Chine : la baisse des exportations s'accélère dangereusement pour Pékin

La Chine a affiché en octobre un excédent commercial de 56,53 milliards de dollars. Les économistes, eux, anticipaient en moyenne un montant de 82 milliards de dollars, après 77,71 milliards de dollars en septembre. L'ex-empire du Milieu accuse une violente chute des exportations, sur fond de demande mondiale morose. Les importations, elles, en revanche, progressent.
Les exportations chinoises subissent « le ralentissement de la dynamique économique aux États-Unis et en Europe », analyse Zhang Zhiwei, de Pinpoint Asset Management (Photo d'illustration).
Les exportations chinoises subissent « le ralentissement de la dynamique économique aux États-Unis et en Europe », analyse Zhang Zhiwei, de Pinpoint Asset Management (Photo d'illustration). (Crédits : Reuters)

La chute des exportations chinoises s'est accélérée en octobre. Celles-ci accusent un recul considérable de 6,4% sur un an, selon des chiffres publiés par les Douanes du pays, ce mardi 7 novembre. La baisse enregistrée en octobre est nettement supérieure au recul de 3,5% attendu par le consensus d'analystes réuni par Bloomberg. C'est plus que le recul de 6,2% enregistré en septembre. A l'exception d'un bref rebond en mars et avril, les exportations n'ont cessé de diminuer depuis octobre 2022.

Les exportations chinoises subissent « le ralentissement de la dynamique économique aux États-Unis et en Europe », analyse Zhang Zhiwei, de Pinpoint Asset Management, ajoutant que la demande extérieure resterait probablement faible dans les mois à venir.

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Ce chiffre n'incite guère à l'optimisme pour la croissance du pays. Et pour cause, les exportations sont historiquement un levier de croissance clé pour la deuxième puissance économique mondiale. Or, leur baisse depuis désormais six mois consécutifs a déjà un impact direct sur l'emploi au sein de l'ex-empire du Milieu.

Des données publiées la semaine dernière montrent que l'activité manufacturière chinoise s'est contractée de manière inattendue en octobre, compliquant les efforts des décideurs pour dynamiser la croissance économique à l'approche de la fin de l'année. La croissance chinoise n'a progressé que de 0,8% entre le premier et le deuxième trimestre 2023 et le chômage des jeunes a atteint en juin un niveau record à plus de 20%, selon des chiffres officiels dont la publication est depuis suspendue. Pour rappel, Pékin cherche à atteindre son but officiel d'une expansion « d'environ 5% » en 2023, l'un de ses objectifs les plus bas depuis des années.

Malgré un avenir assombri, le Fonds monétaire international (FMI) a revu à la hausse ses prévisions de croissance pour la Chine en 2023 et 2024, ce mardi 7 novembre. Le FMI dit tabler désormais sur une hausse du produit intérieur brut chinois de 5,4% cette année et 4,6% l'an prochain.

Une consommation intérieure stimulée ?

Les importations, elles, ont en revanche augmenté de 3%, contre une baisse prévue de 5%. Elles enregistrent ainsi leur premier mois de croissance en glissement annuel depuis la fin de l'année dernière. Cette hausse des importations pourrait être le signe que la demande intérieure en Chine se redresse après des mois de faiblesse. Zhang Zhiwei estime toutefois que ce chiffre n'est pas suffisant pour tirer une telle conclusion. Un indicateur comme les ventes au détail est nécessaire.

« Néanmoins, la politique fiscale étant devenue plus proactive, une reprise de la demande intérieure est probable dans les mois à venir », a-t-il estimé.

Pékin a déclaré le mois dernier qu'il émettrait des obligations souveraines pour un montant de 1.000 milliards de yuans (128 milliards d'euros) afin de stimuler les dépenses d'infrastructure. Le gouvernement a également mis en place des mesures de relance ciblées pour divers secteurs, en particulier le marché immobilier en difficulté. La Chine est entrée en déflation en juillet pour la première fois depuis 2021, mais elle a rebondi modestement en août.

