Planification écologique : Emmanuel Macron attendu au tournant

Après son intervention aux JT de France 2 et TF1, Emmanuel Macron doit tracer ce lundi le cap de la planification écologique pour les quatre prochaines années. Pressé par l'accélération du réchauffement climatique et la dépendance de la France aux énergies fossiles, le chef de l'Etat a déjà annoncé la sortie du charbon d'ici à 2027. À la veille de la présentation du budget 2024, les experts espèrent obtenir des précisions sur l'épineuse question du financement de la transition sur plusieurs années.
Grégoire Normand
Macron doit fixer le cap de la planification écologique ce lundi.
Macron doit fixer le cap de la planification écologique ce lundi. (Crédits : Reuters)

« Le second quinquennat sera écologique ou ne sera pas ». En pleine campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait promis en 2022 de passer à la vitesse supérieure sur la transition écologique. Un an après, le gouvernement est attendu au tournant sur sa feuille de route des quatre prochaines années. Pressé par l'accélération du réchauffement climatique, le chef de l'Etat doit fixer le cap de la planification écologique ce lundi après-midi à l'issue d'un conseil en présence de la Première ministre Elisabeth Borne et d'autres poids lourds de l'exécutif.

Initialement prévue au début de l'été, cette présentation a été percutée par les émeutes de fin juin qui ont embrasé les quartiers sensibles. L'objectif pour la France est de baisser les émissions de CO2 de 55% (le plan « Fit for 55 ») d'ici à 2030 par rapport à 1990. « C'est une ambition extrêmement élevée et il faudra une mobilisation de tous les instants pour tenir ces objectifs dans la durée. C'est d'ailleurs bien l'objectif de ce plan, de détailler, année après année, comment nous allons faire sur la voiture, sur l'agriculture pour atteindre nos objectifs », a expliqué l'entourage du président en amont de la réunion de lundi. Autant dire que le défi est immense pour le chef de l'Etat confronté à une pluie de critiques. « Nous avons fait la moitié du chemin », a déclaré le chef de l'Etat dimanche sur TF1 et France Télévision, en indiquant que les émissions de gaz à effet de serre avaient baissé plus vite au cours des cinq dernières années qu'au cours des cinq années précédentes.

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La souveraineté au coeur de la planification

La souveraineté devrait être au coeur des annonces du président de la République. Entre la pandémie mondiale, la guerre en Ukraine et la flambée des prix de l'énergie, les crises successives ont jeté une lumière crue sur l'extrême dépendance de la France et de l'Europe à l'égard des pays étrangers, et notamment de l'Asie et de la Russie.

Face à ces multiples dépendances, le chef de l'Etat devrait mettre l'accent sur les efforts en matière d'approvisionnements en matériaux critiques ou la construction d'usines de batteries électriques. Mais il devrait aussi insister sur la décarbonation de l'industrie. « Je crois à une écologie à la française, une écologie de progrès », a déclaré Emmanuel Macron. « L'objectif de la planification, ce n'est pas d'opposer les enjeux économiques et les enjeux d'écologie mais bien de réaffirmer que finalement, la souveraineté, c'est l'écologie et l'économie dans une même logique et dans une même dynamique », soulignent ses conseillers. La réduction de cette dépendance à l'étranger devrait permettre de « sortir plus rapidement des énergies fossiles », ajoute l'Elysée.

Conversion à la biomasse des deux dernières centrales à charbon

Emmanuel Macron a annoncé dimanche que la France sortira du charbon d'ici à 2027, en convertissant à la biomasse ses deux dernières centrales, celles de Cordemais (ouest) et Saint-Avold (est). Cette dernière avait fermé début 2022, mais avait de nouveau été sollicitée l'hiver dernier pour sécuriser l'approvisionnement du pays dans un contexte de tension énergétique. Pour Cordemais, un projet de conversion est déjà acté. Le chef de l'Etat a également indiqué que les chaudières à gaz ne seront pas interdites. « On n'interdira pas » l'installation de chaudières à gaz neuves, « parce qu'on ne peut pas laisser nos compatriotes, en particulier dans les zones les plus rurales, sans solution », a-t-il expliqué en plaidant pour « accompagner les ménages pour s'équiper de pompes à chaleur ». Le chef de l'Etat a dans le même temps annoncé un triplement de la production de pompes à chaleur.

