Société Générale plonge en Bourse pour excès de prudence

La présentation du nouveau plan stratégique à trois ans de la Société Générale a déçu les marchés. Le cours de l’action décroche de plus de 10 %, dans un marché baissier. Le nouveau directeur général, Slawomir Krupa, a voulu jouer la prudence face à une conjoncture qui se dégrade et miser sur la rentabilité plutôt que sur la croissance. À deux exceptions près, le leasing automobile, et surtout la banque en ligne Boursorama avec un nouvel objectif de 8 millions de clients d’ici 2026.
La banque vise une rentabilité sur fonds propres de 9 à 10 % en 2026.
La banque vise une rentabilité sur fonds propres de 9 à 10 % en 2026. (Crédits : Reuters)

« Une belle banque qui n'a pas de stratégie » : c'est ce que l'on disait déjà il y a vingt ans », lâche un ancien cadre de la banque passé à la concurrence. C'est dire si la stratégie est un problème ancien à la Société Générale. Comme si elle ne s'était jamais relevée de son échec sur Paribas en 1999.

C'est dire aussi si la présentation, à Londres, du nouveau plan stratégique à trois ans, par Slawomir Krupa, nouveau directeur général, nommé il y a quatre mois pour succéder au long règne de Frédéric Oudéa, était très attendue. Trop peut-être. La présentation a déçu, des objectifs sont revus à la baisse, notamment le taux de distribution des profits aux actionnaires, ramené à une fourchette comprise entre 40% et 50%. La réaction de la Bourse ne s'est pas fait attendre : le cours de l'action n'a cessé de glisser en matinée, jusqu'à moins 10% à midi.

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Redresser le cours de Bourse

Le cours de Bourse, c'est la faiblesse de la banque. Une banque pourtant connue pour son excellence sur les marchés, mais qui a toujours suscité une certaine méfiance des investisseurs : trop de déconvenues (Kerviel, crise de l'euro, pertes sur les dérivés, Russie...) et pas assez de capital pour rassurer. Au final, la banque affiche une forte décote en Bourse, avec une valorisation autour de 0,4 fois l'actif net contre 0,8 fois pour la moyenne européenne, et l'action est plus volatil (et attaquée par les vendeurs à découvert) pendant les périodes de turbulences, comme au printemps dernier lors de la crise bancaire aux Etats-Unis.

Réduire cette décote (et la volatilité) est clairement le mandat donné par le conseil d'administration à Slawomir Krupa. « La priorité numéro un est la création de valeur nette », a-t-il insisté devant un parterre d'analystes financiers. Mais le nouveau mantra de la banque, maintes fois répété par le directeur général, c'est bien de parvenir à construire une banque « robuste » ou « durable ». Ce qui se traduit par un objectif de ratio de solvabilité (CET1) de 13% à l'horizon 2026, après la prise en compte des nouvelles exigences en capital de Bâle 3.

Un modèle différent

Cela implique un modèle de développement « différent », moins porté sur la croissance, avec une approche conservatrice des risques, et donc des actifs pondérés. Du coup, la croissance des revenus sur la période 2022-2026 est ramenée entre 0 et 2% par an, dans un contexte économique qui s'annonce il est vrai moins porteur qu'en 2022. L'effort sera donc toujours porté sur la réduction des coûts, avec une économie brute de 1,7 milliard d'euros et l'objectif de ramener le coefficient d'exploitation à 60 % (contre 66,3% en 2022).

Le portefeuille d'activités sera également revu à l'aune de nouveaux critères de rentabilité et la sortie de certains métiers sont à prévoir. C'est déjà le cas dans un certain nombre de pays africains. Selon la presse, la conservation titres serait également en vente. « Cela ne sert à rien d'opérer une multitude d'activités avec un rendement moyen », avance le directeur général.

Au total, les engagements apparaissent moins ambitieux que prévu. « Nous sommes négativement surpris par l'absence de croissance du chiffre d'affaires, par l'augmentation de l'objectif de capital, par la réduction du taux de distribution des résultats, la baisse de l'objectif rentabilité, et globalement par l'absence de détails », souligne, sévère, une note du courtier Jefferies (pourtant très positif sur la valeur) ce matin à la publication du communiqué.

« C'est comme si la banque en gardait sous le pied pour préparer l'après 2026 », réagit un analyste financier. « Les promesses sont une chose mais c'est bien ce que l'on délivre qui compte », justifie Slawomir Krupa qui rappelle que le cycle économique est en train de se retourner.

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Boursorama vise 8 millions de clients

Les deux seules activités qui vont bénéficier d'une allocation en capital supplémentaire sont le leasing automobile - un marché sur lequel la banque est désormais un leader incontesté après l'intégration de LeasePlan - et, c'est plus surprenant, la banque en ligne Boursorama.

Après l'acquisition partielle du fonds de commerce d'ING Direct, Boursorama était face à un dilemme stratégique : arrêter la croissance à 5 millions comme prévu et commencer à récolter les profits dès 2024 ou poursuivre une stratégie de croissance forcément coûteuse et remettre les profits à 2026.

La réponse a été claire : Boursorama continue sur sa lancée avec un nouvel objectif fixé à 8 millions de clients. « Boursorama est un actif qui nous distingue sur le marché français et qui est déjà rentable, hors coûts d'acquisitions [ces derniers auraient réduit de 250 à 150 euros par client, NDLR]. Mais cinq millions de clients ne sont clairement plus suffisants pour installer durablement une franchise. C'est de notre responsabilité de viser plus haut », explique le directeur général en réponse à des questions d'analystes.

« Nous devons changer », a reconnu Slawomir Krupa qui s'inscrit résolument dans la durée. Le changement passe pour l'heure par une certaine humilité. Comme pour conjurer le sort. « Nous sommes convaincus que c'est le bon plan pour Société Générale », clame ainsi le dirigeant, forcément inflexible face à la baisse du titre.

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Commentaires 2
à écrit le 19/09/2023 à 8:39
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mais quelle idée de nommer un responsable dont le nom esr "slave à vomir"

le 19/09/2023 à 10:20
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@roger Bernos: Le seul à oser affronter le fantôme de Kerviel.

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