Azur Drones : un nouveau décollage qui tient la route

Le leader mondial de la chimie BASF a choisi le drone autonome Skeyetech d’Azur Drones pour renforcer la sécurité d'un de ses sites. Un nouveau succès commercial important pour cette TPE bordelaise, qui illustre sa nouvelle stratégie de se recentrer sur les drones autonomes dans la surveillance des sites industriels et critiques.
Michel Cabirol
Skeyetech est un système aérien autonome conçu par Azur Drones, pour renforcer la sécurité et soutenir les opérations sur les sites sensibles (ici un site du chimiste BASF). Entièrement autonomes, ces drones peuvent être envoyés rapidement, d’un simple clic, dans n’importe quelle zone, même difficile d’accès, pour effectuer des contrôles spécifiques, des patrouilles de sécurité, des inspections ou des actions spéciales.
Skeyetech est un système aérien autonome conçu par Azur Drones, pour renforcer la sécurité et soutenir les opérations sur les sites sensibles (ici un site du chimiste BASF). Entièrement autonomes, ces drones peuvent être envoyés rapidement, d’un simple clic, dans n’importe quelle zone, même difficile d’accès, pour effectuer des contrôles spécifiques, des patrouilles de sécurité, des inspections ou des actions spéciales. (Crédits : Azur Drones)

Après plusieurs années de tâtonnements stratégiques, Azur Drones semble avoir enfin trouvé les clés d'un décollage industriel pérenne. Depuis la mise en service du drone autonome Skeyetech autorisé à voler début 2019 par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) début 2019, la société de Mérignac vole de succès de succès sur le plan commercial, comme en témoigne le contrat signé début juin avec le leader mondial de la chimie, l'allemand BASF. "Depuis 2019, nous avons fait passer le message à nos clients potentiels que nous avions une solution opérationnelle prête à être déployée de façon immédiate et une organisation sur laquelle ils pouvaient compter", explique le directeur général d'Azur Drones Nicolas Billecocq dans un entretien avec La Tribune. Le drone Skeyetech est principalement aujourd'hui utilisé pour des missions de levées de doutes, des rondes périmétriques ou des missions d'inspection sur des sites sensibles.

Résultat, de grands noms de l'industrie mondiale (BASF, Orano, TotalEnergies, Oiltanking, ArcelorMittal... et d'autres plus discrets) mais aussi la police de Dubaï sont venus ces deux dernières années gonfler le carnet de commandes du spécialiste du drone autonome, qui revendique le leadership européen dans le domaine. "Le drone autonome Skeyetech est entré en service fin 2019 mais a réellement pris son essor en 2020, puis 2021. Aujourd'hui, c'est l'activité principale d'Azur Drones. Elle ne cesse de doubler en volume tous les ans", précise Nicolas Billecocq, qui a débarqué en mai 2019 chez Azur Drones après avoir passé une vingtaine d'années chez Safran.

"Nous sommes ravis de pouvoir proposer une offre française et européenne souveraine comme alternative à des solutions qui, souvent dans le monde du drone, sont développées par la Chine, les Etats-Unis et Israël", souligne-t-il.

De nouvelles grandes ambitions

Aujourd'hui, la TPE lancée en 2012 est redevenue ambitieuse, très ambitieuse après avoir recentré ses activités sur la fabrication du drone autonome Skeyetech, qui a été racheté en 2017 à la société éponyme. Azur Drones a pris la décision de se concentrer essentiellement sur le marché professionnel de la sécurisation de sites industriels et de sites sensibles. Après un trou d'air en 2020 (724.000 euros de chiffre d'affaires, contre 1,9 million et 3,2 millions d'euros en 2019 et 2018) en raison de la crise générée par le Covid-19 et surtout de la vente de ses activités de distribution, Azur Drones est depuis 2021 "au début de la courbe de croissance", assure Nicolas Billecocq. Et il précise que la société bordelaise est sur "une croissance de 100 % par an sur cette activité". Pour autant, Azur Drones ne retrouvera ce volume de chiffre d'affaires que dans les prochaines années.

