35.000 entrepreneurs municipaux face aux nouveaux défis du « local »

OPINION. La tâche des maires, passionnante car recouvrant le formidable métier d'entrepreneur public, n'est pas simple. En matière d'habitat, par exemple, il s'agit, pour répondre à la demande de la population, d'améliorer la qualité et souvent le volume de l'offre de logements, tout en maintenant un niveau de loyers et de prix adaptés à la réalité du pouvoir d'achat. Dans le champ de l'économie résidentielle, quel peut être l'apport d'un acteur national comme CDC Habitat ? Par André Yché, président du directoire de CDC Habitat.
Bien qu’ardue, la tâche des 35 000 maires de France, qui n’est pas sans lien avec celle d’entrepreneur public, n’en est pas moins passionnante.
Bien qu’ardue, la tâche des 35 000 maires de France, qui n’est pas sans lien avec celle d’entrepreneur public, n’en est pas moins passionnante. (Crédits : Damien Meyer/Pool/AFP)

Qui sont ces chefs d'entreprise, choisis par leurs clients, à la tête de groupes, de filiales opérant dans l'habitat, l'alimentation collective, les services sociaux, l'accompagnement vers la formation et l'emploi, la culture et le tourisme, parfois la mobilité collective et le stationnement, les services de voirie et les équipements de santé ? Il s'agit des 35.000 maires, descendants des échevins du XIIe siècle, magistrats très modestement rémunérés qui, pour des mandats de six ans et sans garanties statutaires de carrière telles qu'elles régissent les fonctionnaires publics, sont corvéables à merci, tous les jours de l'année. Car s'ils ne dirigent pas personnellement leurs « quasi-filiales », c'est bien vers eux que se tournent, d'abord, les administrés mécontents, toujours conscients de leurs droits mais pas toujours de leurs devoirs.

Lire aussi : Le maire, star de la confiance dans un océan de défiance politique

Et leur tâche, passionnante car recouvrant le formidable métier d'entrepreneur public, n'est pas simple. Passons sous silence la contrainte budgétaire, massive et parfois insurmontable, hormis dans l'acceptation de douloureux renoncements. En matière d'habitat, par exemple, il s'agit, pour répondre à la demande de la population, d'améliorer la qualité et souvent le volume de l'offre de logements, tout en maintenant un niveau de loyers et de prix adaptés à la réalité du pouvoir d'achat.

Compagnonnage

Il faut concevoir un urbanisme économe en termes d'étalement urbain, sans pratiquer une densification excessive. Il faut accueillir les plus fragiles, tout en préservant, voire en restaurant la mixité du peuplement. Réhabiliter le parc public, tout en favorisant la rénovation du parc privé : copropriétés dégradées, îlots vétustes en centre-ville... Et tout cela sans alourdir la pression fiscale.

Alors, système d'équations sans solution, aucune chance de réussir ? Non, car « where is the will, there is a way » et chacune de ces contraintes est porteuse d'opportunités, sous une condition, impérative : éviter l'isolement, travailler en réseau avec de multiples partenaires, bien connus et fidèles. Car, en matière d'action locale, la concurrence pure et parfaite ne fait pas tout, ce qui compte d'abord, c'est la confiance, dans la durée : il ne s'agit pas de « réussir un coup » et de partir pour le reproduire ailleurs, mais de s'inscrire, dans un compagnonnage stable et permanent, de bien comprendre les besoins, la stratégie... Bref, comme dirait le renard du Petit Prince, de s'apprivoiser réciproquement.

Levain d'innovation

Alors, dans le champ de l'économie résidentielle, dont le principe consiste dans la proximité, c'est-à-dire l'assimilation de l'identité locale, quel peut être le rôle, l'apport d'un acteur national comme CDC Habitat, sous l'égide de la jeune Banque des territoires, au sein de la bicentenaire Caisse des dépôts ? Dans notre activité, territorialisée par nature, notre existence ne se justifie qu'à partir de trois axes d'effort. D'abord, nous devons être un levain d'innovation permanente, le « sel de la terre », car il nous revient d'en accepter les risques : innovation dans l'offre de produits, dans le financement, dans les montages, dans la gestion sur mesure... mais aussi dans les services sociaux et dans la participation inclusive de nos collaborateurs et de nos clients.

Ensuite, nous devons assumer les chantiers qui nous échoient naturellement : le redressement des copropriétés dégradées, la reconversion des territoires miniers, comme le bassin de Lorraine, depuis quinze ans. Enfin, la consolidation de notre secteur d'activité : les HLM, les associations... Et ce, autour de quelques principes : il s'agit de renforcer les opérateurs en confortant leurs identités, non pas de fusionner, ni d'amputer ; de garantir l'autonomie de partenaires, non d'assujettir des vassaux ; d'accompagner des amis, et non de s'approprier leurs dépouilles !

Mutualiser des moyens nouveaux

Et à cette fin, une réalité : les regroupements, les adossements, les fameuses « sociétés de coordination » ne doivent pas consister à mettre en commun des problèmes, mais à mutualiser des moyens nouveaux. Ceux-ci ne peuvent se résumer à des combinaisons à somme constante, ils doivent comporter des ressources supplémentaires : financières, mais aussi opérationnelles, des outils de portage de logements intermédiaires, d'immobilier à rénover en « cœur de villes », de démembrements à travers des organismes fonciers solidaires. Notre seule raison d'être est de transformer de multiples impasses en autant de voies d'avenir. Pour aider 35.000 entrepreneurs municipaux, du moins tous ceux qui le souhaitent, à réussir leur pari !

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Commentaire 1
à écrit le 19/11/2019 à 8:48
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Rôle d'autant plus crucial que nos dirigeants politiques nationaux ont été privatisés ne répondant à la volonté que de quelques uns, c'est à eux du coup de pallier également à cette absence de démocratie alors qu'on leur enlève toujours plus de droit...

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