TotalEnergies : Patrick Pouyanné envisage une cotation principale du groupe à la Bourse de New York

La major pétrolière française a vu son bénéfice net s'établir à 5,7 milliards de dollars au premier trimestre, soit en hausse de 3% par rapport aux trois premiers mois de 2023. Une bonne performance que le pétrolier doit en grande partie à la hausse des cours du pétrole. Le PDG a néanmoins affirmé réfléchir à une cotation principale de son groupe à la Bourse de New York.
Ses résultats s'inscrivent dans un « environnement marqué par des prix du pétrole et des marges de raffinage soutenus, mais des prix du gaz en retrait », a déclaré Patrick Pouyanné.
Ses résultats s'inscrivent dans un « environnement marqué par des prix du pétrole et des marges de raffinage soutenus, mais des prix du gaz en retrait », a déclaré Patrick Pouyanné. (Crédits : Crédit TotalEnergies & Khanh Renaud)

[Article publié le vendredi 26 avril 2024 à 09h29 et mis à jour à 16h18] Voilà un début d'année ensoleillé pour TotalEnergies. La major pétrolière française a enregistré un bénéfice net de 5,7 milliards de dollars au premier trimestre 2024, améliorant encore ses résultats de 3% par rapport aux trois premiers mois de l'année 2023, ce vendredi. Le groupe affiche en revanche un Ebitda ajusté (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) - l'indicateur de rentabilité le plus suivi par les investisseurs - en baisse de 19% par rapport au 1er trimestre à 11,5 milliards de dollars.

Ses résultats s'inscrivent dans un « environnement marqué par des prix du pétrole (à près de 90 dollars le baril de Brent ce vendredi, NDLR) et des marges de raffinage soutenus, mais des prix du gaz en retrait », a déclaré le PDG de l'entreprise Patrick Pouyanné cité dans le communiqué.

Ce dernier estime notamment que les résultats du début d'année, sont « conformes à ses objectifs ambitieux pour l'année 2024. »

Mais coup de théâtre, le PDG réfléchit à une cotation principale de son groupe à la Bourse de New York, « une question légitime », a-t-il déclaré à Bloomberg en évoquant la montée en puissance de l'actionnariat nord-américain, qui détient près de 50% du capital de l'entreprise. « Ce n'est pas une question d'émotion. C'est une question d'affaires », a-t-il ajouté, pragmatique.

Le PDG répondait notamment à une question sur le déplacement de la cotation principale du groupe, aujourd'hui établie à Paris, vers la place new-yorkaise. Aujourd'hui, le groupe a déjà des titres inscrits à Londres et à New York, mais de manière secondaire.

« Nous sommes confrontés à une situation où les actionnaires européens vendent ou maintiennent leur participation, et où les actionnaires américains achètent », a justifié le patron du fleuron du CAC 40, au cours d'un entretien.

Depuis 2012, la part de l'actionnariat institutionnel nord américain est passée de 33% à 48% (dont 47% pour les Etats-Unis) en 2023 tandis que celle de l'Europe (hors Royaume-Uni) est passée de 45% à 34% sur la même période. L'actionnariat institutionnel représente 78% de l'actionnariat total de l'entreprise. « L'emplacement du siège social n'est pas remis en question, dit-il : il restera à Paris », a par ailleurs précisé Bloomberg dans son article.

Le dirigeant a notamment évoqué la frilosité des investisseurs européens vis-à-vis de la stratégie défendue par le groupe, qui consiste à continuer d'investir dans les énergies fossiles pour financer sa transition vers les énergies bas carbone.

« En Europe, au lieu de soutenir les entreprises européennes qui veulent faire cette transition, même si c'est difficile, ils nous regardent et nous disent : regardez, vous continuez à produire du pétrole et du gaz », a-t-il déclaré.

TotalEnergies l'a toujours assumé en soutenant que la demande d'énergie augmente dans le monde et que les énergies fossiles qui réchauffent les températures de la planète ne peuvent pas être remplacées aussi vite par les énergies propres. « Bien sûr, je continue à produire du pétrole et du gaz », a répété le dirigeant.

Lire aussiTotalEnergies va fêter son centenaire le ciel dégagé

TotalEnergies augmente sa production de pétrole

La compagnie, qui fête ses 100 ans cette année, « démontre une nouvelle fois ce trimestre la pertinence de sa stratégie de transition équilibrée ancrée sur deux piliers, les hydrocarbures et l'électricité », a commenté le dirigeant à l'annonce des résultats.

