A quelques semaines de la Présidentielle et alors que le maintien du pouvoir d'achat devient une question pour le moins explosive, le gouvernement, encore marqué par les Gilets jaunes, veut à tout prix éviter une nouvelle fronde sociale. Mais la tâche risque d'être ardue : depuis plusieurs mois, il doit composer avec une flambée historique des tarifs du gaz et de l'électricité, ainsi qu'une envolée des prix du carburant à la pompe, dans le sillage de la hausse record des cours du pétrole. Une « bombe énergie » qui devient incontrôlable, et promet de peser lourd sur les résultats du scrutin.
Impact sur le budget des Français
Et pour cause, selon un baromètre publié ce vendredi par Harris Interactive et commandé par le gestionnaire du réseau de transport gazier Téréga, la crise a « fragilisé » la vision qu'ont les citoyens du secteur de l'énergie dans l'Hexagone.
Concrètement, neuf Français sur dix la considèrent désormais comme « chère pour les particuliers », contre huit sur dix selon la même étude menée l'année dernière. 92% de la population interrogée partage ainsi « le sentiment que le coût de l'énergie a augmenté en 2021 », et 3/4 des répondants pensent même qu'ils devront « restreindre d'autres dépenses » pour pouvoir régler leurs factures d'électricité, de gaz ou de carburant.
« Les Français n'ont plus du tout le même regard sur la question. L'enquête a été réalisée du 27 au 31 janvier, et alors que la hausse des prix a beaucoup attiré l'attention ces derniers temps, on sent le poids très lourd de ce contexte sur les résultats », commente Morgane Hauser, Chef de groupe au Département politique - opinion chez Harris Interactive.
Une issue incertaine
Surtout, les répondants s'avèrent peu optimistes sur l'avenir : près de 90% d'entre eux « anticipent une nouvelle augmentation » de leurs dépenses dans le secteur d'ici aux prochains mois.
Il faut dire que l'Insee table désormais sur une hausse de l'inflation comprise entre 3 et 3,5% jusqu'en juin. Et les économistes prévoient déjà un recul du pouvoir d'achat au cours du premier semestre 2022 d'environ 0,5%, soulignent-ils dans leur note de conjoncture de décembre. D'un épisode « conjoncturel », comme le martelait l'exécutif à l'automne dernier, force est de constater que la crise s'est changée en une poussée plus structurelle, dont l'issue reste incertaine.
Multiplication des mesures d'urgence
A cet égard, les Français se montrent très critiques envers l'action du gouvernement pour contenir la hausse des prix : plus de 2/3 d'entre eux estiment que l'Etat « n'agit pas assez pour garantir des tarifs accessibles en ce qui concerne l'énergie pour les particuliers », révèle en effet le baromètre.
Et pourtant, l'exécutif a multiplié les dispositifs d'urgence ces derniers mois. Chèques énergie et inflation, bouclier tarifaire sur le gaz, baisse de la principale taxe sur l'électricité (TICFE), indemnité kilométrique ou encore relèvement du plafond de l'ARENH, soit le volume d'électricité qu'EDF devra vendre à prix cassés à ses concurrents : la liste des mesures portées par le gouvernement pour faire face à cette situation exceptionnelle n'a cessé de s'allonger.
Et cette stratégie semble d'ailleurs porter ses fruits, puisque le gel des tarifs du gaz et de l'électricité a permis de limiter l'inflation en-dessous de 4%, selon les derniers chiffres de l'Insee.
Remise en cause structurelle
Mais cela ne suffit pas : les Français regrettent le manque de mesures plus structurelles, au-delà d'une action sur le court terme. 62% d'entre eux jugent notamment que le pays n'en fait pas assez pour « développer la recherche et les nouvelles énergies », 63% qu'il n'investit « pas assez dans les énergies renouvelables », et 60% qu'il « n'encourage pas assez la rénovation des bâtiments », qui demeurent trop souvent des passoires énergétiques.
« Le fait que l'Etat n'en fait pas assez domine dans tous les items, du développement des transports en commun à la recherche, alors que la tendance était différente l'an dernier. En fait, la crise a renforcé la vision globale qui est qu'on peut faire mieux », précise Morgane Hauser.
Résultat : aujourd'hui, les citoyens s'avèrent « moins optimistes » sur la capacité réelle de la France à opérer une transition énergétique complète d'ici à 2050, même s'ils en restent toujours majoritairement convaincus. La baisse la plus nette concerne la décarbonation de l'alimentation des logements des particuliers (chauffage, eau chaude...) : 58% des répondants y croient toujours, contre 10 points de plus l'année dernière. Même constat sur la transformation des véhicules pour les particuliers, qui ne convainc plus 59% des Français, contre 67% début 2021.
Sujets les + commentés