Comment concilier exploration spatiale et protection de l'environnement

OPINION. La protection de l'environnement passe nécessairement par une industrie spatiale à la fois performante et soucieuse de réduire son empreinte. Ce qu'elle fait déjà, selon Michel Messager qui regrette non seulement une forme de radicalité des ONG environnementales mais aussi l'absence de communication de l'industrie spatiale sur son savoir-faire. Par Michel Messager, président de Consul’Tours et expert en tourisme spatial.
Pour mener le combat de la préservation de l'environnement, « certes difficile, il nous faut une personnalité iconique qui rassemble et sache s'entourer, bien sûr d'experts, mais aussi de communicants et de « commerçants » qui sachent vendre le message » (Michel Messager).
Pour mener le combat de la préservation de l'environnement, « certes difficile, il nous faut une personnalité iconique qui rassemble et sache s'entourer, bien sûr d'experts, mais aussi de communicants et de « commerçants » qui sachent vendre le message » (Michel Messager). (Crédits : DR)

Actualité oblige, on écrit et on parle beaucoup sur les problèmes écologiques et l'avenir de notre planète. Cet été, pas un jour sans que soient évoqués les dégâts écologiques et environnementaux de l'industrie touristique : sur-tourisme, tourisme de masse, tourisme responsable, éco-tourisme... Il en va de même, bien qu'à un degré moindre du moins pour le moment, en ce qui concerne l'utilisation de l'espace par l'industrie spatiale. Alors, imaginez-vous lorsqu'on évoque le tourisme et le spatial !

Récemment, Robert Zubrin, fondateur de la Mars Society, dans un article publié le 30 mai 2023 dans le magazine en ligne Quillette, tire la sonnette d'alarme, alertant, dans son parlé vrai bien connu, du danger que ces « idéologies » pourraient avoir sur la progression de l'ingénierie spatiale : « La situation est grave non seulement pour la conquête spatiale mais pour l'avenir de l'humanité, car la pandémie woke est toujours en pleine progression, dans un environnement psychologique mou où la résistance est faible ».

Un exemple et une anecdote à propos de cette situation :
- Un groupe de défense de l'environnement radical vient de lancer une énième action en justice contre la FAA (Federal Aviation Administration). Ses membres, malgré les remontrances de la FAA, considèrent que l'agence n'a pas correctement évalué les dégâts écologiques provoqués par le dernier vol du Starship du 20 avril dernier. Ils demandent donc l'ouverture d'une nouvelle enquête plus poussée avec des critères encore plus stricts, retardant ainsi, une fois encore, le prochain vol de SpaceX.

- Une de mes interventions dans le cadre de la convention d'une grande entreprise vient d'être annulé au motif, que celle-ci ne serait pas la bienvenue compte tenu du profil de l'auditoire composé de jeunes cadres. Le responsable un peu gêné m'a en effet fait savoir : « bien que fort intéressante, votre intervention serait vue comme provocatrice par notre jeune auditoire. Ces derniers étant plus enclin à défendre l'environnement que de s'extasier sur les exploits spatiaux, synonymes à leurs yeux de pollution et de dégradation de l'environnement... »

Le spatial, une aide contre le réchauffement climatique

Il serait ridicule et de mauvaise foi que de contester qu'industrie spatiale et tourisme spatial ne posent pas de problème en matière d'écologie et d'environnement. Tout comme il serait tout aussi irresponsable, de ne pas prendre en compte le fait que ceux qui voyageront demain dans l'espace, seront majoritairement ceux de la génération des 18/30 ans, génération plus impliquée dans la protection de leur environnement que de la conquête spatiale.

Et pourtant, sans parler de ce que peut apporter l'industrie spatiale en termes de découvertes, que ce soit par exemple dans le domaine scientifique ou médical, jamais celle-ci n'a fait autant d'effort en matière d'environnement :

- Recherches et financement de fondations sur la protection sur l'environnement (Bezos EarthFund, Carbon War Room -CWR, la Musk Foundation...) ;

- Recherches de carburants moins polluants (Green Monergol, Trinitramide, Ecosene, Biopropane, Butanol...) ;

- Recherches sur des fusées moins polluantes (Fusées "autophages", projet SpinLaunch, projet Lignosat...)

- Recherches sur le nettoyage de l'espace (projet RemoveDebris, projet ClearSpace, projet Astroscale, projet SpaceBlower, projet FoamDebrisCatcher) ...

Et comme l'annonce le site CNET dans un remarquable article intitulé ''La révolution verte commence au sein de l'industrie spatiale'' : « le premier port spatial neutre en carbone au monde, le Sutherland Spaceport, est en cours de construction en Écosse... et l'Agence spatiale européenne a récemment commandé une étude intitulée ''Systèmes de transport et de lancement spatiaux ultra-verts''. Il s'agit certes d'une étude à long terme, mais on peut déjà la considérer comme un pas dans la bonne direction. »

Faire savoir

Certes si la « révolution verte au sein de l'industrie spatiale »' est indiscutable, encore faut-il le faire savoir ! C'est bien là tout le problème et précisément là où le bât blesse encore. En décembre 2021, 23 dirigeants de la filière spatiale française avaient souhaité expliquer dans La Tribune « à quoi sert l'espace au quotidien pour les citoyens », avec en autres signataires : Airbus, Defence and Space, Thales, Alenia Space, ArianeGroup, Dassault Aviation, Safran, Spaceable, Venture Orbital Système....  Depuis plus rien ou si peu !

Tout comme les compagnies aériennes qui sont en proie aux mêmes problématiques, mais avec encore plus d'intensité, il est donc plus que nécessaire que l'industrie spatiale non seulement continue ses actions pour réduire ses impacts sur l'environnement, mais surtout le fasse savoir et communique beaucoup plus et plus souvent qu'elle ne le fait, au niveau du grand public.

Pour notre part, nous sommes plus que jamais persuadés que pour l'industrie spatiale, la préservation environnementale est une nécessité, voire une obligation. Nous n'avons de cesse de le rappeler : « Ceux qui voyageront demain sont ceux de la génération des 18/30 ans, génération plus encline dans la protection de leur environnement que dans la conquête spatiale. Il faut donc les convaincre en COMMUNIQUANT plus, tout en répondant à leurs attentes ».

Pour mener ce combat, certes difficile, il nous faut une personnalité iconique qui rassemble et sache s'entourer, bien sûr d'experts, mais aussi de communicants et de « commerçants » qui sachent vendre le message. Si l'Europe se décide, enfin, à privilégier le vol habité, nous ne doutons pas qu'elle saura intégrer cette dimension. Du moins faut-il l'espérer...

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Commentaire 1
à écrit le 28/08/2023 à 8:36
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"une forme de radicalité des ONG environnementale" Le fameux lobby écolo ! Alors qu'ils ont intérêt à ce qu'ils s'opposent. Tiens d'ailleurs vous n'avez pas remarqué comme la planète est partout représentée dans les médias de masse ? Mais que fait la...

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