Pénurie de carburants : les supermarchés restent tant bien que mal achalandés

Les transporteurs routiers ont alerté sur les risques de pénuries dans les magasins. Les acteurs de la grande distribution, eux, se veulent encore rassurant, alors que le mouvement de grève, qui dure depuis bientôt trois semaines dans les raffineries, provoque des tensions sur les carburants dans près d'un tiers des stations-service françaises. A l'autre bout de la chaîne, les agriculteurs redoutent de ne plus pouvoir récolter et surtout semer les céréales d'hiver.
« Il n'y a pas d'inquiétude à avoir » quant à l'approvisionnement des grandes surfaces, assurait jeudi matin Dominique Schelcher, le président de Système U, au micro de France Info.
« Il n'y a pas d'inquiétude à avoir » quant à l'approvisionnement des grandes surfaces, assurait jeudi matin Dominique Schelcher, le président de Système U, au micro de France Info. (Crédits : Pixabay / CC)

Avec les tensions sur les carburants liées à la grève dans les raffineries qui dure depuis bientôt trois semaines, faut-il redouter des ruptures de stocks dans les rayons des supermarchés ? Pour l'instant, non. Malgré les difficultés des transporteurs, dont l'activité, selon les régions, tourne plus au moins au ralentit, «l'approvisionnement des magasins reste pleinement assuré », assure-t-on vendredi à la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD). Même affirmation du côté du patron de Système U. « Pas d'inquiétude à avoir » quant à l'approvisionnement des grandes surfaces, assurait jeudi matin Dominique Schelcher, le président de Système U, au micro de France Info.

Pourtant tout le secteur du transport est impacté par les difficultés d'approvisionnement de carburants. Faute de carburant, les transporteurs routiers qui acheminent notamment des denrées alimentaires dans les supermarchés et hypermarchés, ont alerté jeudi sur les risques de pénuries dans les rayons des grandes surfaces. La confédération des grossistes de France (CGF), l'organisation professionnelle du secteur, redoutait que les livraisons soient « sévèrement et généralement compromises » dès vendredi si la pénurie de carburant perdure.

« La situation met sous tension la logistique des enseignes, et ralentit l'activité pour certains magasins », confirmait-on vendredi à la FCD. « Les livraisons mais aussi les salariés, qui pour certains ne peuvent plus se rendre sur leur lieu de travail, sont impactés.» Les enseignes de la grande distribution doivent composer. « Les distributeurs utilisent une partie de leurs stocks en station pour approvisionner certains de leurs camions ou de leurs collaborateurs », explique la FCD. Par exemple, « chez Système U, on réquisitionne en interne des stations pour faire le plein d'essence de nos transporteurs. C'est le système D  », confirmait Dominique Schelcher.

La Chaîne logistique du froid, association professionnelle qui représente 120 entreprises de transport et d'entreposage de produits frais et surgelés, alertait en début de semaine sur les pénuries de carburant qui « allaient créer des ruptures sur les produits alimentaires pour les Français ». « Les blocages des raffineries de pétrole en cours sur le territoire national confrontent les entreprises qui transportent des denrées périssables (...) à des difficultés grandissantes pour s'approvisionner en carburants », expliquait l'association dans un communiqué. « Nos transporteurs frigorifiques pourraient se trouver en panne sèche à très courte échéance », soulignait Valérie Lasserre, déléguée générale de l'association, alors que les camions frigorifiques sont doublement gourmands en carburant, pour rouler et pour faire fonctionner les frigos.

Des arrêtés ont été pris pour permettre aux camions-citernes de circuler samedi et dimanche, et aux transporteurs de travailler avec « une souplesse sur les horaires de travail », a indiqué la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, vendredi, lors d'un déplacement à Lille.

Les agriculteurs tirent la sonnette d'alarme

A l'autre bout de la chaîne, les agriculteurs aussi s'inquiètent. Si le gazole continue à être livré au compte-gouttes, certains, notamment dans le nord de la France, ne pourront plus récolter et surtout semer les céréales d'hiver, alertent les exploitants et syndicats. « L'alimentation ne peut être prise en otage. Nous demandons au gouvernement une action immédiate, réactive, car dans trois semaines, il sera trop tard », ont écrit jeudi dans un communiqué commun les syndicats agricoles majoritaires d'Ile-de-France.

Jusqu'ici relativement épargnés par les difficultés d'approvisionnement en carburant, les agriculteurs sont en effet rattrapés par la grève dans le secteur de l'énergie. « On a de la tension dans les Hauts-de-France, en Île-de-France, dans le Centre-Val de Loire et dans le Grand-Est : on est sur une zone de récolte de la betterave et de la pomme de terre, et où démarrent les semis de blé et d'orge d'hiver », a expliqué à l'AFP Joël Limouzin, vice-président du syndicat agricole majoritaire FNSEA. « Si on ne fait pas les semis de céréales, cela aura un impact sur la disponibilité en blé en 2023 et donc sur le pain. On est en alerte, parce que les semis, c'est maintenant, quand les conditions de culture sont optimales, pas dans dix jours ou dans un mois », a-t-il détaillé.

Plusieurs fédérations d'exploitants du nord de la France ont demandé aux préfectures d'avoir accès aux réserves stratégiques de l'État. « Aujourd'hui dans la Marne, on a 30% des volumes commandés qui sont livrés. Les listes d'attente s'allongent », indique Hervé Lapie, de la fédération régionale des exploitants dans le Grand-Est. « On n'est pas dans une pénurie de carburant, on est en rupture de livraison. Nous demandons à avoir accès aux réserves stratégiques, au même titre que le secteur de la santé. »

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ZOOM - Un boom des livraisons à domicile

Face à l'incertitude d'un retour à la normale dans les stations-service, plusieurs plateformes de livraisons de courses à domicile affirment connaître actuellement une très forte activité. C'est le cas notamment de la société Picnic, implantée dans le nord de la France, qui constate depuis deux semaines une hausse des livraisons des courses à domicile, d'autant que le service de livraison, avec des véhicules électriques (pas besoin d'essence) est gratuit.

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