Les réactions au verdict du procès de Jérôme Kerviel

Réactions après la décision de justice qui a condamné Jérôme Kerviel à cinq ans de prison dont trois fermes et 4,9 milliards d'euros de dommages.

Jérôme Kerviel, ex-trader de Société Générale (sur Europe 1) : "Je commence à avaler la pilule mais je suis quand même abattu par le poids de la sanction et par le poids des responsabilités que le jugement me fait porter. J'ai vraiment le sentiment qu'on a voulu me faire payer pour tout le monde, qu'il a fallu sauver la Générale et qu'on a tué le soldat Kerviel. Dès le début de l'enquête, j'ai reconnu ma part de responsabilité, j'ai reconnu mes torts tout en apportant des éléments factuels prouvant que mes collègues et mes supérieurs étaient au courant de ce que je faisais. On n'a probablement pas su expliquer et éclairer le tribunal et apporter la preuve une fois pour toute que je n'étais pas seul dans ce bateau-là. Evidemment quand on reçoit un tel coup de massue sur la tête, c'est difficile. Quand le jugement a été rendu, ma première pensée a été pour mon père, pour ma mère. Evidemment ça m'a fait mal".

Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers (sur Europe 1) : "En tant que citoyen, et en écoutant les réactions de vos auditeurs, je comprends que ce qui puisse choquer, c'est le fait que vous ayez cinq milliards à rembourser pour un particulier quel qu'il soit (...) Je comprends que ceux qui nous écoutent trouvent que c'est irréaliste. Même s'il ne faut pas croire que Jérôme Kerviel soit un Robin des bois ou un Arsène Lupin des temps modernes. il est évident que Jérôme Kerviel ne pourra jamais rembourser 5 milliards."

Des responsables de la Générale ont changé et il y a eu des sanctions. Il y a eu une condamnation de la Générale par la Banque de France et par le régulateur bancaire. Elle a été condamnée pour défaut de contrôle dans cette affaire. Ce que je crois c'est que le chiffre très élevé et irréaliste (de 4,9 mds d'euros) signifie quelque part que la Générale ne sera pas dédommagée autrement que sur un plan symbolique. Cette décision doit servir à ramener un peu d'ordre dans le monde financier, pour qu'il revienne sur ses jambes. Il faut que la pression continue sur les établissement bancaires pour que leurs systèmes de contrôle soient renforcés".
 

Luc Chatel, porte-parole du gouvernement (ce mercredi sur RMC) : "La justice a rendu cette décision en intégrant tous les paramètres, c'est-à-dire l'ampleur de la fraude et le préjudice puis j'imagine les conséquences de l'amende". 

Jean-Jacques Bourdin lui demande si la banque ne pourrait pas "faire un geste et ne pas exiger les 4,9 mds d'euros" :

"C'est une décision qui appartient à la Société générale. Il faut que le nouveau directeur de la communication, peut-être, le suggère à son président. (...) Maintenant il y a un appel, ça veut dire qu'il va y avoir un nouveau procès. (...) les parties vont pouvoir à nouveau s'exprimer, faire valoir leur droit."

Maître Reinhart (l'un des trois avocats de la Société Générale, partie civile au procès) :

On est dans la droite ligne d'une analyse scrupuleuse des faits, d'une application du droit. Le tribunal n'a pas du tout adhéré à la défense de M. Kerviel, ce qui a conduit à une sévérité qui nous apparaît juste. Quant aux dommages et intérêts, c'est l'application stricte de la jurisprudence de la cour de cassation.

La Tribune : Cette décision protège-t-elle la banque de poursuites au civil par des salariés ou actionnaires ?

Oui. Il n'y aura pas d'action civile en France, mais seulement une responsabilité de M. Kerviel, pleine et entière.

Caroline Guillaumin, directrice de la communication du groupe Société Générale :

Ce verdict est parfaitement cohérent avec l'enquête, l'ordonnance de renvoi et les 3 semaines de procès. La Société Générale est satisfaite que la responsabilité de Jérôme Kerviel soit reconnue dans cette affaire.

La Tribune : Mais le dossier n'est pas vraiment refermé puisqu'il y aura un procès en appel...

Bien sûr, il y aura appel, mais au-delà de cela, le jugement, qui est extrêmement détaillé, démontre la culpabilité exclusive de Jérôme Kerviel. Bien sûr que la banque avait des responsabilités dans cette affaire, mais elle les a reconnues, et elle a été condamnée pour ces responsabilités, et aujourd'hui il est temps que Jérôme Kerviel soit aussi condamné pour ce qu'il a fait.

La Tribune : Le tribunal a aussi reconnu le préjudice moral des salariés de la Société Générale, est-ce important à vos yeux ?

C'est très important. On a beaucoup passé sous silence le préjudice moral et le traumatisme qu'a causé cette affaire pour les salariés. Il ne faut pas oublier qu'à l'époque, et notamment dans la banque de détail, nos équipes étaient insultées tous les jours. On en voit encore aujourd'hui les séquelles, avec des salariés qui sont totalement traumatisés par cette affaire, et le procès a d'une certaine façon ravivé ce traumatisme chez certains. Ce jugement démontre qu'il y a eu préjudice pour les salariés, et il va nous aider à tourner la page.

Maître Richard, qui était, avec Maître Valeanu, l'avocat des salariés qui s'étaient constitués partie civile, et qui ont obtenu la reconnaissance de leur préjudice moral et 2500 euros de dommages (+ 1500 euros au titre des frais d'avocats) :

Maître Richard : Pour nous, c'est une victoire car jusqu'à présent la jurisprudence considérait que l'entreprise était seule capable de représenter ses salariés et ses actionnaire. Ce jugement est totalement innovant, parce que comme nous l'avions demandé, le tribunal a retenu le fait que les salariés avaient éprouvé un préjudice propre. Bien évidemment, nous souhaitions qu'il retienne aussi le préjudice financier lié à la perte de leurs avoirs sur leur fonds d'épargne entreprise, mais c'est quand même une belle victoire.

Gérard Longuet, président du groupe UMP au Sénat :

Ce dernier a,  de son côté, estimé sur la chaîne LCI (ce mercredi) "un peu ridicules" la condamnation à 4,9 milliards d'euros de dommages et intérêts. Selon lui, la banque a également "très largement failli" et  il a jugé "un petit peu étonnant qu'un homme seul porte la seule et l'exclusive responsabilité", des pertes de la Société Générale.

François Bayrou, président du MoDem :

François Bayrou a qualifié mardi d'"infiniment troublant" le jugement du tribunal correctionnel de Paris. "Je sais bien que la tradition est de ne pas commenter les décisions de justice. Mais ici, on a affaire à un jugement qui est infiniment troublant", a estimé auprès de l'AFP l'ex-candidat à la présidentielle. "Ce jeune trader, Jérôme Kerviel , est condamné à une importante peine de prison mais plus encore à la somme extravagante de 4,9 milliards d'euros de dommages et intérêts, un montant évidemment hors de portée de qui que ce soit par son travail ou ses efforts".

Maître Olivier Metzner, avocat de Jérôme Kerviel :

"Bien évidemment, dès aujourd'hui, nous allons interjeter appel de ce jugement inacceptable par son caractère totalement excessif. C'est un jugement totalement déraisonnable qui dit qu'une banque n'est responsable de rien, pas responsable d'une créature qu'elle a fabriquée, que seul Jérôme Kerviel est responsable des excès, des crises d'un système bancaire".

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