
« J'ai besoin de vous ». A la fin du mois d'août, le président de la République Emmanuel Macron a martelé ce message à plusieurs reprises dans une vidéo diffusée à la Rencontre des entrepreneurs de France (REF) à Longchamps. Au centre des préoccupations du patronat, la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) des entreprises, un impôt de production qui devait disparaître en 2024. Mais l'exécutif a fait volte-face en annonçant l'étalement de sa suppression jusqu'en 2027. Cette annonce a provoqué une bronca dans les milieux patronaux tricolores.
Lors d'un point presse organisé ce mardi 19 septembre dans les locaux du Mouvement des entreprises de taille intermédiaire (METI), plusieurs dirigeants ont regretté cette décision. « On est face à un mur d'investissements notamment dans la digitalisation, la transition écologique. Comment les entreprises vont pouvoir mener une telle transformation ? », a déclaré Philippe d'Ornano, vice-président du METI et PDG de Sisley. Avec Frédéric Coirier, dirigeant de Poujoulat et vice-président de l'organisation patronale, ils demandent un alignement des impôts de production français sur la moyenne européenne.
La France sur la première marche du podium des impôts de production selon Rexecode
La baisse de la fiscalité sur les ménages et les entreprises est devenue le mantra d'Emmanuel Macron depuis 2017. Depuis le début de son premier quinquennat, le chef de l'Etat a mis l'accent sur la politique de l'offre avec des baisses d'impôts importantes. Selon une étude de Rexecode, un centre de recherche réputé proche du patronat, les impôts de production contribuent grandement au différentiel de fiscalité entre les entreprises des différentes pays de la zone euro.
En 2019, la part des impôts de production en pourcentage de la valeur ajoutée des entreprises culminait à 6,3% dans l'Hexagone contre 0,8% en Allemagne ou 2,9% en Italie. « Cette fiscalité pénalisait plus fortement les entreprises industrielles et les ETI », souligne Rexecode. Mais depuis, la donne fiscale sur la production a changé. Le plan de relance annoncé à l'automne 2020 a fait baisser les impôts de production d'environ 10,6 milliards d'euros. Avec la suppression totale de la CVAE d'ici 2027, l'écart avec les autres pays de la zone euro se réduirait. Mais la France resterait malgré tout en tête.
Entre l'inflation et la transition, le gouvernement pris au piège du désendettement
Confronté à une nouvelle flambée des prix des carburants et une montagne d'investissements à financer pour la transition, la finalisation du budget 2024 vire au casse-tête. L'exécutif avait promis de continuer de baisser la fiscalité lors du second quinquennat Macron tout en réduisant l'endettement de l'Hexagone mais cette trajectoire semble de plus en plus difficile à tenir. Lors d'une réunion téléphonique avec des journalistes la semaine dernière, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le ministre délégué aux Comptes publics Thomas Cazenave ont confirmé des hausses de la fiscalité sur le gaz, le gazole non-routier (GNR) pour les professionnels ou encore sur infrastructures de transport.
En face, les dépenses nécessaires à la transition vont s'allonger à mesure que le réchauffement climatique s'accélère. Lors d'une réunion du conseil national de la refondation (CNR) ce mardi 19 septembre, la Première ministre a détaillé les 7 milliards d'euros budget de l'Etat en faveur de la transition écologique. A cela s'ajoutent les 3 milliards de financements sur des projets plurinannuels selon un communiqué de Matignon. Au final, la promesse d'une suppression totale de la CVAE pourrait être compromise par ce contexte brûlant.