans les jours qui viennent », a déclaré le ministre de l'Economie lors d'un déplacement à la centrale nucléaire de Gravelines (Nord). D'autres hausses devraient ensuite suivre, au moins jusqu'en 2026.

(Avec AFP)

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Commentaires 8
à écrit le 17/01/2024 à 10:23
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L'énergie n'est pas une industrie comme les autres. Elle nécessite une intensité capitalistique (mise de fond de départ) gigantesque en comparaison des autres industries. Elle ne partage cette caractéristique qu'avec le ferroviaire. Cette obsession ...

à écrit le 17/01/2024 à 9:19
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On n'en veut pas de cette pseudo concurrence. De quelle concurrence parle-t-on ? Ces "fournisseurs" ne produisent rien, ne maintienne pas le réseau, n'investisse pas dans les moyens de production. Ils ne sont juste qu'un intermédiaire (qui doit se ré...

à écrit le 17/01/2024 à 2:22
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Ces bureaucraties crées par les lois de déréglementation tente de préserver leur fond de commerce. On pourrait aussi évaluer la valeur du service rendu aux usagers. Parce qu’assurer le bien être économique de concurrents incapables de produire leur...

à écrit le 17/01/2024 à 0:21
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C est la fausse concurrence imposée par l europe qui a ruiné EDF , ces oligarques ne comprennent jamais?

à écrit le 16/01/2024 à 21:10
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L'erreur, ce sont les fournisseurs alternatifs qui ne produisent quasiment aucun courant alternatifs en vivant aux crochets d'EDF. J'ai en mémoire certains discours de Beigbeder le PDG de POWEO...navrant!

le 17/01/2024 à 12:40
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Exact : Est-ce le début d'une troisième vie pour Charles Beigbeder ? Ce «serial» entrepreneur, après avoir fait ses armes comme banquier d'affaires, s'était taillé un joli succès avec le lancement puis la vente de la société de courtage en ligne S...

à écrit le 16/01/2024 à 18:38
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Simple : Les "fournisseurs" commencent à investir de produire des vrais électrons et arrêtent de n’être des intermédiaires qui prennent une marge sans effort sur le dos de EDF (suppression de l'ARENH). Etant uniquement des parasites servant le dogm...

le 16/01/2024 à 22:11
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Hamlin, je pense que vous avez tout dit...Entièrement raison.. Je qualifierai même ces "fournisseurs" du nom commun de "ténia" ou comment vivre aux crochets d'un autre organisme sans rien faire et le plumer...par le biais des instances européennes..

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