Le Brexit, "aube d'une nouvelle ère" pour le Royaume-Uni

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Le brexit, aube d'une nouvelle ere pour le royaume-uni[reuters.com]
(Crédits : Simon Dawson)

par Elizabeth Piper

LONDRES (Reuters) - Le Premier ministre britannique Boris Johnson va saluer le jour officiel du Brexit, vendredi, comme "l'aube d'une nouvelle ère" et s'engager à mettre fin aux divisions qui ont rongé le Royaume-Uni ces dernières années autour du débat sur la sortie de l'Union européenne.

Au jour où le pays quitte un bloc communautaire dont il faisait partie depuis plus de 40 ans, Boris Johnson, principale figure des "Brexiters", veut éviter d'apparaître triomphaliste.

Il a dit vouloir célébrer "respectueusement" la plus importante décision britannique en matière de géopolitique depuis la Deuxième Guerre mondiale.

Lorsque le Royaume-Uni sortira formellement de l'UE, vendredi à 23h00 (GMT), peu de choses changeront dans l'immédiat.

S'ouvrira alors une période de transition qui doit durer jusqu'au 31 décembre prochain et durant laquelle Boris Johnson devra négocier avec l'UE les termes des relations post-Brexit, notamment commerciales. Bruxelles a prévenu Londres que les négociations ne seraient pas aisées, surtout dans ce laps de temps jugé trop court par l'exécutif européen.

Tout cela sera mis entre parenthèses par Boris Johnson vendredi.

L'ancien maire de Londres, qui a joué sa réputation et son avenir politique en décidant en 2016 de soutenir la campagne du "oui" à la sortie de l'UE, va fêter avec son équipe du 10 Downing Street la réalisation du Brexit, dont la date fut repoussée à plusieurs reprises, tandis que les "Brexiters" ont prévu de grandes fêtes dans la capitale britannique.

"C'est le moment où l'aube se lève et le rideau s'ouvre sur un nouvel acte", dira Boris Johnson dans une allocution télévisée qui doit être diffusée vendredi soir et dont ses services ont communiqué par avance des extraits.

"C'est l'aube d'une nouvelle ère dans laquelle nous n'accepterons plus que vos chances dans la vie - celles de votre famille - dépendent de l'endroit du pays dans lequel vous grandissez", ajoutera-t-il, en référence à sa promesse de campagne de venir en aide aux régions britanniques les plus défavorisées.

"PETITE ÎLE"

Le Parti conservateur de Boris Johnson a remporté les élections législatives anticipées de décembre dernier en effectuant des gains importants dans des bastions traditionnels de l'opposition travailliste, grâce au simple slogan "Réaliser le Brexit".

Le dirigeant britannique dispose d'une majorité parlementaire sans précédent depuis le triomphe de Margaret Thatcher en 1987, mais il hérite aussi d'un pays où les débats autour du Brexit ont divisé la population, jusque dans les familles.

La lecture de la presse britannique du jour reflète cette polarisation.

Pour les tabloïds eurosceptiques, l'heure est aux réjouissances: "Une nouvelle aube pour la Grande-Bretagne", titre le Daily Mail tandis que le Sun affirme: "Notre temps est venu". "Ce n'est pas une fin, mais un début", renchérit le Daily Telegraph.

Sous le titre "Petite île", le Guardian, pro-européen, pense au contraire que le Royaume-Uni perdra de sa puissance en quittant l'UE.

Pour les partisans du maintien, les Britanniques n'auront guère d'autre choix que de se rapprocher de l'Amérique de Donald Trump.

Une caricature publiée par le Times dépeint Boris Johnson en train de sauter hors d'une poële à frire aux couleurs de l'UE pour tomber dans les cheveux orange du président américain assimilés à un brasier, le Premier ministre s'écriant: "Enfin libre !"

S'il a envie de célébrer le Brexit, Boris Johnson craint aussi d'attiser les vélléités de désunion de certains parties du royaume et de s'attirer l'aversion de millions de Britanniques qui étaient en faveur du maintien dans l'UE, notamment en Ecosse et Irlande du Nord.

En Ecosse, Nicola Sturgeon, la cheffe de l'exécutif autonome, devrait profiter de cette journée historique pour détailler ses projets en faveur d'un nouveau référendum d'autodétermination, que refuse d'organiser Boris Johnson.

Selon un sondage publié jeudi, une courte majorité d'Ecossais serait favorable aujourd'hui à l'indépendance (51%). C'est la première fois depuis 2015 que l'institut YouGov fait état d'une majorité de "oui" à la sécession de l'Ecosse depuis 2015.

Pour une majorité de Britanniques cependant, l'heure est avant tout au soulagement d'en finir avec l'interminable feuilleton du Brexit.

"Je n'ai pas voté pour, je n'en voulais pas mais aujourd'hui, je n'ai qu'une envie, c'est que ça se termine", dit Judith Miller, qui habite à Londres. "Je suis fatiguée d'en entendre parler aux informations. Maintenant, il va juste falloir qu'on s'adapte."

(version française Jean Terzian et Jean-Stéphane Brosse, édité par Jean-Michel Bélot)