Le risque de récession devrait concerner un tiers de l'économie mondiale, selon le FMI

La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) a alerté, ce jeudi, sur les risques de recul de l'économie qui pèsent sur de nombreux pays alors que le monde est désormais « sujet aux chocs et à de plus grandes incertitudes ». Elle a donc appelé les Etats et institutions à « agir maintenant et ensemble » face au risque croissant de voir « cette période de fragilité devenir une dangereuse nouvelle normalité ».
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) s'exprimait, ce jeudi, lors d'un discours prononcé à Washington.
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) s'exprimait, ce jeudi, lors d'un discours prononcé à Washington. (Crédits : Reuters)

Le spectre de l'inflation plane plus que jamais sur l'économie mondiale. Le 27 septembre dernier, la patronne de l'organisation mondiale du commerce (OMC) assurait que « maintenant, nous devons faire face à ce qui ressemble à une récession qui approche », précisant qu'il s'agissait d' « une récession mondiale ». Ce jeudi, c'est au tour de la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) de se montrer alarmiste, dans un discours prononcé jeudi à Washington.

La pandémie a marqué un « virage fondamental pour l'économie mondiale », a constaté Kristalina Georgieva, passant d'« un monde d'une prévisibilité relative » à « un monde sujet aux chocs et de plus grande incertitude ». Une crise sanitaire à laquelle s'est ajoutée le déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février dernier. De nombreux pays payent lourdement la crise énergétique qui s'est installée depuis et qui a fait flamber les prix de l'énergie.

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Le risque de récession pèse sur « un tiers de l'économie mondiale »

Conséquence, le FMI s'attend désormais à ce qu'un nombre important de pays connaissent au moins deux trimestres consécutifs de repli de leur PIB, définition d'une récession technique, entre la fin de cette année et 2023. Un risque qui devrait concerner « environ un tiers de l'économie mondiale » alors que « pour de nombreux foyers à travers le monde, même si la croissance est positive, ils auront le sentiment d'être en récession, à cause de la hausse du coût de la vie », a souligné Kristalina Georgieva, en ouverture des réunions annuelles de l'institution, qui doivent se tenir dans une semaine à Washington, en présentiel, pour la première fois depuis l'automne 2019. Et cela pourrait même être pire : « l'incertitude est extrêmement élevée, dans un contexte de guerre et de pandémie. Il peut y avoir d'autres chocs économiques ».

Le FMI publiera mardi ses prévisions de croissance pour l'année à venir, et celles-ci seront révisées à la baisse, a-t-elle averti. L'OMC a, lui, déjà abaissé sa prévision de commerce mondial pour 2023, a-t-il indiqué mercredi. Les économistes de l'organisation tablent actuellement sur une croissance du volume du commerce mondial des marchandises de 3,5% en 2022 - soit légèrement supérieure à la hausse de 3,0% prévue en avril, mais ils prévoient une augmentation de 1,0% pour 2023 - chiffre en forte baisse par rapport à l'estimation précédente de 3,4% publiée en avril.

Dès lors, la première des priorités est d'empêcher les prix de continuer à flamber, car « loin d'être transitoire, l'inflation s'installe », a estimé la directrice générale du FMI. Elle a donc appelé les États et les institutions à « agir maintenant et ensemble » face au risque croissant de voir « cette période de fragilité devenir une dangereuse nouvelle normalité ». « Il y a urgence à stabiliser l'économie. (...) Au FMI, nous appelons à une action conjointe » des Etats afin d'anticiper les crises à venir, a-t-elle insisté.

Le FMI alerte sur le risque d'un resserrement monétaire « trop fort et trop rapide »

Concernant l'action menée par les banques centrales de resserrer leur politique monétaire pour espérer lutter contre l'inflation, Kristalina Georgieva s'est montrée nuancée. Elle a reconnu que ne pas agir maintenant nécessiterait « des taux encore plus élevés et persistants, qui causeraient encore plus de dégâts sur la croissance et l'emploi ». Elle a d'ailleurs rejoint le président de la banque centrale américaine (Fed), Jerome Powell, admettant que la réduction de l'inflation « ne sera pas facile et ne sera pas indolore à court terme ».

