Après l'affaire Kerviel et de mauvais choix stratégiques notamment concernant les actifs toxiques, la Société Générale, qui a récemment émis une alerte sur ses résultats, se retrouvent fragilisée et la proie potentielle de velléités de rachat. Les partenariats noués avec le Crédit agricole depuis plus de deux ans suscitent des spéculations sur la nature à terme de leur relation.

Si le Crédit Agricole, qui ne possède que 25% de parts de marchés dans la banque de détail en France, a peu de chances de convaincre les autorités de la concurrence de lui laisser mettre la main sur le réseau de la Société Générale, l'intérêt de la banque verte dans un partenariat privilégié réside surtout dans le fait de bloquer l'émergence d'un redoutable concurrent sous la forme d'une alliance avec BNP Paribas.

Concentrés sur l'intégration de Fortis qui a propulsé BNP au rang de première banque de la zone euro en terme de dépôts bancaires, les dirigeants de BNP Paribas répètent maintenant à l'envie avoir définitivement fermé le dossier. Il est cependant très probable que le premier groupe bancaire français attende le bon moment pour faire main basse sur la Société Générale. Seule une offre de rachat venant d'un groupe étranger, et/ou une situation financière très dégradée de la SG pourrait rendre la candidature de BNP crédible, dans la mesure où elle constituerait plus un sauvetage du groupe qu'une offre prédatrice.

Depuis l'augmentation de capital de 2008 qui a sauvé la SG après la perte de "trading" record de 4,9 milliards d'euros, le Crédit agricole fait figure de garant de son indépendance, de chevalier blanc désigné en cas de raid. La création de filiales communes dans le courtage avec Newedge et la gestion d'actifs avec Amundi pourrait être suivie par d'autres coentreprises, une collaboration dans les services aux investisseurs étant notamment envisageable.

"C'est un secret de polichinelle qu'il y a des discussions entre les deux groupes", avance un banquier d'affaires parisien. Mais si la place de Paris s'attend à ce que les deux établissements resserrent leurs liens, les dernières rumeurs évoquant une fusion entre Calyon, banque d'investissement du Crédit agricole, et Société Générale sont accueillies avec scepticisme. "C'est vraiment un fantasme, cela n'a aucun sens", explique une source proche de la Société générale, citée par Reuters. "Il y a d'autres choses qui auraient plus de sens."

On fait en outre valoir en interne que les deux banques d'investissement n'ont pas les mêmes modèles stratégiques. "La BFI de Société Générale est réputée être relativement innovatrice et agressive dans le développement de nouveaux produits comme les produits structurés", souligne Eric Vanpoucke, analyste bancaire chez Sal. Oppenheim. "Je ne suis pas certain que ce soit la direction que souhaitent prendre Jean-Paul Chifflet (nouveau DG du Crédit agricole) et surtout les caisses régionales tel que perçu dans le plan présenté à l'automne 2008". De plus, le scénario dans la presse d'une prise de participation du Crédit agricole dans Société générale en échange de l'apport de Calyon supprimerait la prime spéculative qui bénéficie au cours de Bourse de Société Générale.