Représentativité patronale : un amendement gouvernemental favorable au Medef déclenche la guerre

Répondant favorablement au forcing du Medef, un amendement gouvernemental au projet de loi sur le dialogue social et l’emploi prévoit de fixer le poids des organisations patronales françaises en fonction du nombre de salariés employés par leurs entreprises adhérentes et non plus, comme la loi du 5 mars 2014 le prévoyait, en fonction du nombre d’entreprises adhérentes. Les autres organisations patronales sont furieuses. Mais finalement l'amendement a été repoussé par les sénateurs.
Jean-Christophe Chanut
Le Medef de Pierre Gattaz peut avoir le sourire, il vient d'obtenir du gouvernement +le moyen de rester la première organisation patronale de France aux dépens de la CGPME et de l'UPA qui sont furieuses de ce coup de force.

Cela va tanguer dans le petit monde des organisations patronales. la CGPME et l'UPA (artisans employeurs) sont très remontées contre le gouvernement et le Medef, coupables, à leurs yeux, d'avoir scellé une alliance objective pour que le Medef soit considérée comme  l'incontestable première organisation patronale représentative. Et ce en tentant de modifier les règles du jeu prévues.

Des nouvelles règles pour la représentativité patronale

De fait, après la réforme de la représentativité syndicale en 2008, il avait été décidé de s'attaquer cette fois à la question de la représentativité des organisations patronales et d'apprécier le poids de chacune. Un sujet important puisque ce "poids" permet de bénéficier d'un financement public plus ou moins important, de mesurer quelle organisation est apte à conclure des accords et d'assurer la répartition équitable des mandats dans les différents organismes où siègent les organisations patronales.

C'est le 1er janvier 2017 que seront appliquées les nouvelles règles mesurant la représentativité patronales. Ces règles ont été fixées dans une loi du 5 mars 2014. Elles précisent que sont représentatives les seules organisations  professionnelles d'employeurs rassemblant au moins 8 % de l'ensemble des entreprises adhérentes aux organisations patronales à leur niveau. En outre, pour bénéficier d'un droit d'opposition à la conclusion d'un accord, les organisations patronales doivent représenter 50% des salariés des entreprises qui adhèrent aux organisations patronales.

Enfin , en cas de double appartenance d'une fédération professionnelle à une confédération patronale - par exemple la Fédération française du bâtiment est la fois adhérente de la CGPME et du Medef - la fédération en question doit "accorder" 10% de ses entreprises adhérentes à chacune de ces confédérations patronales. Ensuite, elle est libre de répartir comme elle l'entend le reste des entreprises.

Bref, globalement, ces règles respectaient le principe '"un homme une voix" ou, plutôt, en l'occurrence "une entreprise une voix". C'est-à-dire que l'artisan du coin de la rue avait le même poids que Total ou PSA... Les organisations patronales étaient d'accord sur ce principe.

Un amendement gouvernemental tente de changer les règles initiales

Mais, patatras, le Medef c'est tardivement rendu compte qu'avec ces règles il ne serait sans doute plus la première organisation du pays, aux dépens de la CGPME et sans doute de l'Unsa. Il perdrait donc du poids dans les négociations interprofessionnelles et dans la répartition des mandats... sans parler du financement public.

L'organisation de Pierre Gattaz  a alors fourni un gros travail de lobbying auprès du gouvernement. Et ça a marché puisque le ministère du Travail vient d'ajouter un amendement dans le projet de loi en discussion sur le dialogue social qui prévoit de "fixer le poids des organisations patronales françaises en fonction du nombre de salariés employés par leurs entreprises adhérentes" et non plus, comme la loi du 5 mars 2014 le prévoyait, en fonction du nombre d'entreprises adhérentes.

Or, comme plus de 40% des salariés travaillent dans les entreprises du CAC 40, le Medef est assuré de garder sa primauté si cet amendement est voté... Pour l'instant ce n'est s le cas, la majorité sénatoirale ne l'ayant pas voté.

Il faut dire que les autres organisations patronales sont absolument furieuses de ce "coup de force". L'UPA évoque "un revirement scandaleux qui donne les pleins pouvoirs au Medef contre l'immense majorité des entreprises françaises qui emploient jusqu'à 50 salariés, soit 98% du total des entreprises".

Aussi, CGPME, Unapl (libéraux), UPA et d'autres organisations ont envoyé en urgence une lettre commune aux sénateurs pour leur demander de ne pas voter cet amendement. A ce stade, elles ont été entendues.

Mais l'histoire n'est pas finie car à la CGPME, on est pas encore totalement rassuré après un contact avec le ministère du Travail. L'entourage de François Rebsamen dit " réfléchir" à l'opportunité de déposer un nouvel amendement lorsque le texte arrivera devant l'Assemblée nationale.

La guéguerre patronale aura sans doute bien lieu.

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 2
à écrit le 25/06/2015 à 3:46
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Comment peut on encore se poser la question? Il est clair que ce gouvernement comme ceux qui l'ont précédé font tout, comme Bruxelles et la majorité des grandes économies, pour favoriser les grands groupes et brider les PME/TPE. Contrairement aux eff...

à écrit le 25/06/2015 à 0:38
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Le MEDEF est grand, et Valls est son prophète.

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