Médicaments : la France appelle à une politique de relocalisation européenne

Alors que l'Europe lance aujourd'hui deux groupes de travail dans le cadre de sa nouvelle alliance européenne pour le médicament critique, la France veut peser de tout son poids dans les discussions. Le ministre Roland Lescure était ainsi à Bruxelles ce jour pour défendre trois axes prioritaires, et notamment sur le plan industriel avec une politique européenne de relocalisations coordonnées de productions pharmaceutiques.
La France veut prendre le lead européen sur la question de la souveraineté médicale.
La France veut prendre le lead européen sur la question de la souveraineté médicale. (Crédits : Wikimedia Commons)

Terminé les pénuries de médicaments ? C'est peut-être le jour décisif pour l'industrie pharmaceutique tricolore, voire continentale. La Commission européenne a lancé ce mercredi « l'alliance européenne pour le médicament critique », suite à l'appel émis quelques mois en arrière par 23 États membres, dont la France, pour la naissance d'un Critical Medicines Act.

À cette occasion, le ministre de l'Industrie, Roland Lescure, s'est rendu spécialement à Bruxelles pour superviser et assister au début des travaux en la matière, avec un objectif bien en tête : que la France prenne le lead sur cette question.

« Le ministre a ainsi présenté un manifeste lors du lancement de l'alliance et nous sommes déjà soutenus par huit autres États membres (dont l'Italie, la Hongrie et les Pays-Bas, ndlr). D'autres pourraient suivre prochainement », souligne le cabinet du ministre.

La relocalisation en France de la production de médicaments était un dossier déjà en haut de la pile des sujets prioritaires du gouvernement, particulièrement depuis la crise sanitaire. Au début de l'été 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, s'était rendu à Lyon pour annoncer son intention de relocaliser dans le pays la production de 50 molécules pharmaceutiques importantes et critiques, avec à la clé un guichet unique doté de plusieurs dizaines de millions d'euros pour les porteurs de projets. Mais cette promesse semble difficile à tenir...

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Coordonner les efforts industriels

Pour le moment, cette alliance européenne pour le médicament critique se matérialise par deux groupes de travail, l'un consacré à la relocalisation de la production de médicaments en Europe et le second sur la diversification des approvisionnements. Ils sont au total de 250 parties prenantes, dont des acteurs de la filière française. Charge à ces groupes de travail d'émettre par la suite des leviers d'action concrets à la Commission européenne.

« Cette alliance repose sur deux leviers. L'un est tout d'abord réglementaire et des mesures sont déjà en discussion, l'autre est industriel et c'est celui-là qui nous manquait jusqu'à présent », estime Bercy.

Dans l'espoir de peser sur les conclusions de ces groupes de travail, le ministre Roland Lescure leur a, dès lors, présenté « les trois axes prioritaires » défendus par la France. Si le premier repose sur la commande publique et ainsi des choix volontaristes, le second est bien plus engageant avec l'appel à « un plan de relocalisations coordonné en Europe ».

« Cela implique de partager des informations, sur nos besoins, nos forces et surtout nos faiblesses industrielles. Il est nécessaire de mieux se coordonner pour éviter de se retrouver avec 24 usines de paracétamol en Europe dans le futur », expose le cabinet du ministre de l'Industrie.

Un exemple pas du tout hasardeux de la part de son entourage alors que la France s'apprête à accueillir deux usines de paracétamol, à Toulouse et en Isère.

L'épineux sujet du prix

Enfin, le dernier point défendu par la France repose sur le nécessaire regain de compétitivité des productions pharmaceutiques européennes face à celles extra-européennes.

« Entre les deux, il y a un différentiel de 40% de compétitivité, principalement lié à des normes environnementales plus contraignantes. Les groupes de travail doivent se pencher sur cette question. Pourquoi pas envisager des clauses miroirs (pour les importations de médicaments en Europe, ndlr) ? », projette Bercy.

Pour les prochaines semaines, la France promet de « jouer un rôle clé » dans ces groupes de travail et attend vivement ses premières conclusions « pour la fin d'année ». Une initiative qui tombe à pic alors que sur la scène intérieure la filière fait face à un fait d'actualité majeur, la vente annoncée du géant français Biogaran des médicaments génériques par le groupe Servier, fragilisé par une demande moindre et des prix de médicaments qui ne permettent plus d'être compétitif.