Pour tenter de juguler la hausse des prix qui atteignait 6,2% en août sur un an aux Etats-Unis, et 9,1% en septembre au sein de la zone euro (les dix-neuf États à avoir adopté la monnaie unique), grimpant à plus de 80% en Turquie, les banques centrales ont opéré plusieurs relèvements de leurs taux directeurs afin de freiner la demande et donc l'envolée des prix. Mais cette politique a pour conséquence de pénaliser la croissance jusqu'à mener à une récession qui, techniquement, se définit par un recul pendant deux trimestres consécutifs de l'économie. Et c'est bien sur ce point qu'a alerté la directrice générale pointant du doigt un resserrement monétaire « trop fort et trop rapide », qui pourrait « plonger de nombreuses économies dans une récession prolongée ».

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D'autant que la hausse du dollar, conséquence de celle du taux directeur de la Fed, vient compliquer l'accès au crédit de nombreux pays qui empruntent dans cette monnaie et ont vu leur dette augmenter par ailleurs du fait de la hausse des taux d'intérêt. « Plus du quart des pays émergents ont fait défaut ou sont à des niveaux difficiles, de même que plus de 60% des Etats à faibles revenus », s'est inquiété Kristalina Georgieva. Le risque: une crise de la dette s'étendant à l'ensemble de ces pays. « Les principaux prêteurs tels que la Chine ou le secteur privé doivent prendre leur responsabilité », a-t-elle martelé.

Quelques jours plus tôt, Kristalina Georgieva avait, en outre, pointé du doigt les gouvernements dont les politiques visent à soutenir indistinctement la population en limitant la hausse des prix de l'énergie notamment en versant des indemnisations qui vont à l'encontre des décisions prises par les banques centrales. « Les politiques monétaires mettent un coup de frein là où les politiques budgétaires appuient sur l'accélérateur », a-t-elle déploré dans une interview à Reuters, estimant qu'il est possible d'éviter une telle récession mondiale, à condition que les gouvernements mettent en place des politiques budgétaires s'articulant avec les resserrements monétaires. Elle s'opposait ainsi à la secrétaire générale de la Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement (Cnuced), Rebeca Grynspan, selon qui « nous avons les outils pour calmer l'inflation et soutenir tous les groupes vulnérables. Mais la ligne de conduite actuelle est en train de causer des dommages aux plus vulnérables, en particulier les pays en développement, et risque de faire basculer le monde dans une récession mondiale ».

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Des « réformes de transformation » nécessaires

Les ministres de l'Economie du G20 doivent se retrouver à Washington, en compagnie des gouverneurs des banques centrales, en marge de la réunion annuelle du FMI, mercredi et jeudi prochain. Ils ont notamment la volonté d'avancer sur les sujets de l'imposition mondiale, de la régulation du secteur financier ou encore du financement des infrastructures. Si agir à court terme est essentiel, « ce ne sera pas suffisant pour revitaliser l'économie mondiale », a prévenu Kristalina Georgieva, qui appelle à des « réformes de transformation », que le FMI compte soutenir. Elle a notamment souligné qu'une attention sera en particulier accordée à « l'investissement dans la santé, l'éducation, (où) des filets de protection plus solides sont essentiels », de même que la numérisation et le développement des infrastructures numériques. « Nous devons répondre à cette période d'instabilité (...) en stabilisant nos économies face aux crises immédiates et construire notre stabilité face aux crises à venir », a-t-elle conclu.

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 07/10/2022 à 3:10
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Ca ne concerne pas la France Nous ont a Jupiter qui veille au grain ..

à écrit le 06/10/2022 à 18:26
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Ah,mon Dieu, quel risque terrible, un PIB qui diminue, pensez donc

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