Rencontre avec François-Eudes Ruchon, responsable marketing chez Sylfen, pour en savoir plus sur ce procédé révolutionnaire.

La Tribune de l'énergie : Comment fonctionne le concept Smart hub energy ?

François-Eudes Ruchon : Il s'agit d'un système de stockage et de cogénération d'énergie pour les bâtiments à énergie positive, c'est-à-dire qui produisent de l'énergie. Notre solution concerne plutôt de grands bâtiments (à partir de 1 000 m²), résidentiels ou commerciaux, que des maisons individuelles pour lesquelles elle n'est pas vraiment adaptée. L'idée est d'offrir une alternative à la réinjection de l'électricité dans le réseau, avec un intérêt double. Le premier pour les propriétaires des bâtiments, qui ne bénéficient pour l'instant pas de tarifs de rachat intéressants. Le second pour les opérateurs de réseau, car cette réinjection entraîne des difficultés, notamment en termes de sécurité. Avec Smart hub energy, après autoconsommation bien sûr, l'électricité en surplus est stockée directement sur place, afin d'être utilisée lorsque le bâtiment ne produit pas suffisamment d'électricité, par exemple la nuit ou en hiver.

LTDE : Pour quelle technologie avez-vous opté ?

F.-E.R. : Notre système est hybride. Il fonctionne avec des batteries, mais c'est grâce à l'hydrogène que nous parvenons à ce résultat novateur. Le principe de Smart hub energy repose sur une technologie de rupture, développée par le CEA de Grenoble. Nous l'appelons processeur d'énergie. Il a trois fonctions distinctes. Il peut fonctionner comme électrolyseur, c'est-à-dire qu'il permet de produire de l'hydrogène à partir de l'électrolyse de l'eau. Il peut ensuite utiliser cet hydrogène pour produire de l'électricité et de la chaleur, en mode pile à combustible. Et si les réserves d'hydrogène sont épuisées, ce processeur d'énergie prévoit un recours au gaz naturel pour produire de l'électricité et compenser le manque d'énergie tirée du photovoltaïque. Tout ce système apporte de la flexibilité et des possibilités d'arbitrages d'approvisionnement, tout en évitant une rupture énergétique.

LTDE : Votre système a-t-il pour vocation de développer les alternatives off-grid ?

F.-E.R. : D'une certaine façon, Smart hub energy incite les bâtiments équipés à ne plus avoir recours au réseau. Pour autant, ce n'est pas du tout notre objectif. Nous ne cherchons pas à couper les consommateurs des réseaux, au contraire. Notre idée est d'optimiser -économiquement parlant- les capacités de production d'énergies renouvelables, tout en préservant l'environnement. Vouloir atteindre l'autarcie énergétique nécessite un surinvestissement, qui n'est donc pas très rentable. Nous pensons que 85, 90, peut-être 95% d'autonomie énergétique est suffisant, et en même temps vertueux d'un point de vue économique et environnemental. L'énergie manquante pourra soit être complétée par le gaz naturel, comme je le disais, soit par un recours au réseau, dans l'idéal aux heures creuses.

LTDE : Votre solution est actuellement en phase de test. Quand sera-t-elle opérationnelle ?

F.-E.R. : Nous avons en effet installé plusieurs unités, dans des conditions réelles d'exploitation, afin de valider le design industriel et le modèle d'affaire. Nous prévoyons une commercialisation en 2021. Nous aurons alors un produit avec des garanties. Selon nos projections, et avec les prix actuels de l'électricité en France, le retour sur investissement se ferait en moyenne sur 10 à 15 ans. En Allemagne, où l'électricité est plus chère, on a des temps de retour sur investissements autour de 7 ou 8 ans. Pour autant, nos tests font sans cesse évoluer notre analyse, certains bâtiments se révélant plus rapides à rentabiliser que d'autres. Nous essayons de balayer très large sur l'usage final, afin de parvenir à une stratégie de déploiement commercial solide pour le lancement en 2021.