Upcycling : le vendéen Atelier Unes lance des maillots de bain en filets de pêche

Atelier Unes veut bousculer les codes de l’industrie de la mode. Après les collants recyclés et consignés, la marque d’habillement éco-responsable et collaborative Atelier Unes lance des maillots de bain fabriqués avec d’anciens filets de pêche recyclés. L’entreprise vient de lever 400.000 euros pour, dit-elle, en finir avec la mode jetable.
Matthieu Jungfer et Violette Dedeban, cofondateurs de L'Atelier Unes
Matthieu Jungfer et Violette Dedeban, cofondateurs de L'Atelier Unes (Crédits : DR)

C'est la dernière création de l'Atelier Unes. Des maillots de bain pour femme fabriqués à partir de filets de pêche. Plus précisément, à partir d'un fil de nylon ECONYL® élaboré par la startup italienne Aquafil qui récolte les filets de pêche errants dans les océans et régénère cette matière première en une fibre recyclable à l'infini, selon le fabricant. C'est cette envie d'éco-conception, de durabilité, de recyclage pour « mettre un terme à une mode jetable », qui a poussé la styliste-modéliste Violette Dedeban et Matthieu Jungfer, un ingénieur Télécom diplômé d'une école de commerce, à fonder l'Atelier Unes à la Roche-sur-Yon en 2018. Ni elle, passée chez de grands noms français du luxe et des façonniers vendéens, ni lui, venu du milieu de la Tech, lassé de développements web sans avoir une vision réelle de leur l'impact sur la planète, ne trouvaient leur compte dans leur activité précédente.

« Nous voulions lancer une activité créative ayant un impact maximal mais il nous fallait un concept pour créer un modèle économiquement viable. De là, est née l'idée d'Atelier Unes autour d'une marque éco-responsable, collaborative avec des ventes en pré-commande », explique Matthieu Jungfer.

Si le couple démarre avec peu de moyens (15.000 euros), il va pousser la démarche de l'Upcycling assez loin en impliquant, d'entrée, une communauté autour de la prévente et de la conception d'un produit sur la plateforme de financement participatif Ulule.

« On le fait pour chacun de nos produits avec la volonté de construire un vestiaire féminin à impact », ajoute-il.

La quête du modèle idéal

En trois ans, Atelier Unes a réussi à attirer 70.000 personnes. Chacune d'elles peut participer à des sondages qui déterminent le prix, le style, la matière, la coupe... des vêtements.

« Sur chacun de nos produits, 5 à 10.000 personnes font de la co-création. Ce qui nous permet d'établir un cahier des charges précis, de voir si le prix proposé est justifié et rentable. A partir de là, nous lançons la fabrication de prototypes et les précommandes », détaille Matthieu Jungfer.

L'idée est de travailler un produit qui soit au plus près des besoins de la cliente pour minimiser les risques commerciaux.

« Sur les maillots de bain, nous avons proposé un modèle rétro avec un choix de bretelles, de bonnets, d'échancrures, de couleurs... Nous avons essayé de répondre à des morphologies différentes avec des bretelles amovibles pour porter le maillot de différentes manières. Finalement, nous avons gardé trois modèles. A chaque fois, la démarche est identique », précise le co-fondateur d'Atelier Unesqui réalise en moyenne 500 précommandes sur 15 jours par produit et fabrique 20% de produits supplémentairesDes séries limitées en somme, qui sont parfois réactualisées par des V2 ou des V3, selon le désir des consommatrices.