« On réindustrialise par l'écologie », a-t-il encore assuré, citant également le cas des véhicules électriques, que la France pourra produire sur son sol (« au moins un million » d'ici la fin du quinquennat, a-t-il assuré).

L'épineuse question du financement

Ce lundi, le chef de l'Etat devrait également aborder l'épineuse question du financement de la transition écologique. À quelques jours de la présentation du budget 2024, les ministres de Bercy finalisent leur texte sur la transition. Les conseillers de l'Elysée ont rappelé les 7 milliards d'euros supplémentaires dédiés à la transition l'an prochain (soit 40 milliards d'euros) et les 3 milliards d'euros de financement pluriannuels au-delà de 2024.  « On se réjouit de cette hausse des crédits pour le climat. C'est une hausse assez élevée », a déclaré l'économiste de l'institut de l'économie pour le climat (I4CE) Erwann Kerrand, lors d'un récent point presse.  Mais sur cette enveloppe globale, le député (LFI) et patron de la commission des finances à l'Assemblée nationale, Eric Coquerel, s'est interrogé sur la part réelle des nouveaux crédits. « Cette enveloppe va dans le bon sens, estime Emeline Notari, en charge de la fiscalité au Réseau action climat (RAC) interrogé par La Tribune. Mais on ne voit pas ce qu'il y a vraiment de nouveau », a-t-elle ajouté.

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S'agissant des recettes, l'exécutif compte sur les économies à réaliser notamment grâce à la fin progressive du bouclier tarifaire pour financer une partie des investissements pour l'année prochaine. « Pour 2024, la piste des économies est réaliste avec l'extinction des boucliers tarifaires pour faire face à la hausse des tarifs de l'énergie. Mais la piste des économies sera plus difficile pour les années suivantes », a poursuivi Erwan Kerrand. L'exécutif a certes évoqué plusieurs pistes de taxation sur les infrastructures de transport, le gaz ou la baisse des niches fiscales. « Ces pistes seront-elles suffisantes pour les années d'après ? », s'interroge l'expert. Au moment où la Banque centrale européenne (BCE) a encore prévu de durcir sa politique monétaire, l'exécutif dispose de peu de marges de manœuvre pour financer les milliards de la transition.

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Macron face au risque d'embrasement

Rendue nécessaire par la multiplication des catastrophes climatiques, la transition soulève la question explosive du risque d'embrasement. Déjà en 2018, la hausse de la taxe carbone avait mis le feu aux poudres autour des ronds-points partout en France. Des millions de Français vêtus de gilets jaunes avaient manifesté contre la hausse du prix des carburants. A l'époque, Emmanuel Macron avait déminé le terrain en faisant une rallonge budgétaire globale d'environ 20 milliards d'euros.

Dans le contexte de la planification, de nombreux Français seront confrontés à une hausse des dépenses pour rénover leurs logements ou changer de véhicules. Et même si le gouvernement a mis sur la table plusieurs options (leasing à 100 euros pour les voitures électriques, aides à la rénovation, prime de 100 euros pour les automobilistes par an et par voiture) pour limiter les répercussions de ces dépenses sur les plus modestes, la montagne d'investissements à réaliser pourrait être très difficile à surmonter pour des millions de Français.

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L'adaptation, angle mort des débats de la transition

La stratégie d'Emmanuel Macron devrait porter sur les efforts à mener pour chaque secteur économique et aussi la biodiversité. En revanche, l'adaptation au réchauffement pourrait être un angle mort de la planification écologique. Déjà sur l'enveloppe des 7 milliards d'euros, « il n'y pas de chiffrage des besoins sur l'adaptation dans le cadre de la planification écologique », a regretté Erwan Kerrand. L'économiste espère « une hausse des crédits pour la sécurité civile avec les besoins accrus sur les feux de forêt par exemple ou les politiques de gestion du littoral », dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024.

L'autre sujet majeur qui risque de passer à la trappe est celui de la sobriété. En 2022, la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine et les déboires de l'industrie nucléaire avaient mis ce sujet sur le devant de la scène. A l'époque, les pouvoirs publics avaient multiplié les appels à réduire la consommation. Reste à savoir si Emmanuel Macron va réitérer cet appel.

