Acquisitions de sociétés cotées : les nouveautés 2009

Par Luc Saucier, avocat aux barreaux de New-York et de Paris.

La crise que nous vivons a modifié la donne dans le monde des fusions acquisitions. Le nombre d?opérations a fortement diminué au cours du premier trimestre 2009. Les raisons en sont multiples ; à la difficulté de lever une dette, s?ajoutent les incertitudes quant à la durée de la crise pour les entreprises qui disposent de liquidités.

Comment seront structurées les prochaines prises de contrôle de sociétés cotées ?

Une première donnée : la crise de liquidité que nous traversons devrait perdurer en 2009. Dès lors comment acquérir une société lorsque l?on ne peut pas lever de dette ? Si la cible est cotée, l?Offre Publique d?Echange vient immédiatement à l?esprit. C?est d?ailleurs sous cet angle que certaines entreprises américaines regardent avec un certain appétit des sociétés françaises cotées qui sont manifestement sous évaluées et qui représentent un intérêt stratégique.

Attention, toutefois, une difficulté survient lorsque la société américaine n?est cotée qu?outre Atlantique ; l?OPE devra nécessairement contenir une option en numéraire. L?initiateur qui ne dispose pas de liquidités suffisantes ou qui ne peut pas lever de dette devra renoncer à son acquisition. Certes en cas d?acquisitions importantes, comme par exemple l?offre de Nyse sur Euronext, une solution avait consisté en une cotation des titres de l?initiateur sur un marché de la Communauté européenne (CE).

Il est vrai que lorsque les actions de l?initiateur sont cotées sur un marché de l?un des pays membres de la CE, l?option en numéraire n?est plus exigée. Mais le jeu n?en vaut pas la chandelle lorsque la cible est de petite taille. La nécessité d?offrir une option en numéraire aux actionnaires de la cible s?avère donc rédhibitoire pour un initiateur qui ne dispose que de peu de liquidités en période de crise. On peut s?interroger sur le bien fondé de cette règle édictée par le règlement général de l?AMF. Pourquoi une société cotée dont les titres seraient admis aux négociations sur un petit marché d?un Etat membre de la Communauté européenne offrirait-elle plus de protection (liquidité du titre, etc.) à l?actionnaire minoritaire qu?une cotation desdits titres sur le Nyse ?

Il faut veiller également à ne pas acheter de titres de la cible dans les douze mois qui précèdent le lancement de l?offre ou alors s?assurer à ce que le montant des acquisitions n?excède pas 5% du capital ou des droits de vote de la cible. Dans le cas contraire, une option en numéraire redevient obligatoire.

Parfois donc, l?offre publique d?échange n?est pas une solution parce que l?option en numéraire n?est pas acceptable pour l?initiateur. L?idée d?une fusion transfrontière est alors évoquée. Là aussi, un certain nombre d?écueils sont à éviter. Si la société absorbante se trouve à l?extérieur de la CE, la fusion sera considérée comme impliquant un transfert de siège de la société dans un pays hors CE : les conséquences fiscales d?une telle opération peuvent être redoutables.

Des difficultés sur le plan social, sur le plan du contrôle des concentrations ou encore sur celui des parités envisagées peuvent également compliquer la transaction. La prudence s?imposera donc avant de se lancer dans une telle opération alors même qu?elle s?avèrerait être la seule structure de prise de contrôle possible.

A supposer qu?une offre publique est possible, comment s?assurer de son succès ?

Conditionner le succès de l?offre à la réalisation d?un seuil élevé, de l?ordre de 66.67% devrait inciter les actionnaires qui ne souhaitent pas voir échouer l?offre à apporter leurs titres sans attendre la réouverture de l?offre en cas d?un éventuel succès. La possibilité de prévoir un seuil conditionnel en deçà duquel l?offre échoue n?est possible qu?en présence d?une offre publique volontaire. C?est pour cette raison que l?initiateur préfère parfois renoncer à l?acquisition d?un bloc d?actions qui aurait déclenché l?obligation de déposer une offre publique et exiger du vendeur un engagement d?apporter des titres à une offre conditionnelle qu?il viendrait à lancer volontairement.

En faisant ce choix, l?initiateur sera plus exposé à une offre publique concurrente. Lorsque l?initiateur doit à tout prix atteindre le seuil des 95% du capital et des droits de vote (possibilité de mettre en place la procédure de retrait obligatoire ou d?intégrer fiscalement la cible), il penchera pour l?offre publique conditionnelle. Si la possibilité d?une offre concurrente est élevée, l?acquisition d?un bloc peut constituer un avantage précieux dans une bataille boursière ultérieure.

Voici les quelques solutions qui s?esquissent lorsque les liquidités viennent à manquer et que les investisseurs deviennent plus frileux. Enfin, on notera que les LBO n?ont pas totalement disparu du paysage, des banques sont prêteuses et acceptent les ratios d?endettement intéressants lorsque les actifs vendus appartiennent à ces dernières?

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