Un monde sans maladies, utopie ou réalité  ?

Les récentes rencontres d'Aix organisées par le Cercle des Economistes nous ont permis de nous interroger sur la notion de progrès et en particulier, dans le domaine de la santé. Par Emmanuelle Quilès, Présidente Directrice Générale de Janssen France
Emmanuelle Quilès, Pdg de Janssen France

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit le progrès comme un combat contre les formes les plus élémentaires de l'injustice et de l'inégalité de notre univers : la lutte contre la maladie en fait bel et bien partie. Pour participer à ce combat, l'industrie pharmaceutique mondiale a fait du pari de l'innovation la clé de voûte de sa stratégie. En investissant, parfois de manière colossale, elle a permis depuis des décennies des avancées réelles et continues.

Ces innovations ont permis de proposer des traitements à plusieurs centaines de millions de patients à travers le monde. Ainsi en 20 ans, l'espérance de vie a progressé chaque année en France - de 3 mois pour les femmes et de 2 mois pour les hommes. Les médicaments ont contribué pour 73% à cet indéniable progrès. Dans le cancer, la survie a doublé en 40 ans dans les pays développés ; et l'espérance de vie d'une personne séropositive est comparable aujourd'hui à celle d'une personne séronégative, si elle est prise en charge au bon moment.

 Conserver les moyens d'innover

Parfaite illustration de ce que le mot « collaboration » peut signifier en santé, - entre professionnels et autorité de santé, associations de patients, payeurs -, le médicament participe au progrès de nos sociétés. Pourtant, sa part dans les dépenses de santé est en baisse en Europe. Et notre secteur d'activité est sans doute le seul, en France, à se voir contraint par les pouvoirs publics de limiter sa croissance, voire organiser sa décroissance, année après année.a

Dans un tel contexte, conserver les moyens d'innover et faire reconnaître la valeur de ces innovations, c'est pour l'ensemble des acteurs de notre secteur une bataille quotidienne. Cela ne nous empêche pas d'élargir le champ des possibles, en travaillant sur la possibilité de prévenir ou d'intercepter la maladie avant qu'elle ne survienne. Une démarche qui entraîne une remise à plat fondamentale de notre façon d'envisager le progrès en santé, avec des conséquences éthiques et économiques que nous devons anticiper dès à présent.

Car si guérir les maladies reste une priorité, nous devons, dans un même temps, nous préparer à relever un autre défi : empêcher la survenue des maladies. Comment ? En renforçant la vaccination, comme l'a rappelé la ministre de la Santé dans son exposé aux Rencontres, mais aussi en traitant les personnes à un stade précoce, avant même que les symptômes de la maladie ne soient ressentis.

Un monde sans maladies n'est pas de la science-fiction

Cette nouvelle approche peut permettre de retarder, voire d'éviter l'apparition des signes cliniques de la maladie. Et dans certains cas, de la maladie elle-même.

Un tel changement de paradigme invite la communauté mondiale -citoyens, professionnels de santé, investisseurs - à penser différemment la façon dont nous devrons envisager le progrès des soins de santé. Pas question, en effet, de faire de la résultante de ces progrès majeurs une médecine à deux vitesses qui serait curative pour les pauvres, préventive pour les nantis...

Je crois que ce niveau de progrès est possible, que cette évocation d'un monde sans maladies n'est pas de la science-fiction. Cela représente bien un progrès, car la santé, comme l'éducation, est la condition sine qua non de la prospérité de nos États.

Ce n'est donc pas une utopie. Nous devons anticiper le problème du financement et surtout travailler avec confiance sur la meilleure façon d'effectuer cette transition entre ces deux modèles, celui de la guérison et celui de l'interception.

Demain, ce progrès sera réalité. Soyons prêts à l'accueillir.

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