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Les entreprises étrangères sur le qui-vive

Sur le front des exportations, en revanche, l'heure n'est pas à l'optimisme. Outre une faible demande étrangère, l'Empire du Milieu doit faire face à une défiance accrue des multinationales, jusqu'ici favorables à s'implanter. Selon une récente étude de la BCE, plus de 40% des multinationales présentes en Europe prévoient à moyen terme de relocaliser leurs approvisionnements vers des pays amis, pour réduire leur dépendance à la Chine.

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La relocalisation d'un réseau de production en ciblant des pays alliés, désignée par le terme « friendshoring », « devrait devenir beaucoup plus courante », note la BCE. Pour preuve, 42% d'un panel de 65 grandes entreprises sondées en juillet-août envisagent de mettre en place une telle stratégie, contre seulement 11% affirmant l'avoir déjà appliquée au cours des cinq années passées. Autre enseignement de l'étude : 49% des répondants souhaitent rapprocher la production des biens des marchés où ils sont consommés, selon la pratique de « nearshoring » qui prend le pas sur la mondialisation avec, pour effet, un renchérissement attendu des coûts de fabrication.

Devenir moins dépendants de la Chine

Interrogées sur les pays qui pourraient poser un risque pour les chaînes d'approvisionnement dans leur secteur, deux tiers des entreprises ont cité la Chine, loin devant les États-Unis, Taiwan, l'Inde, la Turquie et la Russie, qui recueillent 10% des réponses. La pandémie de Covid-19 a mis en lumière la dépendance des pays industrialisés avec la Chine sur divers produits considérés comme essentiels, poussant ces derniers, en particulier les États-Unis et l'Union européenne, à chercher à ramener la production sur leur territoire.

Plus de la moitié des entreprises sondées par la BCE ont ainsi déclaré s'approvisionner en matériaux critiques auprès d'un ou plusieurs pays spécifiques et « une grande majorité d'entre eux ont identifié la Chine » comme l'un de ces pays, perçu comme présentant « un risque élevé », selon le document de la BCE. En avril, les pays du G7 se sont prononcés en faveur d'une approche favorisant le « friendshoring », sans viser nommément la Chine comme rival systémique.

Dans son rapport annuel paru en septembre dernier, l'Organisation mondiale du commerce (OMC), elle, a identifié un phénomène de « slowbalisation ». Ce dernier se définit par un ralentissement de la mondialisation, qui pourrait se diriger vers une phase de démondialisation.

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« Nous sommes encore loin de la démondialisation, mais nous commençons à voir les premières fissures dans le système », a expliqué le chef économiste de l'OMC, Ralph Ossa, lors d'un entretien à l'AFP.

La Chine dégèle ses relations commerciales avec l'Australie

Le président chinois Xi Jinping a assuré que la Chine et l'Australie peuvent devenir des « partenaires de confiance », en recevant lundi 6 novembre à Pékin le Premier ministre australien, Anthony Albanese. Une rencontre symbolique du dégel des relations diplomatiques après des années de tensions qui ont freiné les échanges commerciaux.

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Xi Jinping a déclaré à Anthony Albanese que Pékin espère « développer pleinement le potentiel du traité de libre-échange entre la Chine et l'Australie et entreprendre une coopération dans de nouveaux domaines dont le changement climatique et l'économie verte ».

« Alors que certains s'efforcent de causer des troubles dans la région Asie Pacifique, nous devons tout d'abord rester vigilants, et ensuite les combattre », a affirmé le dirigeant chinois.

Anthony Albanese, premier dirigeant australien à se rendre en Chine depuis plus de sept ans, a salué l'évolution « incontestablement très positive » des relations bilatérales, selon des propos retransmis par la télévision publique australienne ABC.

« Les échanges commerciaux sont plus libres et cela bénéficie à nos deux pays », a souligné l'Australien. « Nous pouvons bien évidemment saisir l'occasion aujourd'hui de voir comment renforcer la coopération » entre la Chine et l'Australie, a-t-il déclaré.

