C'est le projet de deux Gaulois lassés que le ciel asiatique leur tombe sur la tête. L'un est nantais, spécialisé dans le solaire résidentiel et tertiaire, l'autre, alsacien, positionné sur la construction de grandes centrales en ombrières, au sol ou en toiture. « Nous avons des valeurs communes, des tailles identiques et sommes complémentaires », argue François Guérin, Directeur général de CETIH (1) (1.300 personnes et un chiffre d'affaires de 210 millions euros), une ETI familiale de la région nantaise, spécialisée dans la fabrication de portes et fenêtres... qui a donné naissance à Systovi, devenue en dix ans un acteur clé du photovoltaïque résidentiel.
Dans le même temps, dans l'Est de la France, le fabricant de meubles en kit Alsapan (chiffre d'affaires de 236 millions euros), filiale du groupe Strub, se diversifiait pour créer Voltec Solar, concepteur et fabricant de modules photovoltaïques à faible impact environnemental pour des installations de grandes dimensions. Objectif : créer une société unique et accoucher d'un géant du photovoltaïque français dès 2021. « L'association Systovi-Voltec Solar permettrait de créer un effet d'échelle pour accompagner la compétitivité et la capacité d'innovation de la France sur le marché du solaire, au service d'une plus grande indépendance énergétique», explique Pierre Cantrelle, directeur général de Voltec Solar.
« Nous ne partons pas de zéro »
Baptisé Bélénos, en référence au dieu du soleil gaulois, popularisé (notamment) par Astérix, le projet porte l'ambition de produire 1GW de panneaux photovoltaïques par an. « Cette capacité de production permettrait de contribuer pour un quart à l'objectif fixé par la Programmation Pluriannuelle de l'Energie (PPE) qui vise une augmentation de production de 10GW actuellement, à 44GW à l'horizon 2028, soit l'installation de 4GW par an », rappellent les protagonistes du projet Belenos qui entendent peser significativement face à ce défi environnemental. « Dans la période post-Covid, où les réflexions ont questionné la résilience de nos économies, il est nécessaire de reprendre la main sur la souveraineté sur nos filières stratégiques dont l'énergie fait partie. Tout le monde est d'accord pour dire que, d'ici 30 ou 40 ans, 40% de l'énergie produite dans le monde sera d'origine solaire. On va donc assister à une forte montée en puissance portée par la croissance verte en Europe au cours des dix prochaines années. Dans ce contexte, nous avons une fenêtre de tir. Et nous ne partons pas de zéro. On est là, on existe, on a résisté, c'est à nous de construire ça. Alors, nous nous sommes dit, autant le faire ensemble », argumente François Guérin, Directeur général de CETIH.
Neuf mois pour lancer la production
Chacun des deux sites, nantais et alsacien, où aucune construction n'est nécessaire assurerait la production de 500 MW par an, selon leur savoir-faire et leur spécificité au regard des quatre marchés ciblés (ombrière, sol, toitures et résidentiel). « Des synergies vont être déployées pour la R&D, sur les aspects industriels et sur le réseau commercial », précise le directeur général de Voltec Solar (120 personnes). La R&D et les grands projets de centrales bas carbone seront plutôt concentrés à Dinsheim-sur-Bruche (Bas-Rhin) où Voltec Solar développe un vrai savoir-faire dans la réponse aux appels d'offres du Comité de Régulation de l'Energie (CRE), tandis que Carquefou, dans la banlieue de Nantes, accueillera les projets résidentiel, tertiaire ou lié à la petite industrie pour lesquels Systovi propose des systèmes innovants (films ultra léger, aérovoltaïque, stockage, monitoring, etc), désigné sur-mesure ou dotés de films ultra légers en cours de développement qui permettront de réduire par deux le poids en toiture. «On a juste à optimiser et accélérer. A partir du moment où l'on va appuyer sur le bouton go, neuf mois après on lancera la production », indique François Guérin.
Un troisième acteur
Pour ce projet, l'investissement consacré aux moyens industriels devrait atteindre 20 millions d'euros. Les dirigeants de ce futur géant du photovoltaïque, dont le statut juridique est en cours d'élaboration, pourraient accueillir un troisième acteur pour accompagner les besoins en fonds de roulement. L'activité devait rapidement engendrer la création de deux cents emplois et jusqu'à 500 personnes d'ici à trois ans. A l'horizon de cinq ans, le projet Bélénos, pourrait selon ses fondateurs, générer 250 millions d'euros de chiffre d'affaires. Pour y parvenir, le duo entend faire valoir ses critères de différenciation technologique. Car l'autre enjeu du projet Belenos, c'est de se battre pour que de nouvelles règles de marchés permettent de mettre en avant une approche décarbonée, des contenus locaux et être soutenu pour sortir de la simple logique de prix et du dumping chinois. « On réclame que l'éco-conception soit prise en compte dans les appels d'offres, que les bilans carbones intègrent la notion de transport. Et que le gouvernement, l'Europe et les collectivités territoriales se positionnent clairement sur les relocalisations », s'accordent Pierre Cantrelle et François Guérin.
(1) Compagnie des Equipements Techniques et Industriels pour L'Habitat.
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