Une période qui rappelle celle après le rachat de Skeyetech où Azur Drones soulignait qu'elle avait franchi la barre des 4,5 millions de chiffre d'affaires en 2017 et visait plus de 10 millions de chiffre d'affaires en 2018. Des ambitions qui s'étaient fracassées sur plusieurs réalités, notamment réglementaire pour les vols de drones "hors vue", qui ont mis du temps à être autorisé par les autorités aériennes. Azur Drones n'a reçu que début 2019 la première autorisation de la DGAC pour un système de drone opérant de façon complètement automatisée. Les drones Skeyetech pouvaient enfin voler en France au-dessus de sites privés, hors vue directe, de jour comme de nuit, en agglomération, sous la simple supervision d'un agent de sécurité, autorisé à déclencher des missions de levées de doutes ou des rondes préprogrammées. En janvier, Azur Drones a également obtenu une autorisation opérationnelle des autorités de l'aviation civile allemandes pour son système Skeyetech. D'où la signature du contrat avec BASF. Ce qui n'est pas encore le cas aux Etats-Unis, où la réglementation reste encore très contraignante empêchant le marché de se développer.

"Le vol hors vue, donc sans que personne ne surveille le drone, n'est pas autorisé ou alors avec des contraintes très importantes aux Etats-Unis, là où dans nos cas d'emploi, au-dessus d'un site "périmétré" et à faible altitude, nous pouvons faire voler "hors vue" des drones autonomes en Europe", confirme le directeur général d'Azur Drones.

Un soutien sans faille de l'actionnaire principal

En dépit d'une période compliquée pour la société, qui a passé beaucoup de temps à réaliser des démonstrations pour convaincre de la sûreté de Skeyetech, Azur Drones a toujours été très fermement soutenu par son actionnaire majoritaire, Georges Gaspard (Lyreco, géant européen des fournitures de bureau), qui souhaite rester discret, comme le rappelle une nouvelle fois Nicolas Billecocq. La société bordelaise a d'ailleurs réussi à lever depuis sa création 38 millions d'euros, dont 8 millions en janvier 2022. Des levées de fonds auxquelles Georges Gaspard a largement pris part. Non seulement Azur Drones possède un outil technologique, qui séduit des grands noms de l'industrie mondiale, mais il peut s'appuyer sur un actionnaire qui lui donne une visibilité sur le long terme. De quoi rassurer tous les grands groupes industriels accrochés commercialement par Azur Drones et qui ont en général des visions de long terme et aiment en outre la stabilité.

"Azur Drones a cette chance d'être soutenu dans sa vision et sa stratégie sur le long terme. C'est ce qui nous permet également de nous afficher, nous, comme un acteur de long terme et un acteur crédible qui a vraiment franchi toutes les étapes et qui est maintenant dans le déploiement opérationnel chez nos clients", confirme le directeur général de la TPE bordelaise.

Cette nouvelle phase de croissance va-t-elle permettre à Azur Drones d'être rapidement à l'équilibre (perte de 5 millions en 2020) ? "Nous sommes plus soucieux de développer notre base de clients et de continuer à investir dans le déploiement commercial à ce stade que d'aboutir à l'équilibre financier", répond Nicolas Billecocq. Ainsi, Azur Drones, qui emploie actuellement 65 personnes, va lancer une campagne de recrutement pour une quinzaine de postes supplémentaires principalement dans le domaine commercial, les opérations clients, le support clients et le développement d'applications. "Nos recrutements traduisent très exactement toute notre stratégie : on a notre produit, on le déploie, on supporte nos clients pour la phase qui arrive et qui va générer beaucoup de croissance", estime-t-il. Un pari qui pourrait cette fois-ci réussir lorsqu'on voit la qualité et la profondeur des besoins des clients d'Azur Drones.

En outre, Azur Drones compte continuer à investir dans cette phase de croissance pour rester à la pointe des évolutions réglementaires et technologiques ainsi que saisir les opportunités de développement de nouveaux usages qui sont encore très importantes. "Des investissements qui seront dans le temps soutenus par des revenus récurrents de tous nos clients, souligne le directeur général d'Azur Drones. Nous allons continuer à être ambitieux dans nos investissements pour prendre de plus en plus de marchés. C'est plutôt notre démarche".