Pour rappel, le géant asiatique est le principal partenaire économique de Canberra. Les liens bilatéraux s'étaient toutefois fortement dégradés ces dernières années. Nombre des restrictions au commerce ont toutefois été progressivement levées depuis le retour des travaillistes et d'Anthony Albanese au pouvoir en mai 2022. Malgré le dégel, le Premier ministre australien avait précisé le mois dernier que les deux pays n'étaient pas alignés sur le plan stratégique et qu'ils avaient une histoire et des valeurs différentes.

« Nous devons coopérer avec la Chine quand nous le pouvons » et « être en désaccord quand c'est nécessaire », a-t-il nuancé ce lundi à la presse.

(Avec agences)

Commentaires 14
à écrit le 08/11/2023 à 0:24
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Ah oui j achete plus made in china ou made in rpc car ce pays veut nous manipuler/ dominer via tik tok, huswei , Adus, Gm, etc . Ça doit étre pour ça que ses export reculent

le 08/11/2023 à 0:47
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C'est plutôt l'inflation de l'occident que les occidentaux sont plus pauvres, pas d'argent pour acheter. Hahaha

le 08/11/2023 à 8:40
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Vu comment Temu, Shein et Aliexpress dominent le marché, ils n'ont pas à s'inquiéter. Par contre, l'inflation et la récession en Europe ça c'est une autre histoire

à écrit le 07/11/2023 à 22:36
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Jadis vilipendé par nos dirigeants naifs le protectionisme commence à être utilisé contre la mondialisation des années Reagan Thatcher Mitterrand qui en passant, eux les Américains ont toujours conservé et renforcé la protection de leur marché interi...

à écrit le 07/11/2023 à 16:53
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Les économistes ont perdu la main l'économie ne prédomine plus sur la géopolitique .Un exemple ; alors que la croissance mondiale est en berne le cour des matières premières continue d'augmenter ce qui est contraire au dogme des économistes qui voudr...

le 07/11/2023 à 21:09
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@ldx ...10 dollars ? J'achète😃

le 07/11/2023 à 21:49
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@Idx. Pitié, ne faites pas une confusion réductrice entre les économistes hétérodoxes et les économistes orthodoxes (courant maintream, c'est-à-dire dominant). Eh oui, les prix ne reflètent pas toutes les informations du marché, tout comme l'homo oec...

à écrit le 07/11/2023 à 13:35
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L'appellation "Empire du milieu" était déjà ridicule mais maintenant "l'ex-Empire du milieu" l'est encore plus. La Chine en chinois se dit "Zhong guo" "le Pays du milieu" et "l'Empire du milieu" se dit "Di guo". Les chinois, mêmes nationalistes, n'on...

à écrit le 07/11/2023 à 13:31
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Pour mieux connaître la Chine, lisez les trois récits de Jean Tuan : "Un siècle chinois" (chez CLC Éditions) évoque le parcours de son père chinois arrivé en France en 1929, leur voyage en Chine en 1967 lors de la Révolution culturelle et les incroya...

à écrit le 07/11/2023 à 9:06
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Une Chine en difficulté c' est une Chine moins puissante. Des routes de la soie moins longues. Un grand bien pour notre sécurité, notre souveraineté, la démocratie en général.

le 07/11/2023 à 13:34
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comment expliquer a un enarque ecolos qu'il faut produire en france meme si ont pollue la planete ce n'est pas moins de1 pour cent du monde qui vas influencer sur le monde de demain alors que les gros pollueur que sont la chine et les usa eux ne ...

le 07/11/2023 à 21:12
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@ ludwig Vous voulez dire quoi en fait?

à écrit le 07/11/2023 à 8:57
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"Les économistes, eux, anticipaient en moyenne un montant de 82 milliards de dollars" Si ces gens là n'étaient pas payé des salaires à 5 chiffres pour rester isolés entre eux loin du réel ils seraient plus compétents dans leur domaine.

le 08/11/2023 à 11:21
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@Dossier51. C'est pourtant grâce à un "amour démesuré pour leur propre servitude" (via le consumérisme débridé) et leur complaisance en l'"éducation à l'ignorance" (parfois contre leur gré) que les "populaces" ont contribué ("syndrome de Stokholm") à...

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