Trois options pour sortir de la crise en Europe

Trois voies sont envisageables pour espérer sortir de la crise financière et bancaire : imposer aux banques de constater des pertes importantes, et les laisser se recapitaliser progressivement, à la faveur d'une croissance forte. Laisser tomber une partie du secteur financier. Ou enfin faire appel aux fonds publics.
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L'Europe doit faire face simultanément à une crise de la dette souveraine, à une crise bancaire et à une crise de l'euro. On entend de plus en plus d'appels à l'abandon de la souveraineté en matière de budget, à une recapitalisation spectaculaire d'un système bancaire vulnérable et/ou à l'exclusion de la Grèce et peut-être des autres membres en péril de la zone euro. Dans ce contexte périlleux, les responsables politiques utilisent désespérément différentes institutions, notamment la BCE, le FMI et le Fonds européen de stabilité financière (FESF), pour apaiser la panique et éviter la contagion et le risque de récession. Mais vont-ils dans la bonne direction ?

 

Beaucoup de banques européennes faiblement capitalisées seraient insolvables si leurs actifs étaient évalués instantanément par le marché, car elles détiennent en quantité de la dette souveraine des pays périphériques de la zone euro qui n'inspire guère confiance. Leur désendettement freine la reprise économique. Une reprise paneuropéenne et la réussite d'une consolidation budgétaire progressive permettraient à la dette souveraine de reprendre peu à peu de la valeur. En attendant, les manoeuvres vont continuer pour savoir qui va supporter les pertes, quand et comment. Les citoyens grecs ? Les contribuables allemands, français et hollandais ? Les détenteurs d'obligations ? Les actionnaires des institutions financières ? Le montant des pertes va dépendre de la réponse à cette question.

On peut envisager trois solutions pour résoudre la crise bancaire.

La première repose sur la durée et le profit, elle peut réussir si la croissance est assez forte. Selon nos estimations, une réduction de 50 % de la dette souveraine des pays périphériques (ce qui est raisonnable pour la Grèce, mais élevé pour les autres pays) entraînerait une perte d'environ 3.000 milliards de dollars, ce qui dépasse largement les possibilités des banques européennes. Mais dans le contexte actuel de taux d'intérêt faibles, les banques sont des entreprises profitables, car elles empruntent généralement à court terme et prêtent à plus long terme à un taux d'intérêt plus élevé. Jouer sur le temps pourrait leur permettre de se recapitaliser progressivement en réalisant des bénéfices ou en attirant des capitaux extérieurs. La plupart des dirigeants européens espèrent qu'une croissance forte permettra d'emprunter cette voie, possible si elle est combinée avec le recours aux fonds publics pour résoudre le problème de la dette souveraine. C'est la solution choisie par le gouvernement américain après le programme impopulaire de rachat des actifs toxiques (Tarp), qui a servi à injecter des centaines de milliards de dollars de fonds publics dans le système bancaire (la plus grande partie a été remboursée).

La deuxième solution consiste à faire le choix d'une résolution rapide de la crise. Il s'agirait d'éviter que les banques zombies n'infectent le système financier, si la reprise s'avère insuffisamment forte. Entre 1989 et 1995 la compagnie américaine RTC (Resolution Trust Corporation) a fermé rapidement un millier de banques et caisses d'épargne insolvables, de manière à ce qu'elles ne fassent pas tache d'huile sur les institutions saines. Rapportés à l'économie d'aujourd'hui, des actifs d'une valeur de 1.250 milliards de dollars ont été liquidés, ce qui a permis de récupérer 80% de leur valeur. Le système financier s'est rapidement redressé. Cette solution nécessite des qualités de jugement pour faire le tri entre les institutions solvables et les autres.

 

Enfin, il est possible de faire appel aux fonds publics. Si une recapitalisation sous les auspices du marché est trop lente et s'il est impossible de fermer les institutions les plus exposées, l'alternative extrême consiste à injecter des capitaux publics directement dans les banques (plutôt que de manière indirecte en soutenant la valeur de la dette souveraine qu'elles détiennent). Cette solution évite une panique bancaire, car avec davantage de capitaux, les banques sont plus solides. Mais à quelle hauteur faut-il recourir aux capitaux publics et à quelles conditions ? Il serait préférable de faire appel aux capitaux privés, mais comme ils risquent d'être balayés ultérieurement par une intervention de l'État, les investisseurs seront peut-être méfiants. Pendant ce temps, les régulateurs accroissent les exigences en matière de ratio de fonds propres des banques. Les Européens doivent résoudre simultanément les trois crises auxquelles ils sont confrontés (la crise bancaire, celles de l'euro et de la dette souveraine) et procéder aux réformes budgétaires nécessaires. Croire que les banques qui ont passé les modestes "stress tests" peuvent continuer à fonctionner longtemps sans dommages collatéraux est illusoire et dangereux.

© Project Syndicate 1995-2011

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Commentaire 1
à écrit le 17/12/2011 à 10:59
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l'alternative Promouvoir une sortie de crise par des solutions de re-capitalisations des banques avec l'argent des contribuables, il faut être soit payé par les banques soit par les états soit par les 2! Vous êtes comme ces médecins généralistes qu...

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