Planification écologique : à Metz, Béchu donne le coup d'envoi des COP régionales

REPORTAGE. La première conférence des parties (COP) régionale voulue par le gouvernement s'est tenue à Metz ce 14 novembre. Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu y a justifié la planification devant des élus locaux parfois inquiets. Les écologistes pensent, au contraire, qu'elle ne va pas assez loin. Explications.
Pendant deux heures ce 14 novembre à Metz, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu (photo), a expliqué les modalités de la planification écologique territoriale aux élus du Grand-Est.
Pendant deux heures ce 14 novembre à Metz, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu (photo), a expliqué les modalités de la planification écologique territoriale aux élus du Grand-Est. (Crédits : Olivier Mirguet)

C'était la grande promesse d'Emmanuel Macron, candidat à sa réélection. En meeting à Marseille, le président de la République avait annoncé qu'il nommerait un Premier ministre chargé de la planification écologique, ainsi qu'un ministre « chargé de la planification écologique territoriale ». Une ambition confirmée le 28 septembre par la locataire de Matignon au lendemain d'un Conseil de planification écologique organisé à l'Elysée: Elisabeth Borne adressait le mode d'emploi aux préfets pour territorialiser.

Lire aussiPlanification écologique: Elisabeth Borne promet des COP régionales, Carole Delga demande du concret

Des paroles aux actes, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, s'est rendu dans le Grand-Est ce 14 novembre pour la première conférence des parties (COP) régionale. Objectif: proposer de décliner à l'échelle territoriale des enjeux planétaires : réduire les émissions de gaz à effet de serre, préserver la biodiversité et s'adapter au dérèglement climatique (cf. encadré).

« Ce n'est pas le Gosplan qui débarque sur le territoire » (Pellion)

En présence de conseillers régionaux, d'élus locaux et de quelques représentants d'associations pour la défense de l'environnement, venus faire entendre leurs voix, le secrétaire général à la Planification écologique (Matignon), a déployé son jeu en finesse: « Ce n'est pas le Gosplan qui débarque sur le territoire », a prévenu Antoine Pellion, dans son intervention au centre de la salle trop grande du palais des congrès de Metz.

« Le Grand-Est apparaît comme un bon élève dans le cadre de la transition écologique avec le nucléaire, l'éolien, la méthanisation, le photovoltaïque », a appuyé la préfète de région, Josiane Chevalier.

Face à eux, le président (ex-Horizons) du conseil régional du Grand-Est, Franck Leroy, a rappelé que la collectivité n'avait pas attendu l'injonction ministérielle pour établir un état des lieux et élaborer son plan d'adaptation au changement climatique, avec neuf défis opérationnels (autonomie alimentaire, usage des sols, mobilité décarbonée...) identifiés depuis juillet 2023.

A Rethel (Ardennes), le ZAN interroge

Son vice-président (Les Centristes) du Grand-Est chargé de la transition écologique et énergétique, François Werner, s'est, lui, réjoui à l'avance de« recentrer les politiques publiques » à l'aune des enseignements la COP, expliquant que « les conséquences des canicules et des événements climatiques extrêmes sont déjà visibles ici » et que « l'inaction a un coût ».

Dans l'auditoire, des élus locaux n'ont pas tardé à jouer leur partition individuelle. Renaud Averly, président (divers droite) de la communauté de communes du pays de Rethel (Ardennes), a tiré le premier, exprimant ses doutes quant aux règles établies par la loi relative à la ZAN (zéro artificialisation nette) des sols.

« Les Ardennes ont investi plus de 300 millions d'euros depuis vingt ans pour créer de grandes infrastructures, sans avoir trop recours à l'artificialisation des sols. Nous avons créé des outils pour un développement à venir, et maintenant on nous dit que la consommation du foncier devra se limiter à 50 % des surfaces consommées ces dix dernières années. On nous autorise à développer 50 % de rien, parce qu'on n'avait rien », déplore l'élu de ce territoire rural de 65 communes, proche de la frontière avec la Belgique.

« Il n'y a pas de bonne et de mauvaise artificialisation. Le nombre d'hectares n'est pas la bonne mesure », a répliqué Christophe Béchu, enclin à arrondir les angles.

Les écologistes attaquent

Dans la foulée, Eliane Romani, cheffe de file des élus écologistes au conseil régional du Grand-Est, a interpellé le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires sur l'enfouissement de 42.000 tonnes de déchets toxiques sur le site de StocaMine, épine dans le pied du ministère et sujet de crispations en Alsace. L'élue mosellane, dont la liste avait obtenu 20,5 % des voix aux dernières élections régionales, a tenté de porter le débat sur le nucléaire, considérant que la COP devait aussi englober la question de l'enfouissement de ces déchets.

Lire aussiDéchets toxiques : la concertation déjà enterrée pour Stocamine

Agacé par le comportement des militants écologistes qui filmaient son intervention, Christophe Béchu a fourni une réponse technique et annoncé la création d'un fonds, dans la loi de finances 2024, qui permettra un déstockage futur des déchets. « Si on ne fait rien, si on ne confine pas (...), on risque une contamination de la nappe d'Alsace. Donc il faut confiner », a ainsi martelé le ministre.

Stéphane Giraud, directeur de l'association Alsace Nature, a essayé, lui, d'enfoncer le clou en évoquant les combats des opposants aux constructions de nouvelles autoroutes, dans une allusion faite au combat perdu contre le grand contournement ouest de Strasbourg inauguré en décembre 2021.

« Le monde ne vaut que par les extrêmes et ne dure que par les moyens », a répondu Christophe Béchu, citant Paul Valéry dans une improbable digression philosophique.

Évoquant l'opposition des écologistes à l'aviation privée, le ministre a repris le contrôle du débat, insistant sur son « refus de faire du greenwashing de la lutte des classes ».

Vers une COP tendue chez Wauquiez ?

Dans ces conditions, les COP régionales vont-elles devenir le théâtre des expressions de toutes les oppositions locales ?

« C'est toujours une chance d'avoir des gens qui expriment une pensée contradictoire ou opposée dans une enceinte, plutôt qu'à l'extérieur. Je préfère être pris à parti, que ces COP soient l'occasion de discuter de sujets complexes, plutôt qu'on mette la poussière sous le tapis », a souligné le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, sollicité par La Tribune.

Un tour de France qui se terminera le 21 décembre en Auvergne-Rhône-Alpes. Un rendez-vous avec le président (LR) Laurent Wauquiez qui promet d'être houleux. « Aucune région ne nous a dit qu'elle n'envisageait pas de COP. Toutes sont sur le point de jouer le jeu », assure Christophe Béchu.

Lire aussiAménagement : Wauquiez peut-il vraiment retirer l'Auvergne-Rhône-Alpes du zéro artificialisation nette des sols (ZAN) ?

Des objectifs chiffrés sous six mois

Dans chaque région, les conseils régionaux associés avec les préfets devront établir un état de lieux de leurs enjeux environnementaux, et proposer leur feuille de route à l'horizon en phase avec les objectifs nationaux. Ils auront six mois pour établir des objectifs chiffrés, avec l'appui des agences de l'Etat (Ademe) et de ses pôles d'expertise financière (Banque publique d'investissement, Banque des territoires). Les plans d'actions partagées viseront notamment à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % d'ici à 2030.

Commentaire 1
à écrit le 15/11/2023 à 7:53
Signaler
Vu l'age avancé de os élus locaux et régionaux il est évident que de leur parler d'écologie, un concept nouveau pour eux et donc sans contour précis, n'est pas du luxe

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.