Canal Seine Nord : bataille de communication autour des chiffres

Alors que les appels à compétences et les enquêtes publiques commencent, le rapport de la Cour des comptes européenne sur les méga-projets de l'Union européenne paru en juin avait lancé un pavé dans le canal. L'association Seine-Nord Europe porteuse du projet a répondu point par point aux critiques.
Du point de vue financier, le budget du canal aurait également triplé entre temps, selon la Cour des comptes. D'un coût initial estimé à 1,6 milliard jusqu'à la dernière estimation de 4,9 milliards en 2019, « l'augmentation de coûts a été de 3,3 milliards d'euros, soit 199 % : c'est la plus conséquente hausse de notre échantillon », assène le rapport qui a pris soin de prendre toutes les mesures pour obtenir une comparaison utile à prix constant.
Du point de vue financier, le budget du canal aurait également triplé entre temps, selon la Cour des comptes. D'un coût initial estimé à 1,6 milliard jusqu'à la dernière estimation de 4,9 milliards en 2019, « l'augmentation de coûts a été de 3,3 milliards d'euros, soit 199 % : c'est la plus conséquente hausse de notre échantillon », assène le rapport qui a pris soin de prendre toutes les mesures pour obtenir une comparaison utile à prix constant. (Crédits : Reuters)

S'il y a un point qui a toujours fait débat, ce sont bien les prévisions de trafic attendu sur ce tronçon de Canal Seine Nord, reliant le bassin parisien au Nord de la France par voie fluviale (et plus précisément Compiègne à Aubencheul-au-Bac, sur très exactement 107 kilomètres). Ce chantier titanesque reçoit près de 2 milliards d'euros de la part de l'Union européenne.

Les premières études partaient du principe que le trafic sur l'axe serait quatre fois plus élevé en 2060, comparativement à la situation de 2030 sans canal, rappelle la Cour des comptes européenne. « Pour atteindre ce niveau, il faudrait donc que le fret de matériaux de construction soit multiplié par 4, passant de 2,3 millions de tonnes par an à 8,1 millions en l'espace de 30 ans suivant la mise en service. Et concomitamment, que le report du trafic routier se fasse massivement vers le fluvial et soit multiplié par 38 ou que la part des conteneurs soit trois plus élevée qu'elle ne l'est sur l'ensemble du Rhin actuellement ».

Vignette ou péage

L'association Canal Seine Nord avance que ces prévisions sont toujours cohérentes « avec le choc de compétitivité du grand gabarit : à l'heure actuelle 4 millions de tonnes de marchandises transitent aujourd'hui par le canal du Nord, avec une part modale fluviale d'environ 3 %. Les prévisions de trafic sont de l'ordre de 20 millions d'ici 2060 grâce à l'ouverture du canal Seine-Nord Europe. Cela ferait passer la part modale de la voie d'eau sur cet axe à 12 %, ce qui correspond au taux observé dans les territoires français desservis par la voie d'eau à grand gabarit. »

Ce report modal important pose quand même la question d'une « politique cohérente », à savoir d'une contrainte financière, type vignette ou péage. Là dessus, Cour des comptes et association Seine-Nord Europe tombent d'accord.

3,3 milliards en plus ?

Du point de vue financier, le budget du canal aurait également triplé entre temps, selon la Cour des comptes. D'un coût initial estimé à 1,6 milliard jusqu'à la dernière estimation de 4,9 milliards en 2019, « l'augmentation de coûts a été de 3,3 milliards d'euros, soit 199 % : c'est la plus conséquente hausse de notre échantillon », assène le rapport qui a pris soin de prendre toutes les mesures pour obtenir une comparaison utile à prix constant.

Réponse de l'association Canal Seine Nord Europe : « La CCE prend pour base de calcul le pré-chiffrage initial de 1993 (1,2 milliard). A cette date, le tracé et le gabarit du projet étaient bien différents. Si l'analyse avait pris comme point de comparaison le chiffrage au moment de la déclaration d'utilité publique (2006) sur la base des études d'avant-projet - comme elle l'a fait pour les autres méga-projets étudiés et comme le recommande dans ses réponses la Commission européenne -, elle aurait montré une évolution des coûts proches de l'inflation et classant Seine-Escaut parmi les projets ayant le mieux maîtrisé leurs budgets ».

Retards avec conséquences

D'après le rapport de la CCE, le chantier a pris beaucoup de retard : 18 ans au final. Ce qui n'a pas été sans conséquence : « 668,6 millions d'euros ont été retirés des dotations des deux dernières actions cofinancées, principalement en raison du long retard pris pour parvenir à un accord sur la construction du canal Seine-Nord Europe », précise le rapport.

L'association Seine-Nord Europe a rappelé qu'il n'a jamais été question, même pour elle, que le projet Seine-Nord Europe soit mis en service en 2002. « Il n'a d'ailleurs été retenu parmi les projets prioritaires de transport de la France que lors du CIADT (Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire) de 2003. Sa réalisation a été envisagée en 2009 via un contrat de partenariat finalement abandonné, et a ensuite fait l'objet de deux rapports de reconfiguration en 2013 et 2015. »

Livraison en 2030

Le Canal Seine Nord devrait quand même être opérationnel d'ici 2030, pour faire partie du grand réseau central de transport européen, comme le prévoit le règlement RTE-T. Le risque est quand même que toutes les infrastructures auxiliaires, permettant au canal de fonctionner à pleine capacité, ne soient pas terminées dans ce laps de temps. De toute façon, la Cour des comptes souligne elle même, parlant des autres méga-projets étudiés qu'il « est peu probable que la connectivité du réseau central de transport atteigne sa pleine capacité d'ici à 2030, ce qui signifie que le réseau de transport de l'UE ne sera pas en place et qu'il ne produira pas ses effets à cet horizon ».

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Commentaire 1
à écrit le 08/10/2020 à 21:15
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Facile. Il suffit de doubler les droits de péage autoroutier pour les poids lourds, ou mieux de remettre en vigueur l'écotaxe que les politiques ont lâchement abandonné devant la bronca de quelques bretons appuyés par des parlementaires irresponsabl...

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