Entre janvier et mars, le groupe a augmenté sa production d'hydrocarbures d'1,5% sur un an, notamment grâce à la montée en puissance de projets pétroliers au Brésil, et de gaz à Oman et en Azerbaïdjan, pays-hôte de la conférence climatique de la COP29 en novembre prochain. Sa production d'hydrocarbures pour le gaz liquéfié (GNL) a aussi augmenté de 6% sur un an, portée par des projets au Qatar et au Nigeria. Ses ventes de GNL se sont toutefois érodées de 9% sur le trimestre en raison d'une demande moins élevée du fait d'un hiver doux et de stocks de gaz élevés.

TotalEnergies a beaucoup bénéficié de la volatilité des cours du pétrole ces dernières années. Pour rappel, en 2022, la major française avait enregistré un bénéfice record de 20,5 milliards de dollars, surfant sur l'envolée des cours et du pétrole - à plus de 120 dollars le baril contre 40 dollars en 2020 - dans le sillage de la guerre en Ukraine. Depuis, les cours se sont nettement assagis, mais ils restent soutenus pour le pétrole en raison des troubles géopolitiques en mer Rouge et de la guerre au Proche-Orient. Cela n'a pas empêché le groupe d'empocher, encore en 2023, un nouveau bénéfice record de 21,4 milliards de dollars, le meilleur résultat de son histoire, notamment grâce à sa stratégie payante sur le gaz liquéfié, sa priorité.

Avec tous ces bénéfices, le groupe confirme qu'il consacrera 17 à 18 milliards de dollars à ses investissements en 2024, dont 5 milliards pour la production d'électricité à partir de gaz ou de sources renouvelables.

Une multinationale sous le feu des critiques

Si l'énergéticien a opéré une diversification dans l'électricité renouvelable, il reste donc très critiqué pour la poursuite de ses investissements dans les énergies fossiles, néfastes pour le climat. En 2023, TotalEnergies a notamment annoncé des projets ou acquisitions en Namibie, au Suriname et au Brésil, et il s'est renforcé aux Etats-Unis dans le gaz liquéfié (GNL), une énergie très convoitée par l'Europe qui cherche à remplacer le gaz russe. « On est quand même durablement lié à l'importation de gaz naturel liquéfié en Europe », affirmait mi-janvier Patrick Pouyanné, le PDG du groupe qui revendique la place de 3e acteur mondial du GNL.

Lire aussiEnergies renouvelables : TotalEnergies envisagerait la cession de certains actifs

En septembre, le groupe s'était encore attiré les critiques en annonçant vouloir augmenter sa production d'hydrocarbures de 2 à 3% par an dans les cinq prochaines années, tandis que plusieurs pétroliers comme Enel, Shell et BP ont annoncé en 2023 une révision en baisse de certains de leurs objectifs de transition énergétique.

Mis sous pression par les militants du climat et des droits humains, le groupe est visé par plusieurs actions judiciaires contre sa stratégie ou contre ses projets gaziers et pétroliers, dont le très controversé projet Tilenga/Eacop en Ouganda et en Tanzanie. Il soutient que ces projets sont encore nécessaires pour répondre à la demande mondiale, et fait valoir qu'il consacre aussi un tiers de ses investissements aux énergies bas carbone, notamment dans l'éolien et le solaire. TotalEnergies compte maintenir son cap de 35 GW de capacités d'électricité renouvelable en 2025, avant 100 GW en 2030, un objectif ambitieux.

Séparation des pouvoirs

Par ailleurs, le groupe a annoncé vendredi avoir refusé l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée générale des actionnaires d'une résolution proposant de séparer les fonctions de directeur général et de président du conseil d'administration, que cumule le PDG Patrick Pouyanné.

« L'unité du pouvoir de direction et de représentation de la société s'inscrit dans un contexte d'équilibre de pouvoirs particulièrement bien encadré », justifie dans un communiqué le conseil d'administration.

Une coalition d'actionnaires représentant 0,62% de la capitalisation boursière de TotalEnergies avait déposé ce projet de résolution, purement consultative, qui vise « à mettre fin au cumul des fonctions de président et directeur général », tout en maintenant Patrick Pouyanné à son poste de DG. Pour les actionnaires à l'initiative de la résolution consultative, la trop forte concentration des « pouvoirs aux mains d'une seule et même personne » pose des risques de conflits d'intérêts.

Le texte a été déposé par la fondation Ethos, qui représente des caisses de retraites en Suisse et une coalition de 19 investisseurs internationaux, coordonnés par l'organisation française Forum pour l'investissement responsable (FIR), parmi lesquels Achmea Investment management (Pays-Bas, 218 milliards d'euros d'actifs sous gestion), Candriam (Belgique, 144 milliards) ou AP7 (Suède, 102,4 milliards).

