
La température à la surface de la Terre est sur le chemin d'une augmentation de 2,7°C d'ici 2100 par rapport à l'ère pré-industrielle, ce qui ne sera pas sans conséquence. Selon une étude parue ce lundi 22 mai dans Nature Sustainability, cela devrait pousser plus de 2 milliards de personnes hors de la zone de confort climatique qui a permis à l'humanité de se développer pendant des millénaires. Soit 22% de la population mondiale à cette échéance.
Parmi les pays comptant le plus grand nombre de personnes qui pourraient être confrontées à une chaleur mortelle dans ce scénario, on retrouve dans le trio de tête l'Inde (600 millions de personnes concernées), le Nigeria (300 millions) ou l'Indonésie (100 millions).
« Cela représente un remodelage profond de l'habitabilité de la surface de la planète et cela pourrait conduire potentiellement à une réorganisation à grande échelle des endroits où les gens vivent », souligne Tim Lenton, de l'université britannique d'Exeter, auteur principal de l'étude.
Température annuelle moyenne de 29°C
Le seuil de « chaleur dangereuse » a été fixée dans l'étude à 29°C de température annuelle moyenne. Historiquement, les communautés humaines ont été les plus denses autour de températures moyennes de 13°C (dans les zones tempérées) et dans une moindre mesure de 27°C (dans des climats plus tropicaux).
Les risques sont accentués dans les régions le long de l'équateur terrestre. Le climat peut en effet y être mortel à des températures plus basses qu'ailleurs en raison de l'humidité, qui empêche le corps humain de se rafraîchir par la transpiration.
« Les coûts du changement climatique sont souvent exprimés en termes financiers mais notre étude souligne le coût humain phénoménal de l'échec à s'attaquer à l'urgence climatique », indique Tim Lenton.
Cette étude sort alors que le gouvernement présente justement ce lundi son plan d'action de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il doit aussi lancer mardi sa nouvelle stratégie d'adaptation pour faire face à un réchauffement qui pourrait y atteindre les 4 degrés d'ici à la fin du siècle. Reste que, comme le montre une étude tout juste publiée, décarboner l'économie ne sera pas sans conséquence pour l'économie, au contraire : cela va ralentir la croissance et alourdit la dette du pays. C'est néanmoins impératif et inévitable.
Chaque centième compte
Tout n'est cependant pas perdu. En limitant le réchauffement à 1,5°C, comme le veut l'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris de 2015, le nombre de personnes exposées à ces risques serait réduit à moins d'un demi-milliard de personnes. Chaque centième de gagner compte, comme le souligne l'auteur de l'étude.
« Pour chaque réchauffement de 0,1°C au-dessus des niveaux actuels, ce sont 140 millions de personnes supplémentaires qui seront exposées à une chaleur dangereuse », alerte Tim Lenton.
Le monde connaît actuellement un réchauffement proche de 1,2°C sous l'effet de l'activité humaine, notamment de l'utilisation des combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz). Ce qui entraîne déjà son lot de catastrophes, des canicules aux sécheresses en passant par des feux de forêt.
Des chaleurs extrêmes déjà enregistrées en Asie
Le mois d'avril a été marqué par des chaleurs extrêmes enregistrées dans différents pays d'Asie. Ainsi, certaines régions de l'Inde ont connu des températures supérieures à 44C°, ce qui a causé la mort de 11 personnes au moins près de Bombay. Le Bangladesh a connu son jour le plus chaud en six décennies à Dacca, sa capitale. La Thaïlande a enregistré dans la ville de Tak son record historique de chaleur à 45,4C°, où deux décès ont été signalés, comme la province de Sainyabuli au Laos établissait un record national à 42,9C°.
Selon les climatologues internationaux de l'initiative "World Weather Attribution"(WWA), la récente vague de chaleur humide, au Laos et en Thaïlande, aurait été pratiquement impossible sans l'influence du changement climatique, bien qu'il s'agisse toujours d'un événement très inhabituel qui ne survient qu'une fois tous les 200 ans environ. Mais avec une hausse de 2°C qui se produira d'ici trente ans si les émissions ne cessent pas, de tels épisodes risquent de survenir tous les 20 environ, souligne WWA. Au Bangladesh et en Inde, de tels épisodes, qui se produisaient moins d'une fois par siècle, sont désormais attendus une fois tous les cinq ans en moyenne. Sans réduction des émissions, ils surviendront au moins une fois tous les deux ans.
(Avec AFP)
Sujets les + commentés