Royaume-Uni : le champ pétrolier controversé en mer du Nord Rosebank obtient le feu vert des autorités

Le régulateur britannique du pétrole et du gaz a accordé une autorisation pour l'exploitation du champ pétrolier controversé de Rosebank, en mer du Nord. Celui-ci sera conjointement exploité par le Norvégien Equinor et la filiale de l'israélien Delek, Ithaca.
Cette autorisation a aussitôt fait réagir les défenseurs de l'environnement (Photo d'illustration).
Cette autorisation a aussitôt fait réagir les défenseurs de l'environnement (Photo d'illustration). (Crédits : Equinor ASA – Espen Rønnevik/Øyvind Gravås)

[Article publié le mercredi 27 septembre 2023 à 10h37 et mis à jour à 13h01] Le régulateur britannique du pétrole et du gaz a annoncé ce mercredi 27 septembre dans un communiqué avoir accordé une « autorisation de développement et de production » pour le champ controversé de Rosebank en mer du Nord. Dans le détail, l'autorisation a ainsi été délivrée ce mercredi par l'Autorité de transition de la mer du Nord « après acceptation de la déclaration environnementale » du projet et « en tenant compte de considérations » liées à l'objectif de neutralité carbone, fait valoir le régulateur dans son communiqué.

Les ressources du champ pétrolier sont estimées à environ 300 millions de barils de pétrole, et la seule phase 1 du projet lancée mercredi prévoit environ 245 millions de barils. Le gisement produira aussi du gaz.

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Dans les faits, l'énergéticien norvégien Equinor et son homologue Ithaca, filiale de l'Israélien Delek, exploiteront conjointement ce gisement situé au large des Shetland, au nord de l'Ecosse. Le norvégien détient 80% du projet Rosebank, Ithaca les 20% restant. La production devrait démarrer en 2026-2027. Dans des communiqués séparés, ils ont annoncé un investissement de 3,8 milliards de dollars dans ce projet.

« Le développement du champ de Rosebank nous permettra de renforcer notre position d'important partenaire énergétique du Royaume-Uni, tout en optimisant notre portefeuille pétrolier et gazier et en augmentant l'approvisionnement énergétique en Europe », a assuré de son côté Equinor, qui détient 80% du projet, dans son communiqué.

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Les deux entreprises partenaires ont assuré que le développement de Rosebank a été optimisé pour réduire les émissions de carbone, en visant notamment une alimentation des installations en mer en électricité depuis la terre ferme et les champs voisins.

Une décision « moralement obscène »

Cette autorisation a aussitôt fait réagir les défenseurs de l'environnement. Une semaine après l'annonce par le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, du report plusieurs mesures phares de la politique climatique du Royaume-Uni, ce dernier « a prouvé une fois pour toutes qu'il plaçait les profits des compagnies pétrolières au-dessus des gens ordinaires », a fustigé l'ONG Greenpeace dans un communiqué.

Une décision « moralement obscène », a de son côté lancé Caroline Lucas, députée écologiste, sur X (ex-Twitter). « Cela n'améliorera pas la sécurité énergétique ni ne réduira les factures, mais cela brisera nos engagements climatiques et démolira le leadership mondial » du Royaume-Uni en matière de transition climatique, estime-t-elle.

Le gouvernement écossais s'inquiète de son côté que « la majorité de ce qui est extrait de Rosebank aille à l'étranger et ne reste pas en Écosse ou au Royaume-Uni », a réagi le Premier ministre de la région, Humza Yousaf sur X (ex-Twitter).

« Nous reconnaissons la contribution significative » des hydrocarbures à l'Écosse, mais « notre avenir ne réside pas dans l'extraction illimitée de pétrole et de gaz, mais dans l'accélération de notre transition juste vers les énergies renouvelables », a-t-il insisté.

« Nous investissons dans nos énergies renouvelables », mais « nous aurons besoin de pétrole et de gaz dans la transition vers la neutralité carbone et il est donc logique d'utiliser nos propres approvisionnements » en mer du Nord, s'est défendu mercredi la ministre à l'Energie, Claire Coutinho.

