Alors que depuis une dizaine de jours, la polémique enfle autour de la nomination de Benoît Loutrel, le directeur général de l'Arcep, à la direction des affaires publiques de Google France, l'affaire a pris un nouveau tournant. D'après Le Figaro, la Commission de déontologie, qui avait pourtant donné son feu vert à ce transfert, a décidé de réexaminer ce dossier. Selon le quotidien, « la commission a pour pratique de rouvrir le dossier dès lors qu'un transfert fait polémique, avant qu'elle ait rendu publique sa décision ». Et c'est précisément ce qui s'est passé dans ce cas-ci.
Contacté par La Tribune, la Commission précise qu'elle se réunira le 14 février prochain pour arrêter sa décision. Chez Google, en revanche, c'est silence radio. « Nous n'avons pas pour habitude de commenter les nominations et mouvements au sein des ressources humaines », nous dit-on. Il n'empêche que cette affaire jette une lumière crue sur les débauchages de Google, dans le public comme dans le privé, pour mener ses activités de lobbying en France et en Europe.
D'après une étude publiée par le site Google Transparency Project, le groupe de Mountain View a recruté pas moins de 65 fonctionnaires européens depuis 2005. L'idée étant, bien évidemment, de protéger les intérêts du géant américain, régulièrement critiqué pour payer trop peu d'impôts ou pour avaler trop de données personnelles.
Interrogations
Reste à savoir ce que dira la Commission. Sur le papier, comme l'explique le site de l'administration française, « certaines activités privées sont interdites aux agents venant du secteur public » :
« Il est [...] interdit à un agent de travailler dans une entreprise privée lorsqu'il a été chargé dans le cadre de ses missions, lors des trois années précédentes :
- d'assurer la surveillance ou le contrôle de cette entreprise
- de conclure ou de formuler un avis sur des contrats avec cette entreprise
- de proposer des décisions sur des opérations réalisées par cette entreprise ou de rendre un avis sur ces décisions »
En outre, ces interdictions « s'appliquent trois ans après la cessation de fonction ».
Là où le dossier suscite des interrogations, c'est que l'Arcep, régulateur des télécoms, n'a certes aucun pouvoir concernant les géants du Net comme Google. Toutefois, le sujet est une des grandes préoccupations de l'institution, qui constate la domination de ces acteurs dans l'écosystème digital. Enfin, avant que la polémique n'éclate, Benoît Loutrel était vraisemblablement conscient que sa nomination pourrait poser problème. Sinon, pourquoi se serait-il imposé de lui-même une interdiction de travailler avec l'Arcep pendant trois ans, comme l'a indiqué précédemment La Tribune ? La balle est dorénavant dans le camp de la Commission.
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