Près de 30 millions de Français ont accès à un réseau d'opticiens agréés par leur complémentaire santé. Le savent-ils ? L'utilisent-t-ils ? En sont-ils satisfaits ? Pour la deuxième fois la Centrale des opticiens, une centrale d'achats qui regroupe 2000 opticiens indépendants, a fait réaliser une enquête par Gallileo Business Consulting sur le sujet. Un échantillon représentatif de 915 porteurs de lunettes a été interrogé.
Le phénomène des réseaux de soins agréés a en effet pris de l'ampleur depuis deux ans, date de la première étude. Il y a en France six grands réseaux de soins qui délivrent des agréments notamment à des opticiens : Carte Blanche (Swiss Life), Santéclair (Allianz, MMA, Maaf), Itelis (Axa, Mutuelles Mieux Etre); Sévéane (Groupama, Pro BTP); MGEN ; Kalivia (Malakoff-Médéric et harmonie Mutuelles).
Premier constat : les consommateurs sont mieux informés
Les assurés sont mieux informés aujourd'hui de l'existence des réseaux de soins agréés par leurs assureurs santé ou mutuelles, selon l'étude de Gallileo. En effet, 8 assurés sur dix 10 connaissent désormais l'existence d'un réseau d'opticiens agréés par leur complémetnaire santé contre 6 sur 10 lors de la précédente enquête en 2010. Pour permettre la comparaison, l'étude a interrogé en 2012 des assurés auprès auprès de l'un de ces assureurs complémentaires : Allianz (ex-AGF), AXA, Groupama-GAN, MGEN, MAAF, MMA, MNT, c'est-à-dire les mêmes qu'en 2010.
Deuxième constat : les assurés qui boudent les réseaux sont plus nombreux
Mais comme l'observe Fabrice Masson, directeur de la Centrale des Opticiens, "contre toute attente, cette meilleure information ne se traduit pas par une utilisation plus large des réseaux par les assurés, au contraire, ils sont proportionnellement plus nombreux à s'en détourner". La part des consommateurs informés de l'existence d'un réseau d'opticiens agréés leur proposant des conditions de meilleurs remboursements mais qui ont décidé d'acheter leurs lunettes en dehors du réseau a doublé par rapport à 2010 : il était de 19%, il est passé à 39% en 2012.
Pour Fabrice Masson, cette progression des "assurés rebelles" est une "surprise" même si cette réponse est cohérente avec la préférence affichée des personnes interrogées pour la liberté de choix. En 2012 en effet, 57% des répondants préfèrent que la complémentaire santé ne rembourse pas 20% supplémentaires mais laisse le libre choix d'aller chez n'importe quel opticien, contre 38% en 2010.
A l'inverse, 43% des répondants en 2012 préfèrent être remboursés 20% de plus s'ils vont chez un opticien agréé alors qu' ils étaient 62% en 2010.
La proportion d'assurés qui a choisi d'acheter ses lunettes dans le réseau est en revanche restée stable : de 40% en 2010, elle passe à 41 % en 2012. "Les réseaux ne semblent pas réussir à augmenter leur taux de fréquentation", en conclut Fabrice Masson.
Troisième constat : la satisfaction liée à la qualité est plus élevée chez les opticiens non agréés
C'est l'un des chevaux de bataille de la Centrale des opticiens : démontrer que la qualité de la prestation est perçue comme meilleure chez un opticien non agréé par le réseau. Les porteurs ayant acheté leurs lunettes chez un opticien agréé par un réseau sont 53% à se déclarer tout à fait satisfaits mais ils sont 59% à se dire tout à fait satisfaits parmi ceux qui ont acheté leurs lunettes chez un opticien de leurs choix.
Tous les critères sont passés au crible dans l'enquête : la satisfaction est supérieure chez un opticien non agréé en ce qui concerne : l'écoute, la service après-vente, l'atmosphère du magasin, le conseil dans le choix des verres, le conseil esthétique sur le choix de montures.
En revanche, les opticiens agréés par un réseau obtiennent un meilleur score de satisfaction en ce qui concerne le reste à charge pour l'assuré (le prix qu'il paie de sa poche), la transparence du prix, et le rapport qualité prix (52% contre 50%).
En guise d'explication, Fabrice Masson se demande si les assurés, contraints d'effectuer leurs achats auprès d'un professionnel
imposé par leur complémentaire santé, sont plus critiques vis à vis de la prestation proposée. Et il s'interroge sur le comportement des opticiens agréés : "Les opticiens agréés, encadrés contractuellement et financièrement par les complémetnaires santé, accordent-ils la même attention à cette clientèle captive qui leur est envoyée ?"
Quatrième constat : le réseau agréé incite à renouveler ses lunettes plus souvent
Les porteurs de lunettes ayant réalisé leur dernier achat au sein d'un réseau d'opticiens sont 20% à les renouveler tous les ans et 34% tous les deux ans. Au total, le renouvellement moyen se situe tous les 2,6 ans.
Les porteurs de lunettes ayant fait leur dernier achat de lunettes chez l'opticien de leur choix sont 16% à changer de lunettes tous les ans, 31% tous les deux ans et 29% tous les trois ans. Si bien que la moyenne globale pour le renouvellement se situe tous les trois ans.
Les indépendants face aux réseaux d'optique des grandes enseignes et aux réseaux d'opticiens agréés
De là à conclure que les réseaux poussent à la consommation... il n'y a qu'un pas que le directeur de la Centrale des Opticiens ne franchit pas tout à fait.
Même si elle "n'est pas un syndicat" mais une centrale d'achat, comme le rappelle Fabrice Masson, la CDO souhaite, avec la réalisation de cette étude pour la deuxième fois, "alimenter le débat sur les réseaux de soins et sensibiliser les décideurs et les consommateurs à bien choisir leurs contrats d'assurance santé et, bien mesurer les conséquences liées à la pratique des réseaux de soins en terme de qualité de service", précise-t-il. Il faut noter qu'aucune étude à visée générale sur les pratiques des assurés vis à vis des réseaux ne vient pour l'instant concurrencer ces constats.
En lançant cette étude, la Centrale des opticiens vise aussi à défendre les intérêt des opticiens indépendants au nombre de 5000 environ sur un total de 11 500 opticiens en France qui se sentent pris en étau entre les réseaux de magasins des grandes enseignes et les réseaux d'opticiens agréés des complémentaires santé.
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