GNL : le terminal méthanier flottant de TotalEnergies entrera en service avec plus d'un mois de retard

La mise en service de Cape Ann, le bateau-usine de TotalEnergies amarré au port du Havre, interviendra avec plusieurs semaines de retard sur le calendrier annoncé. En cause : les ultimes tests opérationnels et de sécurité toujours en cours.
Juliette Raynal
Le terminal méthanier Cape Ann à l'approche du port du Havre le 18 septembre dernier.
Le terminal méthanier Cape Ann à l'approche du port du Havre le 18 septembre dernier. (Crédits : AFP)

Le terminal méthanier flottant de TotalEnergies ne déroge pas aux incontournables retards des grands projets industriels. Alors que celui-ci devait être opérationnel avant le 15 septembre, selon l'arrêté ministériel du 15 mars 2023 fixant les conditions de sa mise en service, celui-ci n'a toujours pas démarré.

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Ce bateau-usine réceptionnera le gaz naturel liquéfié (GNL) apporté par d'autres navires méthaniers (au rythme d'un bateau par semaine environ), avant de le réchauffer pour l'injecter dans le réseau de transport de gaz terrestre. Cape Ann, c'est son nom, est bien arrivé au port du Havre (Seine-Maritime) le 18 septembre dernier en provenance du continent asiatique les cuves remplies de GNL, mais la commercialisation du gaz sur le réseau de GRTgaz n'a pas commencé. Et pour cause, des « tests opérationnels et de sécurité » sont actuellement en cours, explique-t-on au sein de la major pétro-gazière, qui assure que la mise en service devrait intervenir « dans le courant du mois ».

Ultimes réglages

Selon une source proche du dossier, le retard serait toutefois légèrement plus important, avec une mise en service désormais attendue pour la mi-novembre. Elle confirme que les derniers réglages opérationnels se déroulent. Les équipes « prennent leur temps ». Il n'y a pas d'urgence étant donné qu'il fait « doux » et que les stockages de gaz en France « sont pleins », souligne cette source.

« Il était crucial de prendre le temps nécessaire à la réalisation de tous les tests techniques et de garantir l'installation du terminal dans les meilleures conditions météorologiques possibles », indique, pour sa part, le ministère de la Transition énergétique.

De son côté, TotalEnergies répète que sa priorité est la sécurité. De fait, la major pétro-gazière ne peut se permettre aucune négligence tant les risques associés à ce type d'infrastructure industrielle sont élevés. Le GNL, essentiellement composé de méthane, est très inflammable mais présente aussi des risques liés à sa basse température pouvant engendrer des brûlures cryogéniques et fragiliser des structures non conçues pour une telle opération. Une approche ceinture et bretelles apparaît donc de mise pour éviter toutes pertes de confinement.

Une configuration atypique

Ces questions de sécurité sont d'autant plus importantes que l'amarrage du Cape Ann, le long du quai Bougainville sud, est très atypique pour un terminal méthanier flottant. En effet, celui-ci n'a pas un accès direct en mer libre, mais se situe derrière une écluse. Ce qui peut rendre plus complexe un départ rapide du bateau-usine, ou des méthaniers chargés des livraisons de GNL, en cas d'accident. « Il a fallu 3h30 au Cape Ann pour entrer dans le port du Havre et sa mise à quai, dont 2h30 passées dans l'écluse », constate, pour sa part, Jacky Bonnemains, le président de l'association environnementale Robin des Bois.

« L'étude de sécurité a bien pris en compte le fait qu'il y ait une écluse », précise-t-on chez TotalEnergies, qui indique avoir soumis « des études de dangers poussées » à Haropa port et à la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Normandie. « Ces dernières détaillent les équipements de sécurité à bord du navire FSRU [terminal méthanier flottant de regazéification, ndlr] et à terre, et permettent de caractériser les scénarios d'accidents potentiels, leurs effets et les mesures prises pour les maîtriser », détaille le groupe.

La commercialisation du GNL ne débutera donc qu'une fois ces tests poussés finalisés. En attendant, le Cape Ann, dont la capacité dépasse légèrement les 140.000 mètres cubes (soit l'équivalent peu ou prou de 58 piscines olympiques de 2 mètres de profondeur), demeure à quai depuis 35 jours avec des cuves quasi pleines. Seuls des petits volumes ont été déchargés pour réaliser les tests opérationnels.

Pas d'impact pour le réseau gazier

Ce retard de calendrier « n'a pas d'impact sur nos prévisions hivernales », rassure GRTgaz, le principal gestionnaire du réseau de transport de gaz en France. Même son de cloche chez Teréga, l'opérateur du quart sud-ouest de la France, pour qui ce décalage « ne pose pas de problématique particulière » étant donné le niveau des stockages, remplis aujourd'hui à 98%.  « Le terminal flottant est un confort supplémentaire pour l'hiver à venir » souligne-t-on.

« Le FSRU du Havre est surtout une sécurité. Par exemple, pour faire face à un cas de grève dans un terminal méthanier, à un moindre approvisionnement par l'un des gazoducs ou à un hiver très froid », abonde Nicolas Goldberg, expert énergie chez Colombus Consulting.

Le gouvernement avait autorisé en juillet ce projet de terminal méthanier « par mesure de précaution », pour une durée de cinq ans. Le Cape Ann a une capacité de regazéification maximale de 5 milliards de mètres cubes par an, soit 10% de la demande française. TotalEnergies indique avoir déjà « contracté 50 % de la capacité annuelle du terminal afin de l'alimenter en GNL à partir de son portefeuille international ».

Cette installation est pointée du doigt par plusieurs associations environnementales, dont Greenpeace, qui y voient un maintien de la dépendance aux énergies fossiles, responsables du réchauffement climatique, alors que la France dispose déjà de quatre terminaux méthaniers : deux à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), un à Montoir-de-Bretagne (Loire Atlantique) et un dernier à Dunkerque (Nord).

Ce glissement de calendrier ne se traduira pas par des pénalités pour TotalEnergies. « Il n'y a pas de conséquences juridiques à un dépassement de cette date », précise l'entourage de la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.

Juliette Raynal

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Commentaire 1
à écrit le 25/10/2023 à 8:57
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Vite, une taxe, une norme, et un ecolo qui ira se coller la main à la coque pour planter le projet avec bienveillance

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