
Dernière ligne droite. Prévue dans le cadre de la loi de finances 2020 et effective depuis le 1er janvier 2023, la déclaration de biens immobiliers touche à sa fin. L'échéance est, en effet, fixée au vendredi 30 juin, pour tous les propriétaires. Si les contribuables ont disposé d'un délai relativement long pour répondre à cette obligation, force est de constater que les personnes concernées ne s'y sont pas toutes attelées. Au début du mois de juin, plusieurs sources au sein de l'administration fiscale interrogées par La Tribune, particulièrement sceptiques sur la réussite de la campagne, ont évoqué le chiffre « 40% de déclarants » seulement.
« On est maintenant autour de 50% [de déclarants] », a indiqué Jérôme Fournel, lors d'une conférence de presse de présentation du rapport annuel de la DGFIP, ce jeudi 22 juin. Sans pour autant avancer d'objectifs chiffrés à l'issue de la campagne, le directeur général des Finances publiques s'est montré très optimiste.
« Nous avons encore de très gros acteurs, notamment des HLM, pour lesquels le process est différent, explique-t-il. Globalement, ils sont en train de déclarer, ce qui devrait permettre de faire entrer plusieurs millions de logements du fait de ces gros acteurs privés et publics. »
Le formulaire papier, écarté pour des raisons techniques
Bugs informatiques, manque de lisibilité des informations pré-remplies, cas particuliers... Particuliers, professionnels et agents des finances publiques ont mis en exergue dans nos colonnes des difficultés persistantes dans la réalisation de la déclaration de biens immobiliers. Le patron de l'administration fiscale reconnaît que l'absence de formulaire papier a pu accentuer les soucis de compréhension.
« Nous y avons pensé, mais cela s'est révélé très compliqué à mettre en place », a affirmé Jérôme Fournel, faisant référence à la difficulté d'établir la consistance des biens immobiliers (surface, nombre de pièces, annexes, etc.). Il renvoie ainsi les contribuables vers les agents des finances publiques, joignables par téléphone ou au sein de structures d'accueil (centres des impôts, maisons France Services...).
Des agents des finances publiques très sollicités
Or, les fonctionnaires constatent déjà un afflux de demandes, par téléphone, par email et au guichet, comme en témoigne cette récente publication de la section du Nord-Pas-de-Calais du syndicat Solidaires Finances publiques, première organisation syndicale à la DGFIP, photos à l'appui. Le nombre de e-contacts (sollicitations via la messagerie sécurisée) a parfois été multiplié par quatre, cinq, six... voire soixante dans certains départements.
« Comme toute obligation déclarative, il ne faut pas se le cacher, cela engendre des interrogations », a admis le directeur général des Finances publiques. Résultat, au global, le taux de sollicitation a grimpé de 20% par rapport à l'année passée, a confirmé Jérôme Fournel, ce jeudi, corroborant les propos recueillis par La Tribune auprès d'organisations syndicales ces dernières semaines.
« Nous sommes attentifs à cette première année de déclaration de biens immobiliers : elle constitue une année d'initialisation, dans la mesure où nous sommes en train de réinitialiser la base et le fichier de fonctionnement pour pouvoir taxer correctement les résidences secondaires et les logements vacants », a rappelé le patron de l'administration fiscale.
Un effort conséquent, juste pour cette année ?
Pour rappel, la taxe d'habitation a été définitivement supprimée en 2023 sur les résidences principales pour tous les contribuables, quel que soit leur niveau de revenus. En revanche, les détenteurs d'une résidence secondaire, eux, restent redevables de la taxe d'habitation, voire de la taxe sur les logements vacants. La déclaration de biens immobiliers permet ainsi d'asseoir les impôts locaux encore existants, et de recouper les informations déjà en sa possession.
« C'est une fois par siècle, a projeté le directeur général des Finances publiques. Je dirai que l'on fait un effort conséquent cette année, un peu lourd collectivement et on le voit, y compris à l'intérieur de la maison, mais une fois qu'on l'aura fait, il suffira d'actualiser chaque année. »
Suffisant pour faire passer la pilule aux fonctionnaires des finances publiques et à leurs représentants ? Pas sûr. Les syndicats brandissent régulièrement l'impact de suppressions d'effectifs dans certains services, comme source d'un accroissement déjà considérable du travail des agents.
5.000 recrutements en 2022
« Depuis la fusion entre la DGI (direction générale des impôts) et DGCP (direction générale de la comptabilité publique), (actée en 2008, ndlr) nous avons perdu entre 18.000 et 20.000 emplois, nous expliquait Régis Bourillot de CFTC Finances Publiques, au début du mois de juin. Pour autant on continue à laisser croire que tout va bien, que nous connaîtrons même des années de moindres diminutions d'effectifs (2024 et 2025) et qu'il faudrait s'en réjouir ».
« Sur les effectifs, il y a une feuille de route arrêtée à l'été dernier, a répondu Jérôme Fournel. Les arbitrages traduisent une inflexion forte des suppressions d'emplois : on passe à un rythme de 800 suppressions par an à 850 en 2023, 450 en 2024, aucune en 2025, et 850 en 2026 et 2027. »
Le directeur général des Finances publiques a défendu une stratégie consistant à « réinvestir massivement » sur la data, les systèmes d'information, les assistants digitaux et l'intelligence artificielle, notamment. En 2022, 5.000 agents ont été recrutés, dont près de 1.000 contractuels, fait valoir l'administration fiscale dans son rapport annuel.