Etats-Unis : le gendarme de la concurrence veut mettre fin aux clauses de non-concurrence imposées aux salariés

L'Autorité américaine de la concurrence (FTC) se prépare à interdire les clauses de non-concurrence imposées aux salariés, estimant que cette mesure pourrait augmenter leurs revenus de près de 300 milliards de dollars par an, une initiative dont la légalité est déjà contestée.
La présidente de la FTC, Lina Khan, estime qu'interdire les clauses de non-concurrence serait bon pour les travailleurs américains
La présidente de la FTC, Lina Khan, estime qu'interdire les clauses de non-concurrence serait bon pour les travailleurs américains (Crédits : Pool/Sipa USA via Reuters Connect / Reuters)

Bientôt une avancée dans le droit du travail américain? C'est ce à quoi veut arriver l'Autorité américaine de la concurrence (FTC) qui a publié, jeudi, un texte visant à interdire les clauses de non-concurrence imposées aux salariés.

Une clause de non-concurrence est une disposition insérée dans un contrat de travail qui, en cas de rupture du contrat, empêche l'ancien salarié d'exercer des fonctions équivalentes chez un concurrent ou à son propre compte. Elle est limitée dans le temps ainsi que géographiquement et en général encadrée par la législation des États. Certains d'entre eux en ont déjà restreint l'utilisation, la Californie l'ayant même prohibée.

En France, ces clauses sont aussi autorisées mais elles doivent respecter certains critères comme être écrites dans le contrat de travail (ou prévue dans la convention collective), être applicables uniquement si elles veillent à protéger les intérêts de l'entreprise (quand le salarié est en contact direct avec la clientèle par exemple), et elles ne doivent pas empêcher le salarié de trouver un emploi ailleurs.

Lire aussiAntitrust : l'administration Biden a-t-elle encore les moyens de ses ambitions ?

Une pratique désavantageuse pour les salariés et les entreprises

« Les clauses de non-concurrence empêchent les travailleurs de changer librement d'emploi et les privent de salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail », a fait valoir la présidente de la FTC, Lina Khan, citée dans un communiqué publié jeudi. Selon elle, ces dispositions contractuelles « privent également les entreprises d'un réservoir de compétences dont elles ont besoin pour bâtir et croître ». En mettant fin à cette pratique, cela « favoriserait davantage de dynamisme, d'innovation et une saine concurrence », a plaidé la responsable. Elle estime aussi que leur interdiction pourrait augmenter leurs revenus de près de 300 milliards de dollars par an

Selon une étude publiée en 2021 dans le Journal of Law and Economics, environ 18% des travailleurs aux Etats-Unis étaient liés par une clause de non-concurrence. Cette étude avait montré que si les clauses de non-concurrence étaient plus courantes au sein des professions à niveau de qualification élevé, elles étaient aussi répandues dans les métiers à faible rémunération. Elle avait également mis en évidence le fait qu'elles contrevenaient régulièrement à la législation des Etats dans lesquels elles étaient utilisées.

Lire aussi« Concurrence potentielle », le nouvel enjeu en Europe ?

Une mesure qui a peu de chances d'être adoptée

 La question de ces clauses a d'abord été mise sur la table par Joe Biden qui a signé un décret contre ces mesures le 9 juillet 2022. Ce décret mentionnait de nombreuses initiatives à mettre en place, comme la fin de clauses de non-concurrence, la transparence accrue sur les frais de bagages ou d'internet, plus de surveillance des géants de la tech, dans l'objectif de « promouvoir la compétition dans l'économie américaine, ce qui va faire baisser les prix pour les familles, monter les salaires des travailleurs, favoriser l'innovation et même alimenter une croissance encore plus forte », avait déclaré le président américain. Problème, le décret n'imposait pas de décisions immédiates, mais encourageait les agences gouvernementales à prendre des mesures. Le texte de la FTC représente donc une deuxième étape dans la lutte contre les clauses de non-concurrence. Mais là encore, rien n'est joué.

Lire aussiÉtats-Unis : inflation, emploi, prix de l'essence... Joe Biden joue la majorité démocrate aux élections de mi-mandat

Le texte proposé jeudi va être soumis à consultation durant 60 jours, et rien ne garantit qu'il sera accepté. Le vice-président de la Chambre de commerce américaine, Sean Heather, a qualifié cette initiative « d'illégale », estimant qu'elle outrepassait les prérogatives de la FTC. « La Chambre est confiante dans le fait que cette action illégale ne prendra pas effet », a-t-il ajouté, dans un communiqué. Pour Christine Wilson, la seule des quatre membres de la commission dirigeante de la FTC qui a voté contre la mesure, cette dernière est vouée à être invalidée par la justice, car la FTC n'a pas reçu de délégation expresse du Congrès américain

(AFP)

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.