Des ambitions climatiques revues à la baisse

Le 21 septembre dernier, le chef du gouvernement britannique a assuré qu'il ne ralentissait « absolument pas » ses efforts dans la lutte contre le réchauffement climatique, au lendemain de l'annonce du report de certaines mesures phares. Le dirigeant conservateur a notamment annoncé le 20 septembre dernier le décalage de cinq ans, à 2035, de l'interdiction de la vente de voitures thermiques neuves, et repoussé l'interdiction des chaudières au fioul, GPL ou charbon pour « donner plus de temps » selon lui aux Britanniques éprouvés par la crise du coût de la vie.

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Alors que des élections législatives sont attendues l'an prochain, les annonces de Rishi Sunak ont été dénoncées comme électoralistes par certains, et réprouvées dans les milieux économiques, et jusque dans son camp. En revanche, elles ont été accueillies plutôt favorablement dans la presse britannique, majoritairement conservatrice.

Le directeur général de la Commission sur le changement climatique Chris Stark a qualifié de « vœu pieux » le fait de croire que le Royaume-Uni pourrait atteindre la neutralité en 2050 avec les mesures annoncées, mais Rishi Sunak a affiché une confiance « absolue ».

Le gouvernement « a la responsabilité de faire en sorte que nous ayons les mesures et propositions en place qui nous permettent de remplir toutes nos obligations internationales et nationales » et « nous les atteindrons », a-t-il asséné.

L'éolien offshore plombé

Entre une pléthore de nouveaux permis d'exploration pétrolière et gazière et une crise de l'éolien offshore, les nuages s'accumulent sur les promesses de neutralité carbone du Royaume-Uni, alors que la guerre en Ukraine a remis la sécurité énergétique au cœur des priorités de Londres.

Fin juillet, le gouvernement a promis « des centaines » de nouvelles licences d'exploration et exploitation d'hydrocarbures en mer du nord, suscitant l'ire des écologistes. En réaction, Greenpeace avait alors recouvert début août la demeure privée du Premier ministre d'une énorme bâche « noire pétrole » pour dénoncer « une nouvelle frénésie de forage ».

« Tout soutien du gouvernement aux hydrocarbures a un impact négatif sur la transition énergétique », avait insisté Erik Dalhuijsen, co-créateur d'Aberdeen Climate Action, interrogé par l'AFP en marge de la conférence Offshore Europe. « Lancer de nouveaux champs pétroliers ce n'est pas très cohérent avec la neutralité carbone », avait renchéri Jean Boucher, membre d'Extinction Rebellion à Aberdeen, et sociologue de l'environnement.

Autre mauvaise nouvelle, sur le front de l'éolien, secteur au cœur du plan de transition énergétique britannique : le gouvernement n'est pas parvenu à attribuer de nouveaux permis pour faire bâtir des champs offshore dans son dernier appel d'offre, faute de candidats. L'invasion russe de l'Ukraine a fait flamber l'inflation et les coûts de production à travers le monde, ce qui se ressent sur les prix de l'acier et autres matériaux pour construire des éoliennes, alors que les tarifs de l'électricité que peuvent facturer les énergéticiens sont plafonnés. Résultat, les entreprises du secteur affirment que ces projets ne sont plus rentables.

L'énergéticien suédois Vattenfall a déjà jeté l'éponge sur un vaste projet, Norfolk Boreas, et d'autres pourraient suivre. « Je sais que d'autres entreprises étudient avec attention leurs permis et leur capacité à investir » dans l'éolien au Royaume-Uni, a fait valoir Michael Tholen, directeur de la durabilité du lobby énergétique Offshore Energy UK (OEUK).

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 02/10/2023 à 13:32
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3 jours de conso mondiale, ça va pas loin!!!!

à écrit le 27/09/2023 à 18:44
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C'est comme un plan social, l'entreprise à court d'argent doit en dépenser énormément avant d'économiser sur les salaires. Ce n'est pas justice, ce n'est pas du tout facile à faire mais si on ne le fait pas, les salariés ne sont pas indemnisés. Dans ...

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