Lire aussiClimat : la sobriété est « urgente » mais pas forcément la décroissance, selon l'Académie des technologies

Grégoire Normand
Commentaires 15
à écrit le 25/09/2023 à 15:00
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Ayant regardé-écouté sa prestation au 20h, j'ai constaté qu'il ne veut pas supprimer le chauffage au gaz pour ne pas pénaliser les petites gens en zone rurale aux faibles revenus. Mais qu'il est content d'avoir mis fin aux nouvelles installations de ...

à écrit le 25/09/2023 à 14:14
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Parler pour rien dire ...Le vide et le neant ...ils nous amène au chaos

à écrit le 25/09/2023 à 13:32
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"le chef de l’État a déjà annoncé la sortie du charbon d'ici à 2027" Faudra qu'il évoque ce sujet avec l’Allemagne, ah,ah.« Le second quinquennat sera écologique ou ne sera pas ». Et pendant ce temps , Airbus qui a conclut une commande record de 5...

à écrit le 25/09/2023 à 12:43
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Et sinon, pendant qu'il fait des ZFE ambitieuses auxquelles tt le monde renonce en dernière minute , du transit ecolo dans le bâtiment qui n'en finit plus de créer des pbs sans résultats probants, de la casse ecolo de tous les cotes, tout en ressor...

à écrit le 25/09/2023 à 12:00
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La planification écologique francaise n'aura à l'échelle de la planète aucun impact quand des pays comme la Chine, l'Inde, les US, l'Allemagne, la Pologne la Russie brûlent des quantités (Toujours en Augmentation) de pétrole, de charbon, de gaz.

le 25/09/2023 à 15:02
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Il est clair que nous, France, n’avons que très peu d’impact sur le volume de CO2 dans l’atmosphère ou de méthane comparativement à d’autres Pays….. Par contre nous avons à préparer la fin du pétrole et du gaz en développant l’électricité et à traite...

à écrit le 25/09/2023 à 8:48
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J'attends toujours mais je suis le seul à ce qu'il nous explique sa politique dans les domaines de l'énergie, de l'immigration, de la santé et de l'éducation, et comment réduire notre dette afin de trouver un peu de crédibilité. Le reste c'est du bav...

le 25/09/2023 à 11:37
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Pourriez vous faire une phrase en fraçais, histoire qu'on comprenne ce que vous tentez d'écrire...

à écrit le 25/09/2023 à 8:45
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qu'il vienne au MANS sur les terres de la famille FIllon ,et constate la polution, pas celle des gars qui vont au boulot mais celle des 24h auto,24 h voitures anciennes, 24 h kartings,4 h motos , grand prix moto ,24 h camions, courses de tracteur ,co...

à écrit le 25/09/2023 à 8:45
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Et pourquoi pas un emprunt national ? La France est le 2 eme pays le plus riche en Europe et à la 1 ère épargne du continent .. source Européenne de 2022…. Les commentaires sue ce média sont tout le temps gémissant .. sans doute pour a faire oublier...

le 25/09/2023 à 11:06
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@Gogodu79. Ah bon, vous voulez réitérer les mauvaises expériences des emprunts (hybrides) du Trésor à la française? Le système de Law en 1716 sera déjà un échec (amenant spéculation et ruine). Puis l'assignat de 1789, dont la valeur sera gagée sur le...

à écrit le 25/09/2023 à 8:45
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Et pourquoi pas un emprunt national ? La France est le 2 eme pays le plus riche en Europe et à la 1 ère épargne du continent .. source Européenne de 2022…. Les commentaires sue ce média sont tout le temps gémissant .. sans doute pour a faire oublier...

à écrit le 25/09/2023 à 8:18
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Sans économie circulaire et sans protectionnisme ce n'est qu'un pur fantasme et vu l'état de notre planète cela commence même à devenir indécent.

à écrit le 25/09/2023 à 7:55
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Ou..., comment continuer à détruire les services publics pour des motifs "écologiques" que l'on confiera à des acteurs privées !

à écrit le 25/09/2023 à 7:31
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Le financement ne peut à ce stade venir que d’une seule source: la réallocation de la dépense publique. Tout le reste n’est que faillite et mensonge!

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