Dans une réaction transmise à l'AFP vendredi après-midi, la fondation Ethos et le FIR disent « constater avec surprise que le conseil d'administration de TotalEnergies a décidé de ne pas accepter la résolution consultative d'actionnaires [...] déposée par des actionnaires représentant plus d'un milliard d'euros de la capitalisation de TotalEnergies ». Ils « considèrent cette décision comme une entrave à la démocratie actionnariale. Les moyens juridiques disponibles pour protéger les droits des actionnaires et leur permettre de s'exprimer sur une question aussi essentielle que la gouvernance d'entreprise seront examinés », préviennent-ils.

Dans son communiqué, le conseil d'administration « invite » les actionnaires à déposer un « point à l'ordre du jour », plutôt qu'une résolution consultative. TotalEnergies fait également valoir auprès de l'AFP que le groupe « s'en tient à la loi » et « ne souhaite pas créer une jurisprudence » sur l'inscription d'une résolution consultative sur le mode de gouvernance à l'ordre du jour de l'AG, qui se tiendra le 24 mai prochain.

« On n'a jamais eu, en droit français, une société qui a inscrit une résolution consultative à l'ordre du jour de son AG sur l'unification ou la dissociation des fonctions », a souligné un cadre proche du conseil d'administration. « Il n'y a pas de précédent, ça n'existe pas ».

Pour rappel, le conseil d'administration s'était prononcé en septembre dernier en faveur d'une reconduction de Patrick Pouyanné pour un 4e mandat de 3 ans, ce que doivent encore approuver les actionnaires fin mai.

Parmi les entreprises cotées au sein du CAC 40, l'indice vedette de la Bourse de Paris, une douzaine d'entre elles cumulent les deux fonctions. Une nouvelle pourrait s'ajouter, le groupe Publicis ayant annoncé récemment vouloir modifier sa gouvernance en ce sens, à l'occasion de son Assemblée générale du 29 mai.

(Avec AFP)

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Commentaires 28
à écrit le 27/04/2024 à 11:40
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Un des gars que nous voyons le plus en photo sur votre site alors qu'il n'est que patron et pas propriétaire. C'est étrange tout ces propriétaires multi-milliardaires que l'on ne voit nulle part ? C'est quand même à mettre au bénéfice de Musk, même s...

le 27/04/2024 à 20:27
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"alors qu'il n'est que patron et pas propriétaire" Faux! Pouyanné n'est ni patron ni propriétaire de Total mais simplement son dirigeant. Le terme "patron" dérivé du latin "pater" ou "père" en français désigne le créateur et propriétaire d...

à écrit le 26/04/2024 à 23:29
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Ah oui ? et son patriotisme il est ou à celui la ? Encore une bonne excuse pour le top management pour s établir à New York pour échapper à l impôt sur le revenu sur les plus plus value etc. …boycott Total ! haha .q on lui retire des droits sociaux...

à écrit le 26/04/2024 à 23:29
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Ah oui ? et son patriotisme il est ou à celui la ? Encore une bonne excuse pour le top management pour s établir à New York pour échapper à l impôt sur le revenu sur les plus plus value etc. …boycott Total ! haha .q on lui retire des droits sociaux...

à écrit le 26/04/2024 à 17:42
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"Le PDG a néanmoins affirmé réfléchir à une cotation principale de son groupe à la Bourse de New York." Et pourquoi pas Amsterdam? En effet, Total n'est pas une société américaine mais européenne. Il semble totalement déplacé de nier l'iden...

le 26/04/2024 à 18:51
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La bourse d'Amsterdam est inférieure à la bourse de Paris. Je ne vois pas l’intérêt de la cotation de Total là-bas.

le 26/04/2024 à 21:43
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@marc469 "La bourse d'Amsterdam est inférieure à la bourse de Paris." Sur quel critère? Mon courtier action me propose la même tarification et pour cause celle-ci est gérée par le même opérateur: Euronext. "Je ne vois pas l"intérêt de la...

à écrit le 26/04/2024 à 17:10
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[Le PDG a néanmoins affirmé réfléchir à une cotation principale de son groupe à la Bourse de New York]😯 Je dois tout de même reconnaître que cette double casquette à plus l'étoffe d'un financier de haut vol que d'un top manager d'une major pétrolière...

le 26/04/2024 à 18:49
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Le chiffre d'affaires de Total en France est minime.

à écrit le 26/04/2024 à 16:35
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Les investissements dans le fossile, TotalEnergies le fait parce qu'il y a de la demande...les ecolos-gauchistes n'ont pas compris ça ?? C'est pourtant élémentaire : ce sont les consommateurs qui guident les investissements. TotalEnergies n'est pour...

