Lutte contre l'argent sale : la France engage la bataille pour accueillir le gendarme européen

Les ministres Bruno Le Maire (Economie) et Laurence Boone (Affaires européennes) ont lancé en grande pompe la candidature de Paris pour recevoir le siège de l'autorité européenne de lutte contre le blanchiment des capitaux. Mais en face, les grandes métropoles du Vieux continent en lice comptent bien défendre leur place dans cette rude bataille.
Grégoire Normand
Laurence Boone et Bruno Le Maire lors du lancement de la candidature de Paris pour accueillir le siège de l'autorité de lutte contre l'argent sale.
Laurence Boone et Bruno Le Maire lors du lancement de la candidature de Paris pour accueillir le siège de l'autorité de lutte contre l'argent sale. (Crédits : Reuters)

La France va-t-elle devenir la place forte de la lutte contre l'argent sale en Europe ? C'est en tout cas l'ambition affichée par le gouvernement d'Elisabeth Borne. Réunis au ministère des finances ce vendredi 16 novembre, Bruno Le Maire (Economie) et la secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Laurence Boone ont défendu la candidature de Paris pour accueillir l'autorité européenne de lutte contre le blanchiment d'argent (AMLA, anti-Money-Laundering Authority).

Devant un parterre d'ambassadeurs, de députés européens et de pontes de l'administration française, les deux ministres ont sorti les muscles pour rappeler les ambitions tricolores. « Cette candidature a beaucoup de sens et me semble indispensable. Notre volonté est de coordonner les actions à l'échelle européenne, de faire circuler l'information entre les services de renseignement », a martelé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire. Invoquant la récente attaque du Hamas contre lsraël, le locataire de Bercy a rappelé « la nécessité de lutter contre le financement du terrorisme. Il n'y pas de démocratie possible quand l'argent échappe aux lois et sert à financer des adversaires de la démocratie ».

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À cela s'ajoutent la traque des avoirs financiers russes dans le contexte de la guerre en Ukraine, la fraude fiscale et le blanchiment d'argent sale. Les révélations fracassantes menées par des médias européens sur le rôle de Chypre dans le blanchiment de capitaux russes poussent, en effet, les autorités à se doter d'organes de surveillance et de contrôle renforcés. « Dans le monde, les montants d'argent sale sont estimés à 5% du PIB mondial », a souligné Laurence Boone. Ce qui représente 5.000 milliards de dollars. Mais il s'agit d'une estimation dans la fourchette haute selon le Fonds monétaire international.

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Une concurrence féroce en Europe

Sur le Vieux continent la concurrence promet d'être rude. Au total, neuf pays ont candidaté pour recevoir le siège de la nouvelle autorité. Parmi les candidatures marquantes, figurent Francfort ou siège déjà la Banque centrale européenne, Madrid, Rome ou encore La Haye.

Après le Brexit voté en 2016, les capitales avaient déjà engagé une bataille féroce pour obtenir le siège de l'autorité bancaire européenne chargé de surveiller les acteurs du secteur. En 2019, Paris avait remporté la mise face à de sérieux concurrents. À l'époque déjà, le ministre Bruno Le Maire avait mis les bouchées doubles pour attirer cette autorité. Mais dans l'entourage du ministre, on ne cache pas « qu'il y a de sérieux candidats en face ».

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L'Etat français est prêt à mettre 15 millions d'euros

Portée par l'ancien patron de l'autorité des marchés financiers (AMF) Robert Ophèle, la candidature de Paris pourrait bénéficier d'un soutien de l'Etat de 15 millions d'euros a annoncé le ministre de l'Economie. « Notre sécurité est à ce prix », a expliqué Bruno Le Maire. Actuellement à la recherche d'économies, le gouvernement s'est dit prêt à faire un geste. À la clé, l'autorité prévoit l'embauche de 400 personnes sur un site encore à déterminer.

Pour appuyer cette candidature tricolore, la secrétaire aux affaires européennes a vanté les atouts de la capitale française. « Paris accueille déjà le GAFI (Groupe d'action financière à l'OCDE). Installer cette nouvelle autorité va permettre de faciliter le dialogue avec le GAFI », a expliqué l'ex-cheffe économiste de l'OCDE, habituée des discussions multilatérales. D'un point des ressources humaines, elle a également pointé les écarts avec les pays voisins de la France. « Aujourd'hui 1.000 agents travaillent dans des agences européennes à Paris contre 2.000 en Espagne ou en Italie ou 5.000 en Allemagne ».