Des gisements de croissance

Azur Drones semble posséder un réservoir de croissance important. La TPE a notamment signé en novembre 2021 un accord-cadre avec TotalEnergies, convaincu de la valeur ajoutée de sa solution Skeyetech. Après avoir déployé un premier système sur le site de Feyzin en 2020, l'énergéticien a décidé de renouveler sa confiance et a conclu avec Azur Drones un accord cadre généralisant la mise à disposition de Skeyetech à l'ensemble de ses sites. La société souhaite légitimement généraliser ce type de contrat permettant des déploiements plus larges de ses systèmes. "Nous discutons notamment avec ArcelorMittal et Orano de déploiement plus large. Nous commençons déjà aussi à en discuter avec BASF", affirme Nicolas Billecocq. En outre, plus le parc de Skeyetech en service s'agrandira, plus Azur Drones multipliera des revenus récurrents dans le cadre du maintien en condition opérationnelle (MCO) des drones. Des revenus en général beaucoup plus lucratifs... à l'image du modèle développé chez Safran.

Azur Drones est également très tenté par les marchés institutionnels. Il a déjà signé un contrat avec la police de Dubaï. Il est également présent dans la surveillance des sites et des bases du ministère des Armées. Un marché qui ne représente actuellement que seulement "10% environ de son activité", constate le directeur général. "Nous adressons les marchés militaires avec notre offre actuelle à partir de Skeyetech, qui répond aux besoins de sécurité et de surveillance des sites militaires de manière générale", précise-t-il. Il confirme d'ailleurs un "intérêt grandissant des armées pour s'équiper des systèmes pour la surveillance de leurs bases, mais qui par ricochet accroît les capacités des forces".

Par ailleurs, Azur Drones souhaite se diversifier dans les applications proposées par ses drones aujourd'hui cantonnés principalement sur des missions de surveillance. "Nous discutons avec nos clients pour rajouter de nouveaux cas d'usage pour rentabiliser la flotte des drones sur un site", fait observer le directeur général d'Azur Drones. Ainsi la société bordelaise s'est associée en septembre 2021 à AVNIR Energy, spécialiste de l'ingénierie pour le domaine de l'énergie nucléaire, afin de développer la première solution aérienne autonome de détection de radioactivité. Cette innovation est destinée d'une part au contrôle environnemental des sites nucléaires et d'autre part à leur sûreté en France comme à l'international. "Une fois que le drone est disponible sur site, en plus de ses missions de base associées à la sécurité du site, il est en capacité d'aller capter d'autres données, précise-t-il. C'est vraiment intéressant parce que nous développons avec nos clients dans le temps et en fonction de ses usages spécifiques de nouveaux cas d'usage. Cela a beaucoup de sens d'avoir un drone disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7".

Enfin, au fur et à mesure des évolutions de la réglementation, qui déverrouillent les contraintes de vols des drones, Azur Drones pourra déployer ses systèmes comme en février 2021 avec les premières autorisations de vol de drones autonomes dans les pays de l'Europe du Nord. Dernièrement, l'Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne (AESA) a accordé à Azur Drones une autorisation pour pouvoir opérer sur des sites à proximité de zones aéroportuaires ou de zones à forte densité. "Nous avons obtenu ces autorisations complémentaires. ce qui nous permet de rajouter des sites sur lesquels nous pouvons opérer nos systèmes. Et on va continuer", souligne Nicolas Billecocq. Azur Drones a d'ailleurs "tout un plan de développement avec l'AESA pour continuer à accroître des autorisations qui vont élargir le nombre de sites éligibles pour faire voler un drone Skeyetech". Pour Azur Drones, il n'y a plus qu'à piloter avec justesse sa croissance pour devenir un géant de l'industrie du drone.

Michel Cabirol

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Commentaire 1
à écrit le 11/06/2022 à 4:14
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Si c'est une bonne société qui peut faire de l'ombre au pré carré américains/Israelien elle sera rachetée ou détruite ou autre possibilité aussi ,lors d'un voyage le PDG sera arrêté ,estradé puis apres un jugement foireux mis dans une prison américa...

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