Dix piscines et onze tours de planète en moins

Faute d'avoir trouvé une solution économiquement satisfaisante en France, la jeune entreprise s'est résolue à confier la fabrication à des sous-traitants italiens ou portugais. Tant pis pour le bilan carbone... Hors transport, l'entreprise, qui fut l'une des premières entreprises à décrocher l'agrément ESUS (Entreprise Solidaire d'Utilité Sociale), assure avoir évité, depuis sa création, l'émission 22.479 kg de CO2, soit onze tours de planète en voiture, et économisé plus de 7 millions de litres d'eau, soit l'équivalent de de dix piscines de 25 mètres. Pour cela, les vêtements (robes, marinière, jupe, cardigan, chemises, pulls, collants...) sont produits à partir de matières naturelles (lin, cotons biologiques...), fabriquées en Europe, et pour certains recyclés. Adeptes du slow-fashion, les fondateurs d'Atelier Unes disent étudier la faisabilité d'un modèle pendant un an. Notamment pour s'assurer de la fabrication des matières premières, comme l'Econyl, issu des filets de pêche, la fibre Q-Nova, produite à partir de chutes de production de nylon utilisée pour produire des collants recyclés ou encore du marc de raisins pour remplacer le cuir dans la fabrication de ceintures. « Le champ des possibles est assez vaste », estime Matthieu Jungfer qui projette d'utiliser de la laine Mérinos recyclée. Pour garantir la qualité des matières, des teintures, de la finition des coutures avant et après lavage et la durée de vie des produits, les modèles sont testés par le laboratoire d'analyses et d'essais SMT. « On veut avoir la durée de vie la plus longue possible pour être le moins impactant possible», assure le dirigeant d'Atelier Unes.

Recycler les clientes en actionnaires

Depuis sa création, l'Atelier Unes a produit une quinzaine de modèles, soit quelque 20.000 pièces. En 2020, l'entreprise a réalisé un chiffre d'affaires de 265 000 euros, dépassant de 45.000 euros les objectifs de son business plan. Le concept est-il pour autant rentable ? « Il l'est , assure Matthieu Jungfer, parce que nous n'avons ni boutique physique, ni intermédiaire, que l'on effectue le sourcing nous-même, que le prix est extrêmement travaillé. » Il faut compter 79€ pour un maillot de bain, 120 euros pour une robe ou 23 euros pour une paire de collants recyclés et consignés. Lancés en septembre 2020, ces collants, en fibre Q-Nova, ont été plébiscités.

Avec 5 500 commandes en trois semaines,  ils sont devenus l'une des quinze meilleures campagnes de la plateforme Ulule au cours des dix dernières années. Au-delà des soins apportés dans la fabrication, le système de consigne (2 euros remboursés par collants usagés retournés) a convaincu et a permis à l'entreprise de lancer une fabrication de chouchous, confectionnés à Paris par un atelier d'insertion, et revendus 23 euros le pack de deux. Bien vu, le recyclage ! A l'image de cette opération, les fondateurs de l'Atelier Unes entendent étendre ce système de consigne sur les vêtements usagés et créer une vraie filière de recyclage.

Deux ans après un appel de fonds de 70.000 euros en Love Money, l'Atelier Unes a engagé, en juillet 2020, une levée de fonds sur la plateforme de projets à impact LITA.CO. « Sur le principe de la cocréation nous avons proposé à nos clientes de prendre des actions dans l'entreprise », dit-il. Sur les 250.000 euros récoltés, près de la moitié a été investi par les clientes pour entrer au capital d'Atelier Unes qui, avec un prêt bancaire de 150.000 euros, dispose d'un budget 400.000 euros pour pousser son développement, investir en R&D pour dénicher des matières innovantes, recruter pour étoffer une équipe d'aujourd'hui six personnes, se diversifier vers les accessoires et asseoir son concept durablement avant d'aller vers les secteurs de l'homme ou de l'enfant.

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Commentaires 4
à écrit le 21/05/2021 à 5:14
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Des filets de peche pour attraper la moule ? J'ai pas bien compris.

à écrit le 18/05/2021 à 15:58
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Une sacree concurrence pour le string Bresilien.

à écrit le 18/05/2021 à 13:05
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C'est pour jouer à la petite sirène? Question couverture c'est minimaliste, et ça va laisser des traces de maillot plutôt inédites. Enfin ce que j'en dis.

à écrit le 18/05/2021 à 8:45
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Une bien belle idée, bravo à eux et bon vent à cette entreprise !

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