Crédit Mutuel Arkéa interdit de s'implanter à Paris

La justice a confirmé la règle de territorialité au sein du Crédit Mutuel en interdisant à la fédération de Bretagne d'ouvrir une caisse à Paris. En revanche, le Conseil d'Etat a censuré la procédure de sanctions engagée par l'organe central contre les dirigeants d'Arkéa par manque d'impartialité.
Delphine Cuny
"Si le scénario d'indépendance était validé, [...] les limites de territorialité liées à l'appellation Crédit Mutuel disparaîtraient alors, ouvrant ainsi au groupe Arkéa de nouvelles perspectives de développement au-delà de ses territoires d'implantation historiques", se félicite le groupe breton.

[Article mis à jour à 15h35]

C'était un des sujets qui avaient mis le feu aux poudres dans le conflit qui mine la solidarité du groupe bancaire mutualiste. À l'étroit dans son périmètre, la fédération du Crédit Mutuel de Bretagne avait voulu ouvrir une agence et une caisse à Paris en 2013. L'organe central, la Confédération nationale du Crédit Mutuel (CNCM), s'y était opposé au nom du principe de territorialité (la défense des plates-bandes de chaque fédération régionale). Le groupe Crédit Mutuel Arkéa, dont fait partie la fédération de Bretagne, avait contesté cette décision, confirmée par le tribunal administratif de Paris en septembre 2016. La Cour administrative d'appel de Paris l'a de nouveau déboutée de sa demande cette semaine.

Dans un arrêt rendu jeudi, la cour a confirmé que la fédération de Bretagne n'avait pas le droit d'ouvrir une caisse à Paris, du fait de la règle de non-concurrence interne.

La CNCM s'est félicitée de cette décision qui a confirmé la "validité de l'organisation territoriale du Crédit Mutuel."

"Cette décision valide donc un principe essentiel de l'organisation du groupe Crédit Mutuel et de l'ensemble des réseaux mutualistes : la règle de territorialité. Afin de rationaliser la couverture du territoire, il ne peut exister qu'une seule fédération territorialement compétente pour une circonscription donnée" s'est félicitée la CNCM dans un communiqué.

Se développer hors de son territoire historique

Autre lecture bien sûr près de Brest, au siège d'Arkéa, où l'on a pris "acte" de l'arrêt qui "confirme le bien fondé du processus de consultation" des caisses locales engagé par le conseil d'administration sur "l'alternative entre un scénario d'indépendance assorti d'un changement de marque, et un scénario d'intégration dans un groupe Crédit Mutuel centralisé."

"Si le scénario d'indépendance était validé, le groupe Arkéa deviendrait une banque coopérative, mutualiste et territoriale totalement indépendante du reste du Crédit Mutuel. Les limites de territorialité liées à l'appellation Crédit Mutuel disparaîtraient alors ouvrant ainsi au groupe Arkéa de nouvelles perspectives de développement au-delà de ses
territoires d'implantation historiques", souligne le groupe breton dans un communiqué.

Une concurrence existe de facto déjà entre les six groupes régionaux au sein du Crédit Mutuel, notamment entre les deux plus gros, le CM11 (11 fédérations), basé à Strasbourg, et Crédit Mutuel Arkéa. Le CM11 possède le CIC, au réseau national, et une banque en ligne, par définition sans limite géographique (Monabanq, plus petite que Fortuneo chez Arkea), une filiale de crédit conso (Cofidis vs Financo), l'assurance, la gestion d'actifs, etc.

Impartialité non respectée

Autre décision de justice qui était attendue : le Conseil d'Etat a sanctionné la procédure de sanction engagée par la CNCM contre les dirigeants d'Arkéa. Confirmant en grande partie le jugement en référé de février, la juridiction suprême a jugé, dans une décision rendue publique ce vendredi, que la procédure était "contraire au principe d'impartialité" : elle a annulé deux articles des statuts de la Confédération, qui donnaient le pouvoir d'ouvrir la procédure au président et au directeur général de la CNCM tout en permettant la délibération en leur présence.

"Ces [articles] sont réputés n'avoir jamais existé et de nouvelles dispositions devront donc être prises pour permettre la mise en œuvre d'une procédure de sanction" explique le Conseil d'Etat.

En revanche,le juge administratif a rejeté les critiques de Crédit Mutuel Arkéa et des fédérations de Bretagne et du Sud-Ouest sur "le contrôle administratif, technique et financier exercé par la confédération sur les caisses." La CNCM est confortée dans sa mission consistant à "garantir la liquidité et la solvabilité" et à "instituer entre les membres du réseau, des mécanismes de solidarité contraignants, qui ne se limitent pas à la seule constitution de dispositifs préfinancés tels que des fonds de garantie." Et en conséquence :

"La CNCM a le pouvoir de retirer, à titre de sanction administrative, l'agrément qu'elle a délivré aux dirigeants des caisses et fédérations de Crédit Mutuel ou la confiance qu'elle a accordée aux présidents de ces dernières."

L'organe central peut donc bien engager une procédure de sanction contre les dirigeants d'Arkéa mais il faudra revoir la forme de ladite procédure et apporter plus de garantie sur l'impartialité de celle-ci.

Delphine Cuny

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