Zone euro : le spectre de la crise de la dette revient, met en garde la BCE

Le vice-président de la Banque centrale européenne, Luis de Guindo, a appelé les Etats de la zone euro à faire attention à la viabilité de leur dette souveraine en cette période de taux directeurs élevés. Ces derniers ont fortement augmenté le coût d’endettement de certains pays comme la France ou l’Italie.
Luis de Guindos a, en effet, réaffirmé lundi que la BCE maintiendra ses taux élevés « pendant suffisamment longtemps (de façon à) contribuer substantiellement » à atteindre un objectif de 2% environ d'inflation.
Luis de Guindos a, en effet, réaffirmé lundi que la BCE maintiendra ses taux élevés « pendant suffisamment longtemps (de façon à) contribuer substantiellement » à atteindre un objectif de 2% environ d'inflation. (Crédits : WOLFGANG RATTAY)

La crise de la zone euro des années 2010 est encore dans toutes les mémoires. Et le durcissement des conditions monétaires opérées par la Banque centrale européenne ravive les craintes de nombreux hommes politiques et économistes. Dans l'optique de juguler l'inflation trop élevée, les taux directeurs de la BCE sont aujourd'hui au plus haut depuis 1999, entre 4% et 4,75%, se répercutant sur les taux des obligations des Etats européens.

C'est fort de ce contexte que Luis de Guindos, vice-président de la BCE, a mis en garde ce lundi les Etats membres sur la viabilité de leur dette.

« Des coûts de financement plus élevés et des politiques budgétaires moins prudentes pourraient raviver les inquiétudes quant à la viabilité de la dette souveraine, en particulier dans les pays où les niveaux d'endettement sont déjà élevés », a-t-il averti, dans un discours prononcé à Francfort.

La dette italienne regardée de près

Et pour cause, suivant les taux directeurs, le taux d'intérêt à 10 ans de l'obligation du Trésor français a atteint 3,26% en novembre, quand il s'affichait en dessous de 0 avant janvier 2022. Une véritable épine dans le pied pour l'Hexagone dont la dette représente 111,8% du Produit intérieur brut. Fin septembre,  le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici avait notamment pointé du doigt la lourdeur de la charge de la dette. « L'État principalement, et les administrations publiques en général, s'apprêtent à verser 57 milliards d'intérêts en 2024 et ce montant atteindrait 84 milliards en 2027  », avait-il précisé.

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Mais la crainte de la BCE est surtout de voir arriver une divergence de dynamique entre les taux directeurs des différents Etats. La gardienne de l'euro est donc particulièrement attentive aux « spreads », qui représentent les écarts de rendement entre l'emprunt allemand, qui fait référence, et ceux d'autres pays en zone euro. En effet, alors que leurs taux à 10 ans étaient tous les deux en dessous de 1% en 2021, le taux italien a atteint 4,52% en novembre, quand celui de l'Allemagne ne s'est établi qu'à 2,69%. Pour de nombreux experts à la BCE, c'est aujourd'hui l'Italie, dirigée par la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni, qui inquiète compte tenu de son énorme dette publique équivalent à 144% de son PIB en 2022.

La hausse des taux inquiète

Cette fragmentation des taux d'endettement rappelle la situation qu'a vécu le Vieux continent entre 2010 et 2012. Durant cette période, l'Europe a été confrontée à une crise de la dette partie de Grèce, surendettée et incapable de se refinancer sur les marchés, avant de se propager à d'autres pays. L'épisode avait fait craindre un risque d'implosion de la zone euro.

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Aujourd'hui toutefois, les « spreads » sur les marchés des obligations d'État sont « restés contenus », a rassuré le vice-président de la BCE ce lundi. Et pour cause, de nombreux gouvernements ont en effet obtenu des « financements bon marché sur des échéances plus longues pendant la période de faibles taux d'intérêt ».

Mais quand sera-t-il dans le futur ? Luis de Guindos a en effet réaffirmé que la BCE maintiendra ses taux élevés « pendant suffisamment longtemps de façon à contribuer substantiellement » à atteindre un objectif de 2% environ d'inflation. Dès lors, les Etats devraient être amenés à renouveler leurs lignes de dettes à des taux très élevés.

La BCE tient à rassurer les marchés

Luis de Guindo a également assuré que, dans le même temps, la politique budgétaire en zone euro devrait viser à rendre l'économie « plus productive et à réduire progressivement la dette publique élevée », a-t-il martelé.

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Enfin, en cas de tensions sur le marché de la dette, la BCE dispose dans son arsenal d'un « Instrument de protection de la transmission » (TPI). Celui-ci lui permet d'acheter des obligations d'Etat dont les rendements augmenteraient trop vite par rapport à ceux de l'Allemagne. Plus précisément, ce mécanisme permettrait à l'institution de Francfort de vendre des obligations d'Etat allemand pour acheter des obligations italiennes en cas de trop grosse divergence entre les taux des deux Etats.

(Avec AFP)

Commentaires 9
à écrit le 14/11/2023 à 10:56
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Ce vice-président "douteux" vient nous reparler des dettes, alors que ni la BCE, ni la Fed, ni la Banque Mondiale, ni le FMI, ni aucuns régulateurs n'ont eu le courage de s'attaquer sérieusement (depuis une décennie) aux privilèges exorbitants (et lé...

à écrit le 14/11/2023 à 8:26
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Ok ben arrêtez de nous endetter alors ! "Nous sommes nuls et c'est de votre faute !" LOL !

le 14/11/2023 à 9:37
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ce sont les memes qui ont encourager les délocalisations et le commerce international ce sont eux qui ont profite du fric facile alors ouvrer votre compte bancaire par solidarite pas d'illusion la plus grosse escroquerie au monde

le 14/11/2023 à 10:03
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Nous sommes bien d'accord et en plus nous avons assisté à cette aberration depuis sa création. Déjà enfant je me demandais comment cela n'allait pas générer du chômage de masse... mais à la télé ils étaient formel, c'était génial ! Une idée révolutio...

à écrit le 14/11/2023 à 7:23
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S´il a raison sur le fond, il devrait s´adresser directement à Macron : pas une semaine sans l´annonce de nouvelles dépenses, sans compter la lutte de Macron contre l´immobilier, qui engendre une baisse des rentrées fiscales (ex. : pour les départeme...

à écrit le 13/11/2023 à 23:46
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@Azerty: Qui a dit: l'argent n'a pas d'odeur?

à écrit le 13/11/2023 à 20:36
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Toujours un plaisir de lire les propos de Raymond n'ayant pour ma part aucune compétence particulière en économie, je m'en tiens aux chiffres et au bon sens paysan. Donc dans vingt ans nous sommes la Grèce de 2012 ce constat en partant de 2018 avant ...

à écrit le 13/11/2023 à 19:20
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Luis de Guindo a également assuré que, dans le même temps, la politique budgétaire en zone euro devrait viser à rendre l'économie plus productive et à réduire progressivement la dette publique élevée] Ben voyons, avec une orthodoxie budgétaire des go...

le 13/11/2023 à 20:46
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Séquence nostalgie ;) .. Ancien président de la Commission Européenne José Manuel Barroso. embauché par Goldman Sachs. Les conflits d'intérêts ne posent pas de problèmes à Bruxelles.

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