Émeutes : le projet de loi pour accélérer la reconstruction arrive mardi au Sénat

A l'issue du Conseil des ministres, Christophe Béchu, ministre de la Cohésion des territoires a fait savoir que le texte sera soumis au Sénat mardi prochain, puis jeudi à l'Assemblée nationale. Objectif affiché : permettre au gouvernement de prendre des mesures par ordonnance afin d'accélérer la reconstruction des biens dégradés dans le cadre des émeutes urbaines.
Un total de 500 communes ont été touchées « à un titre ou un autre » par les émeutes, avec 700 bâtiments ayant subi des « dégâts très substantiels » et une cinquantaine ayant été « complètement démolis » (photo d'illustration).
Un total de 500 communes ont été touchées « à un titre ou un autre » par les émeutes, avec 700 bâtiments ayant subi des « dégâts très substantiels » et une cinquantaine ayant été « complètement démolis » (photo d'illustration). (Crédits : DR)

Le projet de loi « d'accélération de la reconstruction des bâtiments dégradés » au « cours des violences urbaines » sera soumis mardi au Sénat, puis jeudi prochain à l'Assemblée nationale, a annoncé le ministre de la Cohésion des territoires Christophe Béchu, ce jeudi 13 juillet. Un total de 500 communes ont été touchées « à un titre ou un autre » par les émeutes, avec 700 bâtiments ayant subi des « dégâts très substantiels » et une cinquantaine ayant été « complètement démolis ».

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 « L'enjeu de ce projet de loi, c'est d'autoriser le gouvernement à prendre par ordonnance des mesures dans trois domaines permettant une accélération », a-t-il expliqué à la presse, à l'issue du Conseil des ministres qui a adopté le texte.

Suppression de l'obligation de publicité

Dans le détail, les trois domaines correspondent aux trois articles de ce texte court, dont la première version en comptait quatre. Le projet de loi avait été promis par Emmanuel Macron le 4 juillet dernier. Objectif, accélérer la reconstruction dans les villes touchées par les émeutes consécutives à la mort du jeune Nahel, tué par le tir d'un policier lors d'un contrôle routier à Nanterre le 27 juin.

Le premier article concerne l'urbanisme. Il permet notamment « le déclenchement immédiat des travaux dès le dépôt de la demande d'autorisation », afin de « raccourcir les délais auxquels l'administration » est habituellement tenue, a fait valoir le ministre.

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Le second porte sur la commande publique. Cette dernière passe habituellement par des appels d'offres. « Nous envisageons de supprimer l'obligation de publicité, qui entraîne des semaines incompressibles pendant lesquelles vous devez attendre les offres », a souligné Christophe Béchu.

« Nous ne remettons absolument pas en cause la nécessité de faire en sorte qu'il y ait une consultation et une comparaison d'offres différentes », a-t-il nuancé.

LFI réclame « un fonds d'indemnisation exceptionnel »

Enfin, le troisième article permettra aux collectivités de récupérer la TVA dans l'année en cours, sans attendre les deux ans de délai actuel. « Nous créons également la possibilité d'un zéro reste à charge pour les collectivités concernées, en supprimant les conditions minimales de participation » qui est d'au moins 20%, a indiqué le ministre.

De leur côté, les députés LFI ont déposé leur propre proposition de loi. Celle-ci prévoit de réclamer « une indemnisation intégrale et sans reste à charge des particuliers, commerces, associations et services publics sinistrés lors des révoltes urbaines ».

Ils réclament la création d'un « fonds d'indemnisation exceptionnel », « géré par l'Etat » et « abondé par la contribution des compagnies d'assurance » pour l'indemnisation des PME et particuliers. Ils souhaitent aussi un fonds de « solidarité et d'aide à la reprise économique » des PME, financé par une taxe sur les superprofits des plus grosses entreprises.

