Logement à Paris : quelles mesures pour quels résultats ?

La plupart des dispositifs concernant la politique du logement, annoncés par la maire de Paris Anne Hidalgo pendant sa campagne, ont été actés. Reste maintenant à en assurer la bonne application. Pas une mince affaire.
Mathias Thépot
Les efforts de la maire Anne Hidalgo pour le logement seront-ils récompensés?

Mise en place de l'encadrement des loyers, dispositif Multiloc, nouveau système d'attribution des logements sociaux, charte anti-spéculative pour le foncier, lutte contre les locations saisonnières illégales etc... les principales mesures annoncées par la maire de Paris Anne Hidalgo pour lutter contre la crise du logement qui sévit à Paris sont sur les rails. Reste désormais « à ce que les résultats suivent », explique Ian Brossat, adjoint au maire de Paris chargé du Logement.

Agir pour les classes moyennes

La vision du pouvoir municipal en place est claire : d'un côté agir pour que le logement social et le logement privé jouent davantage leur rôle pour les classes moyennes, qui sont victimes de la folle hausse du niveau des prix de l'immobilier dans la capitale depuis 15 ans. Et de l'autre, réduire la polarisation des populations en favorisant le logement social à destinations des classes moyennes dans les arrondissements les plus pauvres, et en augmentant la part de logements pour les plus démunis dans les arrondissements les plus riches. Tout cela se matérialise par la mise en place de mesures aux résultats encore incertains.

L'encadrement des loyers, un succès ?

La plus polémique notamment, l'encadrement des loyers qui limite les loyers abusifs, s'applique depuis le 1er août dernier. S'il est un peu tôt pour dresser un constat précis du dispositif, les services de la mairie de Paris mettent en avant l'étude de Meilleursagents.com, un site d'information sur l'immobilier, publiée début septembre, qui indique qu' « un mois après la mise en place de l' «encadrement des loyers le 1er août, le premier bilan s'avère positif alors que 17% des loyers excessifs ont baissé dans la capitale ».

« Et si certains détracteurs craignaient des conséquences importantes sur la modification du volume d'offre, il n'en est rien », explique aussi Meilleursagents.com. Deux bons arguments pour la mairie de Paris, même s'il faudra attendre la rentrée de septembre 2016 pour tirer un premier bilan. Du reste, « il reste tout de même trop de loyers abusifs (près d'un tiers dans la capitale ndlr) », explique Ian Brossat, qui souhaite aussi « améliorer l'information des locataires sur ce dispositif qui est encore méconnu ».

S'appuyer sur le secteur privé

S'appuyant sur les loyers de référence de l'encadrement des loyers, le dispositif Multiloc, non obligatoire, va pour sa part monter en puissance dans les prochaines semaines. Il a pour but de mettre sur le marché locatif des biens à des loyers de 20 % inférieurs aux loyers de marché, sous conditions de revenus du locataire (plutôt des classes moyennes) et avec des primes à la clé pour les propriétaires et les agences immobilières qui participent. L'initiative Multiloc était l'un des engagements phare de campagne de la maire Anne Hidalgo. Il devait à la base cibler principalement les logements vacants de la capitale dont le nombre oscille entre 30.000 et un peu plus de 100.000 selon les différentes estimations. Mais au final, il intègrera potentiellement tous les logements en instance de changement de locataire.

Autre dispositif s'appuyant sur le secteur privé : la charte anti-spéculative sur le foncier public pour la vente ou la location de logements neufs. Elle stipule que les promoteurs immobiliers pourront bénéficier de réduction de la Ville sur la vente du foncier public sous conditions de commercialiser ou de louer les logements construits à des prix réduits sous conditions de revenus des locataires (toujours des classes moyennes). Les professionnels de l'immobilier et les élus attendent beaucoup de ce dispositif même si à l'échelle de Paris intramuros, l'offre potentielle étant très limitée comparée à la demande quasi-illimitée, son impact restera à démontrer. Utiliser ce dispositif à l'échelle de la métropole du Grand Paris aurait peut-être plus de sens.

10.000 nouveaux logements par an

Paris compte toutefois accroître l'offre de logements intramuros : 10.000 nouveaux logements par an, dont 7.500 sociaux. Pour le pouvoir municipale en place, il n'est en effet pas question de négliger l'offre de logements pour les parisiens dans une période où les prix sont aussi élevés (environ 8.000 euros le mètre carré à l'achat en moyenne et environ 24 euros le mètre carré par mois à la location). Une opportunité pour la mairie de mettre en œuvre ses annonces en matière de mixité sociale: un tiers des nouveaux logements sociaux seront dédiés aux classes moyennes et situés dans les arrondissements où il y a déjà beaucoup de logements très sociaux occupés par des familles très modestes. Les deux tiers restant viseront des familles plus modestes et seront situés dans les arrondissements plus huppés de l'ouest parisien, ainsi que ceux du centre à un chiffre.

Le danger Airbnb

Enfin, comme beaucoup d'autres villes dans le monde, Paris s'attaquent à la menace des locations saisonnières illégales, souvent par le biais du site Airbnb. Une préoccupation très forte pour l'équipe municipale en place. Une quinzaine de personnes employées par la Ville de Paris sont chargées de contrôler sur le terrain les abus des multipropriétaires qui retirent volontairement leurs logements de la location de longue durée pour les louer illégalement des week-ends à des touristes.

Ainsi les très prisés 3ème et 4ème arrondissements (quartier du Marais) deviennent progressivement des quartiers-hôtels. Autant de logements en moins pour les Parisiens. En réaction, les équipes municipales ont contrôlé 2.000 logements dans ces arrondissements. Plusieurs abus ont été débusqués. Au total, la mairie de Paris a pour l'instant ouvert environ 750 dossiers pour des locations saisonnières illégales, sur un potentiel de ... plus de 30.000 dans la capitale. Des sanctions pécuniaires sont prévues pour les multipropriétaires récalcitrants à se mettre aux normes (jusqu'à 25.000 euros d'amende). Ce qui a permis à la Ville de Paris de récupérer 500.000 euros depuis l'élection de la maire, dit-on à l'Hôtel de ville.

Bref, le bilan de toutes ces initiatives en matière de logement sera scruté à la fin du mandat d'Anne Hidalgo, qui essaie tout de même de corriger les erreurs faites sous le mandat de son prédécesseur Bertrand Delanoë, dont elle fut notamment l'adjointe en charge de l'urbanisme et de l'architecture...

Mathias Thépot

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2015 à 15:00
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c'est bien la première fois qu'une certaine cohésion semble se mettre en place pour favoriser l'installation de la classe moyenne quasi évincée à ce jour de Paris compte tenu de loyers exorbitants; le toujours plus chez les propriétaires étant un mot...

à écrit le 09/10/2015 à 8:54
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De toute façon, le problème du logement ne sera jamais résolu. On entasse 17 millions de personnes en île de France dans 40 Km 2 est-ce raisonnable. Des régions entières dans notre pays sont désertiques. Quand va t-on décentraliser comme on avait...

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