Trois sites sur la liste en Ile-de-France

Comme l'a révélé La Tribune, il y a quelques jours, la France mise sur trois sites dans la capitale pour faire aboutir cette candidature. « Deux sites sont disponibles à la Défense et une implantation pourrait se faire à Gare de Lyon », a expliqué Robert Ophèle. Au total, la surface doit faire environ 10.000 mètres carrés.  « C'est un immeuble qui aura besoin d'un haut niveau de sécurité », a souligné l'actuel président de l'autorité des normes comptables. Le site choisi aura besoin « de flexibilité et de modularité », a-t-il ajouté.

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Des incertitudes sur le calendrier

S'agissant de la date de validation du dossier, Bercy n'a pas donné de précision. «L'audition publique des 9 candidatures doit se faire je l'espère avant la fin de l'année. Ce qui pourrait permettre de trancher la localisation avant la fin de la mandature du parlement et de la commission prévue en juin 2024  », a déclaré Robert Ophèle. En coulisses, plusieurs sources ont confié à La Tribune espérer une décision entre février et mars. Et même si cette décision aboutissait au premier trimestre, l'installation de cette nouvelle autorité prendrait sans doute encore des mois avant de se concrétiser.

Grégoire Normand
Commentaires 13
à écrit le 18/11/2023 à 23:57
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Quel meilleur pays que celui des politiciens véreux. Comme dirais Mister bean le grand stratège : " pour surveiller tes ennemies gardent les près de toi."

le 19/11/2023 à 9:50
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@Azerty. Tellement juste👍👏

à écrit le 18/11/2023 à 18:53
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@Henry : C'est vrai que les électeurs pensent tous que l'élu sera à la hauteur de leurs responsabilité, mais c'est oublier que la force de l'élu est proportionnelle au nombre de voix qu'il aura reçues. Un président de la république a rarement plus du...

à écrit le 18/11/2023 à 8:58
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Houla, houla, houla, attendons de voir ce qu'elle va faire cette énième institution européenne, l'UE nous ayons surtout habitués à générer des institutions inutiles afin d'y placer leurs multiples réseaux incompétents et gourmands. Même si la toute j...

à écrit le 18/11/2023 à 7:58
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vous me faites rigoler, c'est pour le bon peuple. Ici en Thailande, les valises et les comptes n’arrêtent pas de pleuvoir sans "compter" les russes. Vous allez encore emm***r le français moyen

le 18/11/2023 à 9:51
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c'est la meilleur des solutions il y a deja tres longtemps que le trafic se realise avec la chine pays ou il est impossible d'avoir un control c'est la solution de tout faire de ce pays soit un transit soit un pays ou ont est oblige d'acheter

à écrit le 18/11/2023 à 6:56
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Je connais un moyen de faire venir cette autorité en France : fermons le parlement de Strasbourg, et ainsi arrêtons ces trajets aberrants entre Strasbourg et Bruxelles. En contrepartie implantons cette autorité à Strasbourg. Mais que de cris entendra...

à écrit le 17/11/2023 à 23:01
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Preside par Sarkozy, ou Cahuzac, ou Fillon, ou le Pen, ou Cazeneuve, ou, ou.......

à écrit le 17/11/2023 à 20:02
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Nous sommes le 17 novembre pas le 01 avril 🐟.

à écrit le 17/11/2023 à 19:18
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La France accueillant un organisme européen contre l'argent sale? C'est une blague dont on doit rire dans toutes les autres capitales; nos actuels ministres sont déjà incapables d'équilibrer le budget de l'Etat; sans doute ces ministres songent-ils à...

le 17/11/2023 à 22:05
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Aucun ministre ne présentera un budget équilibré tant que les électeurs n'en voudront pas où tant que le FMI ne frappera pas à la porte. Quand la majorité des électeurs en veulent toujours plus quitte à s'endetter jusqu'au cou, il est impossible de t...

le 17/11/2023 à 23:52
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@Tototiti: Quand les électeurs - au moins ceux qui votent - élisent ceux qui seront les gestionnaires aux affaires, ils pensent que ces gestionnaires seront à la hauteur de leurs responsabilités, qui est de tenir les comptes; si ces électeurs sont dé...

le 18/11/2023 à 9:12
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@henry. [C'est un comble de constater que le monde actionnarial de l'entreprise est plus démocrate que le monde politique] Quelle magnifique vérité👏👍

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