Le secteur immobilier grimace. Les prix de l'ancien ont encore reculé au deuxième trimestre par rapport au précédent, de 0,8%, selon l'indice Notaires-Insee, qui fait référence, publié ce jeudi 7 septembre. Un phénomène déjà observé au premier trimestre par rapport au dernier de 2022. Les prix avaient alors reculé de 0,3% (donnée révisée à la baisse de 0,1 point par rapport à celles publiées en mai), ce qui n'était pas arrivé depuis juin 2015. Sur un an, les prix ont nettement décéléré entre avril et juin. Ils ont ainsi augmenté de seulement 0,5 %, après +2,7 % au premier trimestre 2023 et +4,6 % au quatrième trimestre 2022.
« Les années folles sont terminées. On va passer à un autre paradigme de l'immobilier », a prévenu d'emblée Elodie Frémont, présidente de la commission statistiques immobilières des Notaires du Grand Paris.
Forte baisse des prix en Ile-de-France
Dans le détail, la hausse - sur un an - a été uniquement portée par les maisons, dont le prix a progressé de 0,9%, tandis que celui des appartements n'a pas bougé. En Ile-de-France, région la plus tendue, les prix baissent désormais rapidement, avec un recul de 3,1% sur un an. Cette baisse est portée par l'accentuation du recul des prix des appartements (‑3,7% sur un an au deuxième trimestre 2023, après -1,3% lors du précédent). Elle est davantage marquée pour Paris (-4,4%) que pour la Petite Couronne (-3,8%) et la Grande Couronne (-1,7%). La baisse s'explique également par le repli inédit des prix des maisons (‑1,9 %), qui diminuent sur un an pour la première fois depuis le premier trimestre 2016.
Dans le reste de la France par contre, les prix ont continué d'augmenter (+1,8%), à un rythme toutefois moindre par rapport au premier trimestre (+3,9%). Les prix des appartements en régions (+2,7 % sur un an au deuxième trimestre 2023) ont augmenté plus fortement que ceux des maisons (+1,3 %), pour le deuxième trimestre consécutif.
Les ventes toujours en recul
Le nombre de transactions, indicateur de l'activité du marché et qui avait atteint un record absolu en 2021, continue de refluer rapidement. Pour l'ensemble de la France (hors Mayotte), il est estimé à 1.002.000, après 1.071.000 fin mars 2023. Un chiffre toujours supérieur à la moyenne historique, relève toutefois l'institut de la statistique.
Les causes sont multiples, mais la principale est la flambée des taux d'intérêt, qui ont renchéri le coût des crédits, selon Élodie Frémont. Ces derniers augmentent sous l'effet de taux d'intérêt en forte remontée, résultat direct de la politique de resserrement monétaire mis en place par la Banque centrale européenne pour freiner l'inflation.
« Désormais, il faut épargner, ou en tout cas faire des apports conséquents, pour que le dossier de crédit puisse même être instruit, on ne parle même pas de son succès à la sortie », a-t-elle observé.
« C'est la revanche du cash », pour ceux qui ont les moyens, a-t-elle ajouté, notant « un petit rebond des prêts familiaux, des prêts amicaux, et une grande aide de papa-maman grâce à des dons. » L'inflation, qui entame le reste à vivre des ménages, pousse aussi les prix à la baisse, en particulier pour les maisons, a noté Elodie Frémont.
« Quand vous avez une maison, vous avez besoin d'un véhicule, donc ça se ressent sur le prix de l'essence, ça se ressent sur la consommation énergétique et ça se ressent en cas de vente avec les normes énergétiques qui contraignent désormais, quand vous êtes mal noté, à faire de la rénovation et (...) un audit énergétique », explique-t-elle.
Les conditions d'accès au crédit trop restrictives ?
Une baisse générale des prix, déjà observée par les réseaux d'agences, ne devrait pas tarder à arriver. « Sans aucun doute, la baisse va s'accélérer », juge ainsi Thomas Lefebvre, directeur scientifique de Meilleurs Agents. « L'achat devient de moins en moins intéressant financièrement, parce que pour rentabiliser son achat, il faut attendre de plus en plus longtemps », remarque-t-il.
Guillaume Martinaud, président du réseau d'agences Orpi, pointe aussi du doigt la politique du logement, jugeant les conditions d'accès au crédit toujours trop restrictives. Plusieurs mesures sont de nature à dissuader l'investissement immobilier, juge-t-il aussi, comme l'augmentation de la taxe foncière dans de nombreuses villes, la fin d'aides publiques ou les obligations de rénovation. « Tout ça n'aide pas à offrir plus de logements sur le marché », grince-t-il.
(Avec AFP)