[Publié le 11/01/2021 à 16h30, mis à jour le 12/01 à 10h]
-
Parler, c'est quoi ?
Lancé en 2018, Parler se définit lui-même comme un "réseau social impartial", reposant sur la liberté d'expression "sans violence et sans censure". Basé à Henderson (Nevada, Etats-Unis), il a été créé par John Matze, un ingénieur informatique, et Rebekah Mercer, une importante donatrice du parti républicain.
Pour accéder à la plateforme, il est obligatoire de se créer un compte. Il est ensuite possible de publier des messages jusqu'à 1.000 caractères (contre 280 sur Twitter). Comme Twitter et Facebook, Parler est construit autour d'un fil d'actualités où tombent tous les messages des personnes auxquelles on est abonné. Différence notable : les messages y sont affichés du plus récent au plus ancien, là où les géants d'Internet organisent le fameux fil grâce aux algorithmes de recommandation. Au-delà du fil principal, il est également possible de naviguer sur un onglet "découverte de l'actualité".
A l'instar de la plateforme Gab, le réseau social a rapidement attiré des franges ultra-conservatrices et partisans de l'extrême-droite, qui se disent censurés par les plateformes mainstream comme Facebook. Des responsables politiques républicains, comme le parlementaire Devin Nunes ou la gouverneure du Dakota du Sud, Kristi Noem, y sont aussi présents.
En séduisant les pro-Trump, Parler a connu un regain d'affluence lors de l'élection présidentielle américaine en novembre : le nombre d'utilisateurs aurait doublé en une semaine à 10 millions de comptes pour 4 millions d'utilisateurs actifs, selon les derniers chiffres communiqués par le groupe. Donald Trump, pourtant adepte des réseaux sociaux, ne disposait pas de compte sur Parler jusqu'ici.
Pour diversifier son audience, le fondateur de Parler est allé jusqu'à instaurer une "prime progressiste" de 10.000 dollars (environ 8.200 euros au cours actuel) pour qu'un "expert ouvertement libéral ayant 50.000 abonnés sur Twitter ou Facebook" rejoigne la plateforme, rapportait CNBC en juin dernier. "John Matze indique avoir reçu tellement peu de réponses qu'il a doublé la prime originelle" pour la fixer à 20.000 dollars (environ 16.400 euros), raconte la chaîne de télé américaine.
-
Pourquoi le réseau social connaît un regain de popularité ?
Parler a vu ses téléchargements exploser depuis la semaine dernière. Vendredi dernier, le réseau social a été téléchargé 182.000 fois sur les magasins d'applications d'Apple (App Store) et Google Play Store - soit une hausse de 14% en comparaison à la semaine précédente, selon les chiffres du cabinet d'études Sensor Tower. A tel point que la plateforme était l'application gratuite numéro un de l'App Store.
En cause : les décisions des réseaux sociaux, principalement Twitter et Facebook, de supprimer de façon permanente le compte de Donald Trump. Ces blocages ont été pris suite aux messages publiés par le président sortant mercredi dernier, où il remettait en doute l'intégrité du scrutin. Cela s'est traduit dans la journée par une irruption violente de partisans pro-Trump au Capitole (Washington), alors que se tenait la séance de validation des résultats de l'élection présidentielle.
-
Pourquoi Parler a-t-il été banni des services Google, Apple et Amazon ?
Les messages en soutien à l'attaque du Capitole ainsi que les appels à de nouvelles manifestations ont continué à se multiplier sur la plateforme, rapporte l'AFP. Conséquence : Google a décidé de retirer l'application de son magasin d'applications dès vendredi. La firme de Mountain View évoque la présence de messages "incitant à la violence" et d'une politique de modération trop laxiste. Google a été imité par Apple dès samedi. Par conséquent, il n'était plus possible de télécharger l'application pour de nouveaux utilisateurs. En revanche, les personnes qui l'avaient déjà sur leur smartphone pouvaient toujours y accéder.
Mais dans la foulée, Amazon a affirmé ce week-end qu'il suspendait l'accès de Parler à ses services d'hébergement en raison de "contenus violents", lui coupant -de fait- l'accès à Internet. C'est pourquoi le réseau social est inaccessible depuis dimanche soir, minuit.
Pour négocier un retour sur les magasins d'applications, Parler dit avoir doublé au cours des derniers jours son équipe de modérateurs bénévoles pour grimper à 1.000 personnes, rapporte le Wall Street Journal. L'entreprise d'une trentaine de salariés aurait demandé aux modérateurs bénévoles, qu'elle surnomme les "jurés", de traquer en priorité les messages haineux.
-
Et après ?
Le réseau social a contre-attaqué dès lundi, en déposant plainte aux Etats-Unis contre Amazon. Parler estime que cette décision est motivée par des motifs politiques et par la volonté de réduire la concurrence au bénéfice de Twitter, rapporte l'AFP. C'est pourquoi l'entreprise demande au tribunal de prononcer une ordonnance temporaire contre la firme de Seattle en forçant le groupe à lui rouvrir ses serveurs.
En parallèle, le réseau social chercherait des alternatives, selon les dires de son fondateur. "Nous allons faire tout ce que nous pouvons pour revenir en ligne le plus rapidement possible mais tous les fournisseurs que nous contactons nous disent qu'ils ne veulent pas travailler avec nous si Apple ou Google n'approuve pas", a affirmé John Matze lors d'une interview sur la chaîne Fox News dimanche. Il est difficile de trouver "300 à 500 serveurs informatiques en 24 heures".
"Amazon, Google et Apple ont fait cela dans un effort coordonné en sachant que nos options seraient limitées et que cela nous infligerait le plus de dommages possibles au moment où le président Trump est banni par les entreprises de la tech", a déploré le patron de Parler sur son profil samedi, accusant les géants du web de mener une "guerre contre la liberté d'expression", rapporte l'AFP.
Le réseau social pourrait imiter la plateforme similaire, Gab. Egalement bannie par Apple et Google, le réseau social prisée de l'extrême-droite avait mis en place ses propres serveurs pour ne pas dépendre de sociétés tierces.
Sujets les + commentés