Antiterrorisme sur Internet : Macron attaque les géants du Net et le chiffrement

Dans une conférence de presse, Emmanuel Macron a présenté ses propositions en matière de lutte antiterroriste sur Internet. Au menu : une collaboration et des « obligations de résultats » qui existent déjà pour les géants du Net sur la suppression des contenus illicites, et des approximations surprenantes concernant le chiffrement des communications. Explications.
Sylvain Rolland
Dans une conférence de presse d'une quarantaine de minutes qui s'est tenue lundi 10 avril, Emmanuel Macron a détaillé ses mesures phares contre le terrorisme, notamment sur Internet.

Plutôt discret, lorsqu'il était ministre de l'Economie, sur la lutte contre la radicalisation en ligne et sur la délicate question du chiffrement des communications par certaines messageries privées utilisées par les terroristes, Emmanuel Macron a enfin précisé sa pensée. Dans une conférence de presse d'une quarantaine de minutes qui s'est tenue lundi 10 avril, le candidat d'En Marche! à la présidentielle a détaillé ses mesures phares contre le terrorisme, notamment sur Internet.

Radicalisation en ligne : Macron propose ce qui existe déjà

Le co-favori des sondages aux côtés de Marine Le Pen part d'un constat :

« Beaucoup de terroristes sont passés à l'action après s'être radicalisés sur les réseaux sociaux. Ils sont mis en contact avec des contenus de propagande islamique qui les manipulent et les conduisent à la violence. L'Internet est devenu un élément essentiel du terrorisme, il doit donc devenir un élément décisif dans la lutte contre le terrorisme. »

C'est pourquoi Emmanuel Macron veut avoir « une discussion franche » avec les grandes plateformes comme Google, Apple, Facebook, Twitter « et plusieurs autres ». L'objectif ? « Retirer ces contenus sans délai ». Et de poursuivre : « Je souhaite que ces entreprises aient sur ce point une obligation absolue de résultats, sans pouvoir opposer je ne sais quelle impossibilité technique ou principe de liberté ou de neutralité. »

Problème : si Emmanuel Macron a raison de pointer du doigt la réalité de la propagande sur Internet, il se contente de proposer... ce qui existe déjà. La loi sur la confiance dans l'économie numérique (LCEN), datant de 2004, impose aux hébergeurs de retirer les contenus faisant l'apologie du terrorisme. De même, la loi antiterrorisme de 2014 permet aux forces de l'ordre d'user d'un « pouvoir de blocage » et de déréférencement pour supprimer l'accès aux sites utilisés par les djihadistes.

De plus, contrairement à ce que suggère Emmanuel Macron, les géants du Net comme Facebook, Twitter et Google (qui détient YouTube) ne sont pas déconnectés de ces enjeux. Ils ont déjà rencontrés à plusieurs reprises le gouvernement depuis les attentats de janvier 2015. Tous mènent aussi leurs propres actions pour lutter contre la propagande terroriste. Twitter, par exemple, a annoncé en août 2016 avoir fermé 360.000 comptes en un an. Par ailleurs, Facebook, Twitter, YouTube et Microsoft ont signé en mai 2016 un code de bonne conduite avec l'Union européenne, qui les engage à supprimer les contenus haineux en moins de 24 heures.

En réalité, Emmanuel Macron n'adresse pas le vrai problème, à savoir la volonté des géants du Net de vraiment agir au-delà des effets d'annonce, et, surtout, leur capacité et leur légitimité pour repérer, évaluer et supprimer rapidement les contenus problématiques, tout en respectant la liberté d'expression. Ainsi, la Commission européenne a dénoncé en décembre dernier le « non-respect » du fameux code de bonne conduite, et menacé par la loi les entreprises concernées de les forcer à s'impliquer davantage. De son côté, l'Allemagne a eu moins de patience : le gouvernement d'Angela Merkel a fait approuver, mercredi 5 avril, un projet de loi pour infliger jusqu'à 50 millions d'euros d'amende aux réseaux sociaux rechignant à lutter contre les contenus haineux et les fausses informations.

Chiffrement : Macron veut un système de réquisition légale

L'autre grand chantier d'Emmanuel Macron concernant l'utilisation d'Internet par les terroristes est d'attaquer le chiffrement de bout en bout des données, une technique qui permet de crypter les communications pour rendre le contenu indéchiffrable par un tiers. Ce qui pose problème aux services de police et de renseignement.

Le constat est le suivant :

« Les terroristes abusent des facilités offertes par la cryptologie moderne pour dissimuler leurs projets. Ils utilisent des messageries instantanées fortement cryptées pour prendre des contacts, donner des ordres. Une partie de ce trafic internet, parce qu'il est crypté, échappe aux services de sécurité, ce qui est naturellement une faiblesse. Jusqu'à présent, les groupes ont refusé de communiquer leurs clés de chiffrement ou de donner accès à leurs contenus. Cette situation n'est plus acceptable ».

Emmanuel Macron compte donc, « dès l'été », prendre une « initiative majeure et coordonnée » au niveau européen et aussi avec l'Otan. Il s'agit d'imposer aux entreprises pratiquant le chiffrement de bout en bout (on pense notamment à iMessage d'Apple, Facebook Messenger, WhatsApp, Telegram ou encore Signal) « un système de réquisition légale », sur le modèle des interceptions mises en places pour les opérateurs télécoms. Autrement dit, les forcer à fournir les « clés de déchiffrement » aux forces de l'ordre.

« Les Etats, dès lors qu'ils sont démocratiques, devraient avoir communication des contenus échangés par les terroristes sur les réseaux sociaux ou les messageries instantanées. Il faut définir dans quelques conditions et sous quel dispositif de contrôle », tranche Emmanuel Macron.

