Japon : les négociations salariales record laissent entrevoir une possible hausse de ses taux

Les Japonais ont obtenu des hausses de salaires record, de près de 5,28%. Mais de telles augmentations pourraient inciter la Banque du Japon à normaliser sa politique monétaire. En effet, malgré l'inflation, le Japon a encore un taux directeur négatif.
Plus de 770 syndicats membres de la confédération syndicale Rengo ont ainsi obtenu à ce stade des hausses de salaires de 5,28% (photo d'illustration).
Plus de 770 syndicats membres de la confédération syndicale Rengo ont ainsi obtenu à ce stade des hausses de salaires de 5,28% (photo d'illustration). (Crédits : TINGSHU WANG)

Vers une prochaine hausse des taux de la banque centrale japonaise ? C'est en tout cas ce que laissent à penser les premiers résultats des négociations salariales annuelles au Japon, qui montrent une hausse record depuis 1991. Ce qui pourrait inciter la Banque du Japon (BoJ) à amorcer un processus graduel de normalisation monétaire dès la semaine prochaine.

Plus de 770 syndicats membres de la confédération syndicale Rengo ont ainsi obtenu à ce stade des hausses de salaires de 5,28%, a annoncé vendredi cette organisation. Les syndicats réclamaient en moyenne une hausse de 5,85% cette année, mais l'objectif de Rengo d'obtenir au moins 5% a donc été rempli. Une augmentation moyenne de 3,8% avait également été obtenue l'an dernier à la même période. Il s'agissait aussi d'une hausse des salaires record depuis 30 ans au Japon.

Pour rappel, entre les années 1990 et 2023, les salaires ont très peu progressé au Japon, en raison d'une inflation et d'une croissance économique atones, un contexte qui a poussé la BoJ à recourir à une politique monétaire ultra-accommodante depuis 2013. Au cours des dernières décennies, les syndicats nippons ont aussi préféré défendre la sécurité de l'emploi plutôt que de tenter d'obtenir des hausses de salaires significatives.

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Politique monétaire à contre-courant

Sauf que, comme de nombreux pays, l'inflation s'est brutalement réveillée au Japon depuis 2022, avec la flambée des prix du pétrole et d'autres matières premières après la pandémie de Covid-19 ainsi que le début de l'invasion russe de l'Ukraine. La hausse des prix à la consommation dans le pays (hors produits frais) a même atteint 3,1% en moyenne en 2023, un record depuis 1982. Cette dernière reste même relativement tenace (2% en janvier, selon les derniers chiffres officiels disponibles).

De nombreux économistes s'attendent donc à ce que la BoJ amorce dès ce mois-ci ou en avril le processus de normalisation de sa politique monétaire, notamment si les salaires sont révisés à la hausse. En effet, l'institution japonaise n'a pas suivi le chemin classique de l'Europe ou encore des Etats-Unis concernant sa politique monétaire. Elle conserve ainsi pour le moment une politique monétaire dite ultra-accommodante, avec un taux directeur négatif de -0,1% depuis 2016, à contre-courant des hausses successives de taux de la Fed et de la BCE.

La BoJ pourrait cependant dès ce mois-ci mettre fin à sa politique de taux négatifs, si elle estime atteindre son objectif d'une inflation stable et durable de 2%, qui pourrait éventuellement relancer la consommation et la croissance à l'avenir.

Qui plus est, le fossé qui s'est creusé entre sa politique et les resserrements monétaires drastiques menés aux Etats-Unis et en Europe depuis 2022 a fait chuter le yen par rapport au dollar et à l'euro. Si la faiblesse du yen a des aspects positifs, notamment pour les grandes entreprises japonaises exportatrices et la Bourse de Tokyo, elle fragilise encore davantage le pouvoir d'achat des ménages nippons, et donc la consommation intérieure, ce qui est contre-productif pour l'objectif d'inflation de la BoJ.

Et le début de cette année s'annonce difficile, la consommation des ménages ayant connu en janvier sa pire chute depuis trois ans (-6,3% sur un an). Il s'agit du onzième mois consécutif de baisse de cet indicateur.

Dans tous les cas, la BoJ a déjà prévenu qu'elle ferait évoluer sa politique monétaire d'une manière extrêmement graduelle, pour ne pas plomber la très fragile conjoncture économique japonaise et éviter de provoquer un choc sur les marchés financiers.

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Croissance à la peine

La consommation en berne au Japon, du fait de l'inflation et du yen faible, a également des conséquences négatives sur la croissance. Fin 2023, le pays du Soleil Levant évite de justesse la récession, son produit intérieur brut (PIB) au quatrième trimestre ayant été révisé ce lundi en hausse, à 0,1% en termes réels sur un trimestre.

Mais en termes nominaux, c'est-à-dire sans corriger l'effet de l'inflation, le PIB nippon a été rétrogradé en 2023 au quatrième rang mondial, ayant été dépassé par l'Allemagne. Au Japon, les médias locaux ont abondamment commenté la perte par le pays de son troisième rang économique mondial. Car au-delà de l'impact exceptionnel de la chute du yen, de puissants facteurs fondamentaux négatifs sont aussi à l'œuvre. À l'instar du déclin démographique accéléré de l'archipel et la faiblesse chronique de sa productivité.

« Le petit rebond au dernier trimestre a permis d'éviter l'épouvantail de la « récession technique », défini par deux trimestres consécutifs de contraction du PIB. Mais cela ne change pas le fait que l'économie japonaise se porte mal », avait réagi lundi Stefan Angrick dans une note de Moody's.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 16/03/2024 à 9:43
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Elles sont records parce qu'inhabituelles de lpart la pathologique cupidité de ceux qui possèdent et détruisent lem onde en ronflant. En partant de zéro, un c'est génial ! Mais ce n'est qu'un.

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