Lire aussiMédicaments génériques : la possible vente de Biogaran à des repreneurs indiens alarme le gouvernement

« Sur le sujet de la relocalisation, et encore plus sur des marchés réglementés, tout le monde doit faire une partie du chemin, notamment sur la question du prix : les industriels, les clients et les pouvoirs publics », avait confié à La Tribune quelques jours plus tôt Gildas Barreyre, le secrétaire général du groupe Seqens, qui participe aux deux groupes de travail.

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Commentaires 16
à écrit le 25/04/2024 à 15:04
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4 925 médicaments d'intérêt thérapeutique majeur ont été signalés en risque de tension ou de rupture d'approvisionnement auprès de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), soit une augmentation de 30 % par rapport...

à écrit le 25/04/2024 à 14:14
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Les mêmes ttuques bidons de ceux qui ont tout délocalisé pendant 20 ans , et qui aujourd'hui expliquent qu'ils veulent relocaliser ? De mieux en mieux, mais bon du fait d"avoir un ministre de l'économie de cette nature, ben finalement comme atos,...

à écrit le 25/04/2024 à 12:53
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Au vu de la conjoncture qu'on nous promet, nos copains de l'UE ne seront pas de trop pour la production d'antidépresseurs.

à écrit le 25/04/2024 à 9:37
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GO HOME ! En Allemagne donc.

à écrit le 25/04/2024 à 9:15
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Cela a t il du sens dans un monde encore globalisé ? Vouloir relocaliser c'est bien mais encore faut il que les conditions salariales et fiscales soient en place, il faut aussi savoir si l'on veut des entreprises libérales ou nationalisées... Si ...

à écrit le 25/04/2024 à 9:03
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La France est elle écouté en Europe, J'en doute..

à écrit le 25/04/2024 à 5:28
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Le dirigisme français est un poison pour toute l’Union Européenne !!! Jamais les élites françaises ne se posent la question « pourquoi les industries de fabrication de médicaments ont quitté la France »??? Elles pensent qu’elles peuvent décréter une ...

à écrit le 25/04/2024 à 0:08
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La France n'a qu'un seul atout, Sanofi, en raison de la tendance française à penser qu'un champion national vaut mieux qu'une concurrence nationale. Il suffit de regarder Sanofi, qui n'est pas un champion international. Il faut que l'État français ar...

le 25/04/2024 à 1:54
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En ce moment, le point chaud, c'est BIOGARAN, n°1 du générique français avec 30% des parts de marché français !

à écrit le 25/04/2024 à 0:04
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Ahhh, le protectionnisme, c'est bien pour la France, mais pas pour les autres. La pensée française est à très court terme, les autres feront de même et écraseront une fois de plus les Français jusqu'à ce que la France réforme ses problèmes structurel...

le 25/04/2024 à 7:18
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Le problème ne se réduit pas au seul problème " commercial " il concerne aussi et SURTOUT notre INDÉPENDANCE... ou si on préfère d' un minimum d' AUTONOMIE ... Il en est de même de la Défense, de l' Alimentation; de l' Energie et ... de la FINANCE ....

à écrit le 24/04/2024 à 20:10
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Pour faire revenir les Laboratoires en France, il faut commencer par recommencer à leur acheter des médicaments au lieu de favoriser systématiquement les génériques contre les intérêts des Laboratoires. On a fait des économies à court terme, mais le ...

le 24/04/2024 à 21:27
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Les génériques coutent en moyenne 30% de moins que le produit d'origine, autant d'économies pour la sécu , de plus les labo qui produisent des génériques sont des filiales des grands labo .Un générique est un médoc qui a plus de 20 ou 25 ans d'exist...

le 24/04/2024 à 23:14
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@LDX : parfaitement, mais de ce fait les Laboratoires quittent la France et ne la servent pas en priorité en cas de besoin : on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre... Donc on sacrifie notre indépendance médicamenteuse et l'avenir à un objectif...

à écrit le 24/04/2024 à 19:32
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On n'attrapera pas les mouches avec le même vinaigre que l'on a mis pour les faire partir. Il faudra se faire plus mielleux.

à écrit le 24/04/2024 à 18:41
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Faudra arreter de rêver un jour, personne ne reviendra en France ( qui au passage continue de virer les boîtes ( Sanofi, biographie et consors). Et y a déjà de boites en Pologne ( et en Suisse, avec prix suisses lol) La france recolte ce qu'elle a...

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