Introductions en Bourse : le marché commence à dire "stop"

Les sociétés qui ont tenté l’aventure de la Bourse ont levé 117,7 milliards de dollars dans le monde, au premier semestre, du jamais vu depuis 2007. Mais les investisseurs commencent à s’interroger sur les niveaux de valorisation.
Christine Lejoux
La Bourse de Paris est en passe de réaliser son meilleur millésime des sept dernières années, avec 4 milliards d'euros de capitaux levés au premier semestre 2014, contre 1,3 milliard sur l'ensemble de 2013. REUTERS.

Le point commun entre le groupe français de blanchisserie Elis, la compagnie aérienne indienne IndiGo et le biscuitier britannique United Biscuits ? A première vue, pas grand-chose. En réalité, ces trois sociétés partagent une même ambition : celle de s'introduire en Bourse dans les prochains mois. "Il existe un solide pipe-line d'entreprises prêtes à lancer leur IPO (initial public offering, introduction en Bourse), dans des zones géographiques et des secteurs d'activité très variés", confirme Franck Sebag, associé au sein du cabinet d'audit EY (ex Ernst & Young). Qui anticipe donc "une hausse significative des introductions en Bourse, au second semestre 2014, dans les secteurs de la finance, de l'immobilier, de la technologie, des produits de consommation et des services."

 Les investisseurs doivent donc se préparer à une nouvelle déferlante, après la vague qui les a déjà submergés au premier semestre. Lequel, selon les données compilées à l'échelle mondiale par EY, a vu 588 sociétés tenter l'aventure de la Bourse, levant ainsi 117,7 milliards de dollars (86,6 milliards d'euros). Non seulement ce montant correspond à une envolée de 67% par rapport aux six premiers mois de 2013, mais, surtout, il permet au marché mondial des IPO de renouer avec son niveau du premier semestre 2007, avant l'éclatement de la crise des subprimes (crédits hypothécaires américains risqués).

 L'Europe, numéro un sur le front des capitaux levés, au premier semestre

 Et s'il est une zone géographique qui a bien tiré son épingle du jeu, c'est l'Europe, numéro un sur le front des capitaux levés avec 44,5 milliards de dollars. Une somme en hausse de... 351% par rapport au premier semestre 2013 et qui, elle aussi, constitue un record qui n'avait plus jamais été atteint depuis 2007. Même tendance pour la place de Paris, en passe de réaliser son meilleur millésime des sept dernières années, avec 4 milliards d'euros de capitaux levés au cours du seul premier semestre 2014, contre 1,3 milliard sur l'ensemble de 2013.

 Un enthousiasme qui trouve son origine dans la bonne performance des indices boursiers, pour certains à leur plus haut niveau historique, comme le Dax allemand et le Dow Jones américain. Mais également dans la faible volatilité des marchés actions, au plus bas depuis la crise financière de 2008, ainsi que dans des indicateurs macro-économiques encourageants. Sans oublier les bonnes performances des nouvelles venues en Bourse, qui ont vu leur cours grimper de 12,3% en moyenne, au premier jour de leur cotation, d'après les données recueillies par EY pour le premier trimestre 2014.

 Des entreprises contraintes d'abaisser leurs ambitions

 Mais les prochaines candidates à la Bourse pourraient ne pas connaître une aussi bonne fortune. C'est en tout cas ce que laissent présager les toutes dernières opérations survenues à Paris. Qu'il s'agisse du groupe de restauration collective Elior, du spécialiste des moyens de paiement Worldline ou de l'opérateur boursier Euronext, ces sociétés se sont introduites dans le bas de la fourchette de prix indicative qu'elles avaient communiquée au marché. Idem pour le réseau social professionnel Viadeo, que cette révision à la baisse de ses ambitions n'a pas empêché de dévisser de près de 17%, au cours de sa première journée à la Bourse de Paris, le 2 juillet.

 A l'échelle mondiale, "bien que la performance du premier jour de cotation soit demeurée solide au deuxième trimestre, avec une hausse de 9,8% en moyenne, celle-ci est inférieure à celle du premier trimestre (12,3%)", renchérit Franck Sebag, chez EY. Et, au deuxième trimestre toujours, un plus de la moitié (56%) seulement des impétrantes a franchi les portes de la Bourse sur la base d'un cours supérieur ou égal à la fourchette de prix indicative, contre 70% au premier trimestre.

 Les investisseurs deviennent plus prudents et sélectifs

 "Les investisseurs font montre aujourd'hui de davantage de prudence car ils s'interrogent sur la capacité des marchés actions à garder leur tendance haussière (...) ; ils ne sont plus disposés à investir dans des dossiers surévalués", analyse Franck Sebag. Des investisseurs qui arrivent par ailleurs à saturation, avec ce foisonnement d'introductions en Bourse. "Il existe une véritable lassitude au sujet des IPO", explique dans un entretien à l'agence Bloomberg Laurent Millet, co-gérant chez Artemis European Opportunities Fund, pour qui le maître-mot est devenu la "sélectivité."

 Au premier trimestre, les investisseurs se précipitaient sur les introductions en Bourse afin d'engranger "un gain facile et rapide. Aujourd'hui, ils ne se contentent plus de participer à des opérations, ils investissent vraiment", confirme Craig Coben, responsable des marchés actions européens chez Bank of America Merrill Lynch. A bon entendeur...

Christine Lejoux

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Commentaire 1
à écrit le 08/07/2014 à 12:19
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C'est pas bien joli de dénoncer ses petits copains d'investisseurs un peu spéculateurs sur les bords

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