à écrit le 26/04/2024 à 15:30
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Les Français n'ont toujours pas compris que 2 choses. 1° Le fait d'avoir une aversion aux risques bénéficient aux investisseurs du monde entier qui eux deviennent les propriétaires de "nos" entreprises. 2° Les profits à travers les dividendes vont au...

le 26/04/2024 à 17:25
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@Tototiti. Heureux de voir que vous avez compris l'essentiel des flux financiers. Et pourquoi les pourvoyeurs de capitaux choisissent-ils "des bandits-manchots" en France pour générer des profits dantesques - avec un "moral hazard effect" hallucinant...

à écrit le 26/04/2024 à 15:05
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C'est logique effectivement. En Europe, il est mal vu de faire du bénéfice.

à écrit le 26/04/2024 à 15:02
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hahaha, excellent!!! on attend avec impatience les cris d'indignation offensee du bon peuple de gauche donc tolerant, qui passe son temps a vomir sur total, tout en lui demandant d'avoir des bons emplois bien payes en france!!!! des bons cris sur le ...

à écrit le 26/04/2024 à 14:44
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🧐 La courbe de la température moyenne de la Planète EST EN AVANCE DE PHASE par rapport à celle de la quantité de CO2 dans l'atmosphère ! L'augmentation de la quantité de CO2 dans l'atmosphère EST UNE CONSÉQUENCE de la hausse de la température moyenne...

à écrit le 26/04/2024 à 13:46
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La réflexion est légitime avec un actionnariat anglo saxon majoritaire. Le corollaire qui est plus pénalisant pour la France sera probablement un changement de siège social aux USA et alors l'Etat français ne pourra taxer Total que sur ces profits f...

à écrit le 26/04/2024 à 13:00
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A force de critiquer Total et de jalouser son travail et ses résultats, l'entreprise va progressivement quitter la France...

à écrit le 26/04/2024 à 12:37
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Quand toutes nos entreprises seront cotées à l’étranger et avec des actionnaires non français nous serons plus pauvres mais heureux, écologiquement décroissants. Bref le paradis sur terre !!!!!! C’est pourquoi je quitte ce pays qui n’a plus d’avenir ...

le 26/04/2024 à 13:28
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pauvre et heureux, tient ! on dirait l'ami swchab! finalement le projet que monsieur racontait, semble de plus en plus réel !

le 26/04/2024 à 15:09
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Nous serons tous égaux dans la pauvreté. Voila qui fera le bonheur de tous les gauchistes.

à écrit le 26/04/2024 à 12:21
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c'est pourquoi ils ont besoin de votre épargne ! car les "entreprises mercenaires" qui prennent l'argent des subventions, et qui pour le coup ne travaillent que pour leurs intérêts ! vous comprenez le monde que vous propose macron ! plus aucune décis...

le 26/04/2024 à 14:42
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Votre commentaire est délirant Gonzague.Est ce que vous savez que l’économie est mondialisée et que les grandes entreprises multinationales imposent leurs décisions en fonction de leurs intérêts.Les états devraient réfléchir avant de décider de taxer...

le 26/04/2024 à 15:18
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C'est assez marrant de constater que moins on comprend les choses, plus on veut expliquer aux autres ce qu'ils doivent faire. vos explications sont des délires sans queue ni tête..

à écrit le 26/04/2024 à 11:48
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Inadmissible! Il faut mettre l'entreprise en prison! Nous ne voulons que des entreprises qui perdent , de l'argent et licencient en masse leur personnel. Ce PDG devrait être payé au SMIC ou plutôt au RSA, enfin le plus mal possible. Laissons cette en...

à écrit le 26/04/2024 à 9:45
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Un des gars que nous voyons le plus en photo sur votre site alors qu'il n'est que patron et pas propriétaire. C'est étrange tout ces propriétaires multi-milliardaires que l'on ne voit nulle part ? C'est quand même à mettre au bénéfice de Musk, même s...

le 26/04/2024 à 13:32
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En même temps, ne pas voir les propriétaire leur permet d'aller en soirée pour tenter de laver leur image, puisque personne ne sait a quoi ils contribuent ! Parfait, cela permet d'éviter la responsabilité, et lors d'une des dernières AG a l'extérieu...

le 26/04/2024 à 15:21
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Les plus gros propriétaires de Total sont ses propres employés et retraités. Ils possèdent la plus grosse part soit 11% de la société.

le 27/04/2024 à 9:33
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"Les plus gros propriétaires de Total sont ses propres employés et retraités. " Non mais comment peux tu me la faire encore celle-là depuis des années et des années... -_- Je vais pas me fatiguer hein, tu connais parfaitement ma réponse, merci.

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