La cohésion du gouvernement italien mise à mal par le sort de 67 migrants

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La cohesion du gouvernement italien mise a mal par le sort de 67 migrants[reuters.com]
(Crédits : Tony Gentile)

ROME (Reuters) - Le ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, a interdit jeudi à 67 migrants recueillis à bord d'un bateau de la garde-cote italienne après avoir été secourus au large de la Libye de débarquer en Sicile.

Quelques heures plus tôt, son collègue des Transports, Danilo Toninelli, avait autorisé le navire à accoster à Trapani, dans l'ouest de l'île.

"Je n'autoriserai pas (leur débarquement). Si quelqu'un le fait à ma place, il en assumera la responsabilité judiciaire, morale et politique", a affirmé Matteo Salvini lors d'une conférence de presse organisée à l'issue d'un conseil des ministres de l'Intérieur de l'Union européenne, à Innsbruck, en Autriche.

Le bateau de la garde-côte, nommé Diciotti, est arrivé au port, mais personne n'a débarqué.

Matteo Salvini, qui est aussi chef de file de la Ligue et vice-Premier ministre, est chargé de l'immigration et des frontières, tandis que Toninelli, membre du Mouvement 5 étoiles, est responsable des ports et de la garde-côte.

Le parti d'extrême droite et le mouvement contestataire, qui ont formé le 1er juin une coalition gouvernementale, se sont engagés à renforcer la lutte contre l'immigration, bien que les arrivées aient diminué de plus de 85% cette année.

Depuis son investiture, Matteo Salvini cherche avec l'assentiment du M5S à interdire aux navires des organisations humanitaires d'accoster en Italie, mais sa fermeté a semblé embarrasser ses alliés cette semaine.

LIEU SÛR

Les 67 migrants transférés à bord du Diciotti n'ont pas été secourus par l'une des ces ONG, mais par un navire italien chargé de ravitailler des plates-formes pétrolières au large de la Libye.

"Si le navire bat pavillon italien, il est compliqué de lui dire de ne pas venir dans un port italien parce que cela crée un précédent dangereux", a estimé jeudi Luigi Di Maio, chef de file du M5S.

L'équipage du navire ravitailleur a recueilli les migrants lundi et a ensuite demandé aux gardes-côtes italiens de les prendre en charge en raison de leur réaction agressive quand ils pensé qu'ils allaient être reconduits en Libye.

Selon Salvini, soit quelqu'un doit être poursuivi pour avoir menacé l'équipage du ravitailleur, soit le capitaine a menti pour convaincre les gardes-côtes d'intervenir, auquel cas c'est à sa compagnie de "payer".

"Je ne veux pas être dupe. En attendant que la lumière soit faite sur ce qui s'est passé, je n'autoriserai personne à débarquer du Diciotti", a-t-il insisté.

Matteo Salvini a par ailleurs invité les ministres de l'Intérieur de l'UE à considérer la Libye comme un lieu sûr, de façon à ce que les migrants puissent y être reconduits légitimement après leur sauvetage, ce que ses homologues allemand, autrichien et français n'ont, selon lui, pas exclu.

"Je n'ai jamais entendu le vent du changement souffler si fort en Europe", s'est-il félicité.

Le droit international interdit de renvoyer des réfugiés dans leur pays si leur vie y est en danger, or les Nations Unies et l'Union européenne jugent que la Libye n'est pas un lieu sûr.

(Steve Scherer avec Kirsti Knolle à Innsbruck, Jean-Philippe Lefief pour le service français)