Le candidat se situe ainsi dans la continuité de l'ancien ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, qui avait attaqué le chiffrement après les attentats de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray en juillet 2016. Et surtout des députés de droite Eric Ciotti, Philippe Goujon et Laurent Wauquiez, qui ont cosigné en mars dernier une proposition de loi visant  à renforcer les obligations des « intermédiaires ».

Casse-tête juridique et impasse technique

Mais une telle proposition est surprenante à plus d'un titre. Tout d'abord, comme l'a montré le conflit Apple/FBI début 2016, forcer une entreprise à casser le chiffrement et à donner des informations sur ses clients est un casse-tête juridique et même constitutionnel, impliquant à la fois le droit commercial et les principes fondamentaux de liberté d'expression. Mais rien de trop difficile pour Emmanuel Macron, qui pense qu'une initiative coordonnée, « européenne et internationale », permettrait de lever ces freins. Le candidat assure que « plusieurs dirigeants européens » partagent son point de vue, sans toutefois préciser lesquels. Il ne faudra pas, en revanche, être pressé. Une action d'une telle ampleur prendrait de nombreuses années.

Emmanuel Macron fait aussi preuve d'un étonnant amateurisme technique. Il souhaite forcer les entreprises à fournir le contenu chiffré, mais c'est techniquement impossible : celles-ci n'ont pas accès aux clés de chiffrement, qui se trouvent sur les terminaux des utilisateurs. C'est le principe même du chiffrement de bout en bout.

Enfin, le candidat d'En Marche! a choisi d'ignorer le consensus à l'œuvre chez les experts informatiques. Ceux-ci ne cessent de répéter qu'affaiblir le chiffrement en créant, par exemple, des « portes dérobées » destinées uniquement aux forces de l'ordre pour espionner une poignée d'individus, reviendrait à créer une vulnérabilité qui exposerait l'ensemble des utilisateurs.

Sylvain Rolland

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Commentaires 15
à écrit le 12/04/2017 à 14:49
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Oui, effectivement, il est dangereux.

à écrit le 11/04/2017 à 22:37
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Je savais que Macron était nul en géographie, en histoire de France, en finance (pour avoir perdu en bourse les 1 million de son salaire), psychologiquement très étrange (sa femme a 24 ans et 8 mois de plus que lui), je peux rajouter maintenant nul e...

le 12/04/2017 à 7:52
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@olivier +1 :Macron =" quand il pleut ça mouille" ne cesse de sortir des phrases creuses mais finalement ne represente il pas les français ? Nuls en geographie en économie et pire en mathematique ( petits français classés bons derniers en mathematiqu...

le 12/04/2017 à 11:27
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le probleme c est que les autre sont encore pire: - Fillon : un menteur et un voleur. Programme inapplicable vu son attitude personnelle (impossible de demander aux gens de se serrer la ceinture quand on a tape dans la caisse depuis 81) - Le Pen : ...

à écrit le 11/04/2017 à 20:59
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De tout ce que raconte Macron, il en ressort essentiellement du flou .... Les histoires que bavarde macron sont louches, on n'y comprends rien, il se contredit chaque fois qu'il ouvre son clapet ; En cela, Macron nous apparait comme Fillon ... ...

à écrit le 11/04/2017 à 18:22
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Cet article est mal documenté et sans doute écrit par un soutien de Fillon, le Pen ou Mélenchon ! car Macron est au contraire parfaitement en phase et accord avec l'ANSSI (Agence de sécurité des systèmes d'information) et ce qui a été par ailleurs la...

à écrit le 11/04/2017 à 16:59
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C'est comme pour l'optimisation fiscale ( qui est légale et surtout mis en place pour se distinguer des autres pays pour favoriser leur économie ), les politiques aiment bien renverser la responsabilité, alors que c'est eux qui n'ont pas prévu les ...

à écrit le 11/04/2017 à 16:28
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C'est vraiment le type qui parle pour ne rien dire ou qui rêve ses mensonges car pour contrôler le net il faudra qu'il se lève plus tôt !!!

à écrit le 11/04/2017 à 16:26
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Le socialisme, c'est la manipulation, le mensonge et la misére...les 3M. Les terroristes et les brigands peuvent naviguer tranquillement à leurs petites affaires. Les droits de l'homme les protègent. Macron est une aubaine pour eux, tout comme melech...

à écrit le 11/04/2017 à 15:55
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Le destructeur de la democratie est bien en marche !!

à écrit le 11/04/2017 à 14:41
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Il oublié juste qu il y a des licornes 🦄 en france 🇫🇷 comme Squareway de vivaction Qui a développé une application pour protéger l voix et la data des entreprises il préfère que ca soit dominé par les américains qui lui feront un bras d honneur à mo...

à écrit le 11/04/2017 à 14:36
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Macron fils spirituel d Hollande veut tout écouter 👂 on passe de 🍮bi a 🍮 bis ! Ça servira à détruire tous les adversaires politiques la gauche a toujours aimé les écoutes !

le 11/04/2017 à 16:24
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et les gentils gens de droite non l'imbécilité en héritage sûrement

le 12/04/2017 à 11:56
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À polo Rassures toi la bêtise est bien partagé ! 😉 Tu as au moins hérité de ca !🍮👺

à écrit le 11/04/2017 à 13:46
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Bon d'un autre côté macron il vient juste d'être moulé, il sort à peine du four il est tout chaud c'est vrai du coup mais par contre il peut difficilement maitriser tous les dossiers, son contrat c'est faire ce que lui demanderont les banquiers c'est...

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