Aéronautique : le sauvetage des souffleries de Modane de l'Onera a réussi

Les travaux d'urgence se sont achevés la semaine dernière. Ils ont empêché un nouvel affaissement de la soufflerie S1 de Modane (Savoie) cet été qui aurait pu être fatal à cet outil unique pour la recherche aérospatiale. Une deuxième phase va débuter en octobre. Elle visera à pérenniser la consolidation de la structure.
Fabrice Gliszczynski

Les souffleries aéronautiques de Modane (Savoie) de l'Onera, ce joyau stratégique pour l'industrie aérospatiale française que nous envie le monde entier, sont bel et bien sauvées.

"Modane va bien", s'est félicité ce jeudi Bruno Sainjon, le directeur de l'Onera, lors de la cérémonie des 70 ans du centre de recherche aérospatiale français.

20 millions d'euros d'aide exceptionnelle

Menacée d'effondrement, dès cet été, en raison d'un enfoncement continu depuis sa création après la deuxième guerre mondiale qui s'est accéléré en 2014, la soufflerie S1 de Modane, la plus grande du monde, restera debout. Cela semblait une évidence quand le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a donné son feu vert en mars à une aide exceptionnelle de 20 millions d'euros pour réaliser les travaux nécessaires à leur consolidation. Encore fallait-il les mener à temps et les réussir. Il y avait urgence.

"Un enfoncement supplémentaire de 10 millimètres et la soufflerie pouvait s'écrouler", a rappelé Patrick Wagner, le directeur des grands moyens techniques à l'Onera.

Ce qui signifiait leur arrêt de mort. Personne n'aurait en effet déboursé les 700 à 850 millions d'euros nécessaires à sa reconstruction.

"Au printemps dernier, nous étions très inquiets. Si nous ne faisions rien cet été, la soufflerie risquait de s'effondrer", a expliqué Patrick Wagner.

Avec la fonte des neiges dans les Alpes, l'écoulement des eaux pouvait en effet accentuer la détérioration des sols et l'enfoncement de ces derniers.

"La soufflerie et son bâtiment tiennent par 1.000 pieux de 70 mètres de haut, lesquels tiennent uniquement par frottements sur les alluvions. Des pieux s'enfonçaient et, à certains endroits, les murs de la soufflerie n'étaient plus soutenus. Il y avait des fissures et une menace d'effondrement total de ce bâtiment de 45 m de haut qui aurait rendu la soufflerie inutilisable", a précisé Patrick Wagner.

Les travaux d'urgence sont terminés

Il n'en fut rien. A peine les fonds du ministère de tutelle débloqués, les travaux ont commencé. L'Onera était dans les starting blocks. Le centre de recherche aérospatial avait déjà travaillé sur une solution et les travaux d'urgence d'un montant de 1 million d'euros) ont pu commencer immédiatement. Ils se sont achevés la semaine dernière par la finalisation d'une énorme dalle de 1,40 m d'épaisseur, 50 m de long, 40 de large, qui solidarise aujourd'hui l'ensemble des fondations qui étaient en train de s'effondrer. Résultat, aucun enfoncement supplémentaire du bâtiment qui abrite cette soufflerie n'a été constaté cet été. S'il peut certes encore s'enfoncer, les conséquences ne sont plus désormais aussi dramatiques fait valoir Patrick Wagner.

Diaporama | Dans les coulisses de la grande soufflerie de Modane

En octobre, débutera une phase beaucoup plus longue (trois ans) qui protègera de manière pérenne cette soufflerie. Le travail est titanesque puisqu'il vise à injecter 20.000 m3 de béton dans une zone située entre -25 et -50m sous le bâtiment pour bâtir une sorte d'immense socle qui reposera sur la roche, puis de  construire (entre ce socle et la dalle qui vient d'être achevée), près de 400 colonnes de 25 m de haut et de 1,20 de diamètre qui vont soutenir la soufflerie.

Hausse d'activité

Ce sauvetage s'accompagne d'une hausse d'activité après le point bas enregistré en 2015 (6-7 millions d'euros). En 2016, le niveau d'activité des grandes souffleries va doubler par rapport à 2015 mais cette performance reste inférieure de moitié au pic de 2011 (25-26 millions), a indiqué Patrick Wagner, précisant que "dans les années qui viennent. Le redémarrage va s'accélérer". Aujourd'hui, les clients étrangers  représentent environ 60% de l'activité.

Pour autant, s'il s'est réjouit du sauvetage de Modane, Bruno Sainjon n'a pas caché ses inquiétudes pour l'avenir.

"La part importante de clients non européens dans cette évolution positive la rend toutefois incertaine. Le niveau d'activité que l'on peut entrevoir à l'horizon du tournant de la décennie est toutefois nettement insuffisant pour permettre l'équilibre économique d'un parc de souffleries qui a pourtant été déclaré stratégique par l'ensemble des acteurs concernés. L'Onera ne peut assumer seul cette charge. Or, le passé a démontré le bénéfice spectaculaire que notre pays retire de ces installations uniques. Elles sont indispensable pour préparer dès à présent les ruptures technologiques de demain. Nous sommes au premier rang mondial dans ce domaine et entendons bien y rester. Sinon l'innovation dans ce domaine se passera sur d'autres continents que le nôtre".

Le délégué général pour l'armement de la DGA (direction générale de l'armement), Laurent Collet-Billon a confirmé le rôle stratégique et de souveraineté de l'Onera et a précisé qu'un contrat d'objectifs réalisé en commun pour la période 2017-2021 sera finalisé d'ici à la fin de l'année.

"Ce contrat donnera un cadre stratégique en tenant compte de quelques contraintes budgétaires. Il réaffirmera notre soutien et prévoira une pérennisation de la subvention de 105 millions par an avec la perspective d'une augmentation à partir de 2020", a-t-il indiqué.

Pour rappel, elle était de 123,9 millions en 2010.

Fabrice Gliszczynski

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 24/10/2016 à 13:49
Signaler
Oui, probablement encore une histoire de danseuses... mais ces 100 millions sont peu de chose à côté des 6 milliards de gabegie de la dernière salle de concert philharmonique de la porte de pantin (le 13ém ou le 14ém de Paris...). Peut-être pourrait-...

à écrit le 20/09/2016 à 11:21
Signaler
105 millions d'euros de subventions pour un CA de 10 millions ! Y a que l'armée pour s'offrir des danseuses comme ça !

à écrit le 20/09/2016 à 9:52
Signaler
Quelle satisfaction d'apprendre que le site est sauve. Serait-ce le commencement d'une prise de conscience de l'importance de sauver certains sites strategiques du territoire national de la part des "decideurs" ? La France des annees 50/60 de retour...

à écrit le 19/09/2016 à 14:06
Signaler
Merci aux journalistes de La Tribune de nous permettre de suivre ce sujet !

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.