Plus de 11.000 sinistres déclarés aux assureurs

Les dégradations liées aux violences urbaines vont coûter 650 millions aux assureurs, selon les dernières estimations publiées mardi 11 juillet par leur fédération professionnelle, soit plus du double des 280 millions d'euros anticipés la semaine dernière. Les neuf dixièmes « du coût de ces violences urbaines concernent les 3.900 biens des professionnels et des collectivités locales sinistrés », a précisé la présidente de France Assureurs, Florence Lustman, citée dans un communiqué. Le reste concerne essentiellement des dégâts subis par des particuliers pour leurs véhicules personnels.

La fédération décompte 11.300 déclarations de sinistres liées aux violences. Dans le détail, les sinistres sur les biens professionnels représentent 55% des 650 millions d'euros évoqués, et ceux sur les biens des collectivités locales 35%, précise France Assureurs. Spécialisée dans les collectivités, SMACL Assurances, filiale de l'assureur mutualiste MAIF, a comptabilisé pour près de 100 millions d'euros dégâts répartis dans 337 collectivités territoriales (sur 446 affectées au total).

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De son côté, Groupama estime sa facture à près de 40 millions d'euros, dont 75% liés aux collectivités. Dès le 1er juillet, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait demandé aux assureurs de prolonger les délais de déclaration, de réduire les franchises et d'indemniser rapidement les professionnels victimes des émeutes, envers qui les banques étaient également appelées à faire preuve de compréhension.

La fédération professionnelle avait invité trois jours plus tard ses membres à « réduire » les franchises pour les « petits commerçants indépendants les plus durement touchés » par les violences urbaines. Elle a été entendue par certains mutualistes, comme Covea (marques MMA, MAAF et GMF), Macif, ainsi que par les bancassureurs BPCE, Crédit Agricole ou Crédit Mutuel Alliance Fédérale (qui réunit 14 des 18 fédérations du groupe mutualiste ainsi que CIC), qui ont annoncé des mesures pour les victimes. Axa, Generali ou encore la Société Générale avaient aussi emboîté le pas.

Une aide de 15 millions d'euros de la Métropole du Grand Paris

La Métropole du Grand Paris (MGP) a voté ce jeudi un fonds de soutien de 15 millions d'euros pour près de 90% de ses communes touchées par les violences urbaines au début de l'été. Voté à l'unanimité des élus métropolitains, ce fonds de soutien servira notamment à la « reconstitution du mobilier urbain et des véhicules endommagés », ainsi qu'à la réhabilitation des bâtiments publics touchés, a indiqué le président (LR) de la MGP Patrick Ollier, en séance.

Parmi les 131 communes qui composent la MGP, « 115 ont été touchées, soit 87% », a-t-il précisé devant Patrick Jarry, le maire de Nanterre, où la mort de Nahel, causée par le tir d'un policier, a été le point de départ de ces émeutes qui se sont étendues à de nombreuses villes de France. Ce fonds de soutien interviendra « après épuisement des assurances » et des autres aides exceptionnelles, notamment celle de la région Ile-de-France, a précisé le vice-président aux finances, Philippe Laurent (UDI).

La région, dirigée par Valérie Pécresse (LR), a adopté début juillet un « fonds d'urgence » de 20 millions d'euros - 18 pour les communes et 2 pour les commerçants et artisans - pour ses 140 villes touchées, la majorité d'entre elles se situant aussi dans la métropole. La métropole a également adopté à l'unanimité une dotation de solidarité communautaire (DSC) d'un montant de 42 millions d'euros pour aider ses communes à faire face aux difficultés du moment, comme les « prix de l'énergie », « l'inflation » et la « baisse des dotations de l'Etat ».

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 15/07/2023 à 21:48
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Encore une loi! Vu le délai de confection, la navette, la conciliation, c'est une tentative pour esquiver d'indemniser? Parce que les bâtiments auront, heureusement, été reconstruits avant la promulgation.

à écrit le 13/07/2023 à 16:11
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Au contraire il ne faut rien reconstruire tant que les responsables ne sont pas identifiés. En plus il faut interdire la reconstruction si elle n'est pas ignifuge parce que c'est juste une question d'opportunité et ça va recommencer

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