Soupçons de traite d'êtres humains : l'avion bloqué dans la Marne a décollé avec 27 passagers en moins

Les passagers indiens confinés dans un aéroport de la Marne depuis trois jours ont enfin redécollé ce lundi. Leur avion avait été immobilisé après des soupçons de traite d'êtres humains. Les deux passagers indiens soupçonnés d'être des passeurs sont ressortis libres.
Le parquet de Paris a en effet indiqué à l'AFP que la justice avait autorisé l'avion à repartir.
Le parquet de Paris a en effet indiqué à l'AFP que la justice avait autorisé l'avion à repartir. (Crédits : Benoit Tessier)

[Article publié le lundi 25 décembre 2023 à 10h12 et mis à jour à 18h36]. L'avion immobilisé depuis jeudi à l'aéroport de Vatry (Marne) a décollé lundi vers 14h40, a constaté un journaliste de l'AFP, avec 276 passagers indiens à bord sur les 303 initiaux, selon une source proche du dossier. Les passagers indiens ont été confinés depuis plus de trois jours dans un aéroport de la Marne, sur fond de soupçons de traite d'êtres humains autour desquels le flou demeure.

Mais les deux passagers indiens du vol Dubaï-Nicaragua intercepté dans la Marne, qui étaient notamment soupçonnés d'être des passeurs, n'ont pas été mis en examen et sont donc ressortis libres lundi après leur interrogatoire devant un juge d'instruction parisien, a-t-on appris auprès de leurs avocats, confirmés par une source judiciaire. Ils se sont vu délivrer des obligations de quitter le territoire français (OQTF). Ces deux hommes, nés en 2000 et 1984, avaient notamment été placés en garde à vue vendredi, soupçonnés d'avoir joué un rôle dans ce qui pouvait être une filière d'immigration clandestine.

25 autres passagers ne sont pas non plus remontés à bord de l'avion car des demandes d'asile, qui seront analysées à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, ont été déposées, selon la source proche du dossier.

Avec 303 indiens à bord, l'Airbus A340 faisait la liaison entre Dubaï (Emirats arabes unis) et Managua, capitale du Nicaragua. Il s'était posé jeudi après-midi à Vatry, à 150 km de Paris, pour faire le plein. Mais cette simple escale technique s'est transformée en longue immobilisation après un « signalement anonyme » selon lequel des passagers étaient « susceptibles d'être victimes de traite des êtres humains » en bande organisée, avait indiqué le parquet de Paris vendredi dernier. Selon une source proche du dossier, ces Indiens, probablement des travailleurs aux Emirats arabes unis, pourraient avoir planifié de se rendre en Amérique centrale afin de tenter ensuite d'entrer illégalement aux Etats-Unis ou au Canada.

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Opération d'envergure

Plusieurs juges des libertés et de la détention (JLD) avaient été mobilisés dimanche pour une opération d'envergure à la veille de Noël au sein d'un bâtiment adjacent à l'aérogare, afin de se prononcer sur le maintien en zone d'attente de ces passagers. L'enquête, menée par la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco), visait à « vérifier si des éléments viendraient corroborer » les soupçons de traite d'êtres humains, selon le parquet.

« On est dans une affaire qui peut être très grave mais à l'heure qu'il est, on est encore un peu dans l'incertitude », a souligné sur BFM TV Patrick Baudouin, président de la LDH. « Est-ce que c'est une erreur monumentale qui a été commise, une dénonciation qui finalement s'avérerait totalement inappropriée, ou est-ce que derrière tout cela il y a un vrai délit, un crime ? », s'est-il interrogé.

L'appareil et ses passagers sont repartis donc « vers l'Inde », a déclaré le bâtonnier de Châlons-en-Champagne François Procureur lors d'un point-presse, information qu'il dit tenir des avocats de l'Etat. Un départ rapide de ces Indiens était d'autant plus probable que la justice a annulé dimanche, pour trois d'entre eux, la procédure de maintien depuis trois jours dans le hall de l'aéroport. Les douanes ont, dans la foulée, renoncé à la procédure pour les autres passagers.

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« Une atteinte disproportionnée aux droits de la personne »

Qui plus est, il apparaît, selon une ordonnance d'une juge des libertés et de la détention (JLD) consultée par l'AFP, que les passagers ont été retenus plusieurs heures « sans en connaître les motifs » en début de procédure et sans être informés de leurs droits « dans un délai raisonnable », ce qui constitue « une atteinte disproportionnée aux droits de la personne ». La préfecture de la Marne précise également que des lits individuels, des toilettes et des douches ont été installés dans la zone d'attente de l'aéroport et qu'une « zone « famille », pour assurer l'intimité parent-enfant », a été mise en place. Mais Me Procureur s'est ému de « problèmes d'exiguïté et de mauvaises conditions de vie » dans cette zone créée par arrêté préfectoral jeudi soir.

Un collectif d'associations s'est indigné dimanche des conditions d'attente de ces passagers et a estimé que la France doit « passer à la vitesse supérieure » dans le repérage et l'accompagnement des possibles victimes de traite d'êtres humains.

« On ne sait pas si c'est de la traite d'êtres humains, du trafic de migrants ou ni l'un, ni l'autre... Mais on a quand même gardé dans un aéroport, pendant trois nuits et trois jours, 303 personnes qui étaient en escale, des hommes, des femmes et des enfants. C'est surprenant », a notamment déclaré à l'AFP Geneviève Colas, coordinatrice pour le Secours catholique-Caritas du Collectif contre la traite des êtres humains.

« Ma crainte, c'est qu'on les remette dans l'avion, et après ? S'ils sont vraiment victimes de traite, ce n'est pas normal de simplement les faire repartir vers un autre pays », juge-t-elle.

(Avec AFP)

Commentaires 4
à écrit le 25/12/2023 à 16:23
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Et pas un journaliste pour dire, et on se demande bien pourquoi, qu’il est quelque peu curieux que 300 Indiens aient envie comme par hasard de se rendre au Nicaragua pour y faire du tourisme. Non ils se sont contentés de parler de leurs conditions de...

à écrit le 25/12/2023 à 16:23
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Bref ! Pour l'instant, tout n'est que médiatique en moment de grande écoute !

à écrit le 25/12/2023 à 11:47
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On a des millions de gens au RSA qui travaillent gratuitement pour des entreprises qu'ils ne choisissent même pas, déjà Nietzsche au 19 ème siècle constatait que les patrons ne cherchaient que des esclaves conseillant même aux ouvriers de refuser de ...

à écrit le 25/12/2023 à 10:52
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Si c'est l'avion qui est sur la photo, il n'est pas près de repartir... Car il s'agit de l'unique exemplaire d'antonov 225 détruit par les russes sur l'aéroport d'Hostomel le 24 février 2022, lors de l'invasion de l'Ukraine.

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