Allemagne : des grèves paralysent les transports ferroviaires et aériens dans tout le pays

Les trafics ferroviaires et aériens sont fortement perturbés ce jeudi en Allemagne. Cette nouvelle vague de grèves illustre la dégradation du climat social dans la première économie européenne.
Les revendications des syndicats des transports portent autant sur des augmentations de salaires que sur les conditions de travail (photo d'archives).
Les revendications des syndicats des transports portent autant sur des augmentations de salaires que sur les conditions de travail (photo d'archives). (Crédits : Reuters)

Jeudi noir pour les transports allemands. Pour le rail, pour la cinquième fois depuis novembre 2023, les conducteurs de trains de la compagnie publique Deutsche Bahn sont en grève. Un mouvement qui a démarré aux premières heures de la matinée ce jeudi 7 mars et qui doit se poursuivre jusqu'à la mi-journée ce vendredi. Si une offre de base est maintenue, globalement seuls 20% des trains longue distance circulent, avec de « nettes différences régionales », comme l'a déclaré le porte-parole de la Deutsche Bahn Achim Stauß à la télévision publique ZDF.

Dans le secteur aérien, un débrayage du personnel au sol du groupe aérien Lufthansa est très suivi. Il s'agit du quatrième en quelques mois et il est prévu jusqu'à samedi matin dans les principaux aéroports allemands. Au total, la compagnie a précisé ne pouvoir assurer que « 10 à 20% de son programme de vol » pendant la durée de l'arrêt de travail. Par ailleurs, le plus grand aéroport du pays, à Francfort-sur-le-Main (ouest), a prévenu que les départs seraient totalement paralysés en raison de cette grève chez Lufthansa mais aussi d'un arrêt de travail des agents de sécurité de la plateforme ce jeudi.

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Une lutte pour de meilleurs salaires et conditions de travail

Les revendications des syndicats des transports portent autant sur des augmentations de salaires que sur les conditions de travail.

À titre d'exemple, celui des conducteurs de trains, GDL, revendique le passage à une durée hebdomadaire de travail de 35 heures sans perte de salaire, contre 38 heures actuellement. Il menace d'ailleurs de durcir encore le mouvement, en organisant des grèves sans le préavis habituel de 48 heures. Ce qui fait planer l'ombre de la même paralysie qu'en janvier, où les transports ferroviaires ont cessé pendant cinq jours d'affilée.

La Deutsche Bahn s'est défendue en affirmant avoir fait des concessions allant jusqu'à 13% de salaire supplémentaire, ainsi que la possibilité de réduire la semaine de travail d'une heure à partir de 2026.

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Chez Lufthansa, le syndicat Verdi demande des augmentations de salaire de 12,5%, soit un minimum de 500 euros de plus par mois. La dernière offre de Lufthansa comprenait une augmentation de salaire plus importante sur une période plus longue, mais ne répondait pas aux exigences du syndicat, selon ce dernier. Le prochain cycle de négociations aura lieu les 13 et 14 mars.

Selon le syndicat, la direction du groupe « ne bougera pas tant que la pression n'aura pas augmenté ». À ce sujet, après le personnel au sol, les agents de cabine de Lufthansa devraient également se mettre en grève prochainement, après l'échec, acté ce mercredi, d'une nouvelle séance de négociations sur les salaires et les conditions de travail.

Cette mobilisation salariale au sein du groupe aérien intervient alors que celui-ci a annoncé, ce même jeudi, un doublement de son bénéfice net l'an passé, porté par un accroissement de la demande et les hausses de prix du billet. À 1,67 milliard d'euros, c'est le « troisième meilleur résultat de l'histoire », s'est félicité Lufthansa. Le groupe a en conséquence décidé de récompenser ses actionnaires par un retour au versement de dividendes. De quoi rajouter de l'huile sur le feu déjà brûlant du conflit social.

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Un dialogue de sourds dont pâtit l'économie

Le chef du personnel de Lufthansa, Michael Niggemann, a en tout cas fustigé des grèves qui « nuisent à nos clients, à l'entreprise et, en fin de compte, à nos employés », a-t-il déclaré, appelant Verdi à entamer des discussions « constructives ».

Reste que ce dialogue de sourds dure depuis maintenant plusieurs mois en Allemagne. Le pays est confronté depuis un an à une multiplication des conflits sociaux dans différentes branches professionnelles, des supermarchés aux services, où les négociations sur les salaires et les conditions de travail se durcissent après une longue période d'envolée des prix. Mais c'est dans le secteur des transports que ces tensions se cristallisent, bousculant un pays autrefois réputé pour la qualité de son dialogue social et la recherche du consensus entre patronat et syndicats. L'Allemagne comptait jusqu'à maintenant parmi les pays les moins grévistes en Europe. Entre 2012 et 2021, le nombre de jours non travaillés en raison de grèves pour 1.000 salariés s'est élevé à 18 par an en moyenne, contre 92 en France.

Outre l'image de l'Allemagne, c'est aussi à son économie que ces grèves portent préjudice, alors que celle-ci est déjà engluée dans une sévère crise de compétitivité de son industrie. Ces conflits sociaux « aggravent la situation », a déploré Clemens Füst, le président de l'Ifo, l'un des principaux instituts économiques du pays. Elles affaiblissent aussi la coalition gouvernementale au pouvoir dirigée par le chancelier social-démocrate Olaf Scholz, aux prises avec une impopularité record.

(Avec AFP)

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